Elle vend ses
petits fours haut de gamme et ses créations chocolatées dans tout le pays et
enseigne l’art de confectionner d’élégantes pâtisseries. « Peut-être que j’avais
ça en moi », dit-elle. « Depuis que je suis toute petite, j’aime les belles
choses, le raffinement. Selon moi, les pâtisseries doivent toujours être
décorées. Pas seulement les gâteaux, mais toutes les pâtisseries. » Libfroind,
la quarantaine passée, vit dans le quartier haredi de Romema, à Jérusalem. Elle
partage sa passion et son savoir-faire. Elle enseigne et écrit dans les
colonnes des journaux culinaires. Ce qui ne l’empêche pas de prendre soin de
ses 7 enfants – dont un nouveau né – et de travailler au lancement d’un
magazine rn hébreu sur la cuisine casher.
Il y a 17 ans, Libfroind se rend à New York avec son mari, étudiant en yeshiva,
et, sur un coup de tête, elle s’inscrit à deux mois de cours intensifs de
pâtisserie dans une prestigieuse école de cuisine. En rentrant en Israël, elle
décide de franchir une nouvelle étape et se lance dans l’art d’orner les
pâtisseries.
« Dans un premier temps, j’ai continué à m’instruire » nous raconte-t-elle. «
Je suis allée en Allemagne, en Espagne, en Italie… mais surtout en France ! ».
Problème : les ateliers culinaires auxquels elle participe ne sont pas cashers
et elle ne peut donc pas goûter ses productions, aussi tentant que ce soit. «
C’était très difficile », se souvient-elle. « Mais c’est un choix. Si tu
décides vraiment que tu ne peux pas, il n’y a rien d’autre à dire ou faire, tu
ne peux pas ! Certains professeurs étaient très compréhensifs, d’autres
beaucoup moins. » En rentrant chez elle après ses voyages à l’étranger,
Libfroind s’amuse à convertir les recettes non casher en casher. Une fois
qu’elle a bien rodé ses compétences, elle commence à enseigner à d’autres
femmes religieuses. C’est ainsi qu’il y a 13 ans, elle lance son affaire,
vendant des petits fours et autres délices miniatures.
Très vite, elle devient connue dans le pays comme « la reine des petits fours
», et écoule des centaines de créations chaque année. La petite entreprise
grandit et Libfroind demande alors à d’autres femmes orthodoxes de travailler
avec elle. Sa cuisine devient trop exiguë et elle s’installe dans un véritable
atelier professionnel.
Pour les religieux et les laïcs
« Au début, c’était très délicat pour moi
d’attribuer des tâches », raconte-t elle. « Je disais souvent à mes employées
“Ok, ne fais pas ça, je vais le faire”, parce que je ne leur faisais pas tout à
fait confiance. » Mais aujourd’hui, elle apprécie le fait de pouvoir déléguer
quand elle le peut et de se concentrer sur d’autres projets, comme ce magazine
culinaire qu’elle lance pour le prochain Pourim.
« Je trouve cela dommage. Nous sommes en Israël, une nation juive, et il
n’existe même pas de magazine de cuisine casher », dit-elle. Le journal qui a
pour titre « Buffet » sortira tous les deux mois. Il fera intervenir de grands
chefs du pays qui, selon Libfroind, se réjouissent de créer des plats casher
pour elle.
Elle se fait peu à peu connaître en dehors de la communauté religieuse et
confie d’ailleurs que depuis quelques années, elle travaille de plus en plus
avec des Israéliens laïcs. « Leur réaction est encore plus vive que celle des
religieux », s’étonne-t-elle. « Ils s’exclament : “Quoi ? Vraiment ? Vous êtes
religieuse ? Vous étiez probablement laïque avant” », décrit-elle.
Il y a presque deux ans, Libfroind publie un livre, L’élégance casher,
présentant ses créations culinaires et décoratives. Il est d’abord publié en
hébreu et se vend comme des petits pains avant d’être traduit en anglais et
exporté aux États- Unis. « C’était mon rêve depuis des années », relate-t-elle.
« Je voulais que ce soit quelque chose de vraiment spécial, mon ouvrage devait
être différent des autres ».
Le livre est un épais recueil : sur une pleine page sont présentées les
pâtisseries aux couleurs flash. « Il n’y a pas de mot pour décrire l’impression
que procure la publication de son propre ouvrage », s’exclame-t-elle. « C’est
comme donner naissance à un enfant. » Alors qu’elle pense déjà à un second
tome, elle s’occupe à plein temps de son magazine, de son entreprise et de sa
famille.
Elle voyage aussi régulièrement en Europe pour prendre des cours avec de
prestigieux chefs et pour participer à des salons culinaires. Elle enseigne
aussi à New York deux fois par an.
Libfroind est une femme à part, mais il y a bien une chose qu’elle a en commun
avec la plupart des Israéliens : « Je ne rate jamais un épisode de Master Chef
! ».
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