Objectif : 15 000 nouveaux olim

Le ministère de l’Intégration vient de présenter un plan pour encourager l’aliya des Juifs de France. Explications

Le député Yoni Chetboun (photo credit: DR)
Le député Yoni Chetboun
(photo credit: DR)

Il a fallu transférer la réunion dans l’auditorium. Les associations francophones étaient présentes en grand nombre à la Knesset, ce mardi 18 mars, pour la présentation officielle du programme de l’encouragement à l’aliya des Juifs de France par le ministère de l’Intégration. Et pour cause, la mobilisation politique des Franco-Israéliens occupe le devant de la scène ces derniers mois. D’abord avec l’élection du député des Français de l’étranger, Meyer Habib, très proche du gouvernement israélien et figure communautaire majeure. Ensuite, avec la création du mouvement Darkenou, qui cherche à remplir la fonction représentative francophone qui manquait jusqu’à présent à la communauté dans le paysage politique made in Israël. Enfin, en raison de l’agitation tristement célèbre causée par Dieudonné et du climat antisémite des plus délétères aujourd’hui perçu en France. Avec, cause ou conséquence, une hausse spectaculaire de l’aliya en provenance de l’Hexagone : + 70 % en 2013.

Une immigration qui soulève évidemment un certain nombre d’obstacles auxquels a souhaité s’attaquer, tambour battant, le député HaBayit HaYehoudi d’origine française Yoni Chetboun avec la création du Lobby francophone de la Knesset. Le lancement de celui-ci avait eu lieu il y a deux mois, en présence de force ministres et élus, promettant à tous de se mettre à l’ouvrage. Mardi 18 mars, la ministre de l’Intégration Sofa Landver présentait donc un programme élaboré par son ministère pour les 3 années à venir. Objectif : faire venir 15 000 Français d’ici 2017. Un chiffre loin des 50 000 personnes annoncées dans les médias, mais que la ministre a souhaité réaliste, et donc praticable.
Budget : 17,5 millions de shekels. Anticipant une légitime indignation face à une enveloppe aussi réduite pour un projet aussi ambitieux, le directeur général du ministère, Odded Forer, a détaillé toutes les mesures envisagées, dont un certain nombre d’actions législatives. Une commission gouvernementale pour la levée des obstacles en vue de l’aliya des Juifs de France va ainsi être créée sous la houlette du Cabinet du Premier ministre et du ministère de l’Intégration. « S’il faut légiférer, nous le ferons », a martelé à plusieurs reprises Mme Landver, elle-même immigrée d’ex-URSS. En ligne de mire : l’exercice d’un certain nombre de métiers, dont les professions libérales, mais aussi paramédicales, compliqué par un processus de reconnaissance des diplômes trop lourd. « Il est inadmissible qu’un médecin ayant exercé en France se voit empêché de travailler ici en Israël », a ainsi tonné Odded Forer.
1,2 million de candidats potentiels
Mais plus encore que les conditions pratiques, le ministère, qui s’est récemment rebaptisé de l’Aliya et l’Intégration, mise sur le facteur sioniste et identitaire. Un élément clef pour les quelque 300 000 Juifs français proches de la communauté, au malaise croissant face aux récentes attaques et dérapages antisémites qui se sont manifestés dans l’Hexagone. Mais le ministère souhaite également toucher les 700 000 membres de l’ensemble de la communauté (une estimation, les statistiques ethniques étant interdites en France), voire même au-delà. Selon les chiffres du gouvernement, plus d’1,2 millions de Français pourraient bénéficier de la loi Retour, en justifiant d’au moins un grand-parent juif dans leur arbre généalogique. Car le ministère veut aussi croire que c’est « l’attrait d’Israël et pas seulement l’antisémitisme » qui peut encourager à l’émigration des populations lassées du marasme économique français. Et de rappeler à cette occasion les prêts de 250 000 shekels accordés aux nouveaux immigrants par le ministère afin de fonder leur entreprise en Israël.
De son côté, l’Agence juive s’est engagée à dépêcher de nouveaux émissaires sur place afin d’informer les olim potentiels. Ses services ont d’ailleurs été débordés en décembre dernier par pas moins de 18 000 demandes de renseignements. Une tendance qui se confirme pour les premiers chiffres de 2014 : 717 personnes ont fait leur aliya depuis le début de l’année, soit deux fois plus que l’année dernière à la même période. Au total, ils étaient 3 348 à obtenir le passeport bleu sur l’année 2013, contre 1972 en 2012. Des chiffres que le gouvernement souhaite doubler avec un objectif de 6 000 nouveaux arrivants en 2016. Pas moins de 18 bus Taglit (programme estival pour les jeunes) ont d’ailleurs été réservés pour cet été. Le phénomène ne risque-t-il pas de se tasser une fois ce pénible pic d’antisémitisme hexagonal dépassé ? Les autorités ont décidé de ne pas laisser passer l’occasion. « Il y a une opportunité qu’on ne peut pas rater et le ministère de l’Intégration a décidé de s’investir pour ramener les Juifs de France à la maison », a ainsi confié Sofa Landver à l’AFP. 
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