Pas de réponse à la main tendue du judoka israélien

A l'issue de leur combat, le judoka israélien a souhaité serrer la main de son adversaire égyptien, qui l'a refusée

Le refus d'une main tendue (photo credit: ASAF KLIGER)
Le refus d'une main tendue
(photo credit: ASAF KLIGER)
Deux images. La première, celle du judoka israélien Or Sasson qui vient d’offrir à Israël sa seconde distinction olympique : debout sur le podium, il exhibe avec un large sourire sa médaille de bronze. La seconde, celle du judoka égyptien Islam El-Shehaby refusant la main tendue de l’Israélien qui vient de le battre, et quittant l’arène sous les sifflets des spectateurs indignés d’une telle attitude. Pour sa défense, il dira plus tard : « l’Israélien a cherché à m’embarrasser, ce n’est pas mon ami, je n’ai pas à lui serrer la main… » des arguments peu convaincants.
Ce n’est hélas pas la première fois qu’un athlète se conduit de façon aussi peu sportive. Des athlètes libanais, iraniens, saoudiens ou originaires des émirats du Golfe ont parfois même préféré abandonner plutôt que d’affronter un Israélien. Beaucoup reconnaissent à mots couverts qu’ils l’ont fait pour éviter les foudres de leur gouvernement. On sait que des artistes libanais ont dû s’excuser pour s’être laissés prendre en photo à côté d’artistes israéliens.
Seulement ici c’est différent.  Israël et l’Egypte ne sont plus des ennemis. Ils ont fait la paix, échangé des ambassadeurs. Le président Sadate est venu en Israël ; Yitzhak Navon a été reçu au Caire avec tout le faste   dont l’Egypte est capable. Aujourd’hui, David Govrin est le treizième ambassadeur israélien à prendre ses fonctions à l’ombre des pyramides.
El Shehaby a 34 ans. Il est donc né près de dix ans après la guerre du Kippour, dernier conflit armé entre Jérusalem et Le Caire, et deux ans après l’établissement de relations diplomatiques entre les deux voisins. Et pourtant… 37 années de paix, une solide coopération sécuritaire, des échanges commerciaux fructueux n’ont pas réussi à dissiper l’hostilité profonde, pour ne pas dire viscérale, qui anime une large partie de la population égyptienne vis-à-vis de l’ennemi d’hier. La normalisation est toujours considérée comme une atteinte à l’honneur égyptien. On l’a vu quand un député a été exclu du parlement égyptien pour avoir « osé » inviter l’ambassadeur d’Israël à dîner.
Cette fois, ce sont des rumeurs qui ont couru d’abord. L’Egyptien refuserait d’affronter l’Israélien. Des on-dit vite démentis après la déclaration sans équivoque du ministre égyptien de la Jeunesse et des Sports, réaffirmant que son pays respectait la charte olympique et ses principes fondamentaux. D’autres bruits ont alors filtré : fort de son impressionnant palmarès, l’Egyptien, qui alignait 16 médailles d’or et 15 d’argent dans des compétitions internationales contre 12 médailles d’or et cinq d’argent pour Sasson, se faisait fort de ne faire qu’une bouchée de son rival. Sa victoire aurait alors été doublement applaudie.
Seulement il n’a pas gagné, et se trouve aujourd’hui attaqué sur deux fronts. Sanctionné et renvoyé chez lui par le comité olympique égyptien, rappelé à l’ordre par le CIO, il doit désormais faire face à l’opinion publique de son pays qui enrage d’une défaite infligée par un Israélien, mais qui lui pardonnera sans doute lors de sa prochaine victoire.
Dommage. Une poignée de main chaleureuse entre ces deux sportifs aurait eu une immense résonnance dans un Moyen Orient fracturé et menacé par la terreur de l’Islam radical. Qui se souvient ? En 1928, c’est un certain Salvatore Cicurel, fils d’une grande famille juive, qui avait représenté l’Egypte aux Jeux Olympiques d’Amsterdam dans trois disciplines : sabre, épée et fleuret.

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