Washington se rebiffe

Une autre tempête qui vient de l’Atlantique

Barack Obama (photo credit: REUTERS)
Barack Obama
(photo credit: REUTERS)
Il fallait s’y attendre : la venue du président américain à Jérusalem pour les obsèques de Shimon Peres a provoqué et provoque encore des remous à Washington. On se souvient que, seul dirigeant étranger invité à intervenir, Obama a prononcé un remarquable discours. Avec une grande émotion et des accents d’une sincérité inhabituelle, il a rendu hommage à celui qui comme lui avait reçu le prix Nobel de la paix. Allant plus loin encore, il a dit : « Après l’indépendance, entouré d’ennemis qui reniaient l’existence d’Israël, l’enfant qui voulait être un “poète des étoiles” devint l’homme qui a mis en place l’industrie de la défense israélienne, qui a conduit à la création d’une formidable force armée qui a permis de gagner les guerres d’Israël1 ». Des propos qui remettent en cause le narratif palestinien et qui en ont fait bondir plus d’un – y compris outre-Atlantique.
La riposte ne s’est pas fait attendre. L’avion présidentiel n’avait pas encore atterri sur le sol américain que la Maison-Blanche retoquait le discours de son chef et raturait avec élégance le mot Israël sur le communiqué de presse officiel intitulé « Remarques du président Obama à la cérémonie en mémoire de l’ex président israélien Shimon Peres, mont Herzl, Jérusalem, Israël. » On sait que pour les Etats-Unis, Jérusalem – Ouest comme Est – fait partie des territoires disputés dont le sort devra être décidé ultérieurement, au même titre que le Nagorno Karabach, le Cachemire ou le Sahara occidental. Ce qui n’empêche pas les ambassadeurs américains de venir présenter leurs lettres de créances au président de l’Etat d’Israël en sa résidence de Jérusalem. Il faut savoir concilier principes et pragmatisme.
Seulement la réaction de la Maison-Blanche est intervenue un peu tard. Le texte original avait déjà été transmis en centaines d’exemplaires et traduit dans des dizaines de langues ; tous les médias du monde n’ont pas repris la correction. Il fallait donc trouver autre chose. Ce fut la vigoureuse condamnation le 5 octobre par le Département d’Etat d’une « nouvelle colonie » ; un Département se disant « troublé » par cette mesure alors que les Etats-Unis venaient d’accorder à Israël une aide militaire d’un montant exceptionnel. La politique américaine concernant les colonies est bien connue ; toutefois il ne s’agit pas ici de créer une nouvelle implantation. Le gouvernement israélien, qui cherche désespérément une solution pour les habitants d’Amona – qui doit être évacuée conformément à l’arrêt de la Cour suprême d’Israël – envisage de leur construire des logements dans une implantation qui existe déjà. Peu importe : c’est le principe qui compte, d’où l’indignation américaine et la menace voilée concernant l’aide militaire. Washington ne transige pas avec les principes. A quelques exceptions près.
Le président Obama vient d’accorder une dérogation spéciale pour permettre à des pays amis comme le Soudan du Sud, la Somalie ou l’Irak de continuer à recevoir l’aide militaire américaine malgré la loi de 2008 interdisant l’octroi de cette dernière à des pays qui recrutent par la force des enfants soldats et les envoient au combat. Selon un représentant des Nations unies, des centaines d’enfants, certains de moins de douze ans, ont pourtant été recrutés au Soudan du Sud au cours des deux derniers mois. Mais il y a des cas où il faut bien concilier principes et pragmatisme ; non ?
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