Adoption de la loi sur les implantations

La Knesset a voté la légalisation des 4 000 logements construits illégalement en Judée-Samarie

Le parvis de la Knesset (photo credit: GPO)
Le parvis de la Knesset
(photo credit: GPO)
La manœuvre est historique : la Knesset a voté le 6 février la légalisation rétroactive de 4 000 logements construits sur des terres privées palestiniennes de Judée-Samarie, en échange de compensations financières ou foncières pour les propriétaires.
la loi a été votée par 60 voix pour et 52 contre. Naftali Bennett, le leader de HaBayit HaYehoudi, n’a pas caché sa satisfaction. « Notre détermination a payé », a affirmé le chef de file de la droite sioniste religieuse. « Que nos amis de l’opposition qui sont surpris qu’un gouvernement nationaliste fasse passer une loi en faveur des implantations se rassurent, cela s’appelle la démocratie », a ajouté le ministre de l’Education.
C’est aussi la première fois que la Knesset vote une législation applicable en zone C des territoires disputés, sous contrôle militaire israélien. Jusqu’alors, seule la loi militaire y était appliquée, d’où le fait que certains considèrent ce scrutin comme une première étape vers la souveraineté israélienne en territoires disputés.
L’opposition s’inquiète
Avant le vote en séance plénière, le chef de l’opposition Yitzhak Herzog a appelé la coalition gouvernementale à renoncer. Il a dénoncé une nouvelle étape vers une annexion de facto des territoires disputés et affirmé que les conséquences seront désastreuses pour Israël. « Il ne s’agit pas de se déclarer pour ou contre les implantations, mais de faire des choix en fonction des intérêts d’Israël. Le gouvernement fait ici passer une loi qui représente un danger pour le pays. Jamais dans notre histoire la Knesset n’a adopté de législation contraire aux principes de l’Etat de droit, et contre l’avis des principaux conseillers du gouvernement en matière juridique. Cette loi revient à une annexion de fait, contre laquelle nous nous élevons. Nous devons arrêter cela sans quoi cela va se terminer à La Haye. »
Plusieurs ministres sont intervenus pour contredire le chef du Camp sioniste. Parmi eux, celui de la Science, de la Technologie et de l’Espace, Ofir Akunis, qui a affirmé que la mesure ne rapprochait pas Israël de la réalité d’un Etat binational. « Nous n’annexerons pas de territoires où vivent des Palestiniens. Ils ont leur propre législation, leur autonomie, un gouvernement et un parlement. La loi n’est pas contraire au droit international. » Le député du Likoud Benny Begin a été le seul député de la coalition à voter contre. Le scrutin a eu lieu en l’absence de Benjamin Netanyahou, qui était en train de revenir de Londres où il s’est entretenu avec son homologue britannique, Theresa May.
Le Premier ministre, qui semblait à l’origine opposé au projet, n’a vraisemblablement changé de position qu’en raison des pressions exercées par Naftali Bennett. Cependant, le chef du gouvernement avait demandé à sa coalition de retarder le vote du texte, préférant attendre l’issue de sa prochaine rencontre avec Donald Trump. Il a précisé qu’il voulait éviter que la Maison-Blanche ne soit prise au dépourvu par la décision israélienne. « J’ai dit que j’agirai selon l’intérêt national et il est justement dans notre intérêt de ne pas réserver de mauvaise surprise à nos amis et encore moins à nos meilleurs amis », a dit le Premier ministre.
L’avocat général Mandelblit, opposé à la loi, a déjà fait savoir qu’il ne la soutiendrait pas devant la Cour suprême.
Levée de boucliers sur la scène internationale
Les réactions internationales ne se sont pas fait attendre. La France qui a accueilli Mahmoud Abbas à Paris le 7 février, a été parmi les premières nations à rappeler l’Etat juif à l’ordre. Le président François Hollande a dit « vouloir croire qu’Israël puisse revenir sur cette loi qui ouvre la voie à une annexion des territoires occupés ». Le chef de l’Autorité palestinienne a dénoncé quant à lui « une agression contre le peuple palestinien », pendant que la Ligue arabe accusait l’Etat juif de « vol de terres ».
L’ONU a d’abord mis en garde Israël avant l’adoption de la loi par la voix de son coordinateur spécial pour le processus de paix au Proche-Orient, Nickolay Mladenov. Ce dernier a expressément demandé aux députés de ne pas approuver la législation. Antonio Guterres, le nouveau secrétaire général des Nations unies, a vivement critiqué la loi, « en infraction avec le droit international » et a mis en garde Israël contre « d’importantes conséquences juridiques ». L’Union européenne a également réagi par la voix de sa haute représentante pour les Affaires étrangères, Federica Mogherini. Cette dernière a prévenu Israël contre l’établissement de facto d’un Etat binational et non égalitaire. Le Royaume-Uni et l’Allemagne ont également exprimé leur désapprobation. Londres a déclaré craindre pour la crédibilité d’Israël à l’avenir, tandis que pour Berlin, la loi remet clairement en cause l’engagement d’Israël en faveur de la solution à deux Etats
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Du côté de Washington, on refuse de commenter l’initiative israélienne avant la prochaine rencontre entre Benjamin Netanyahou et Donald Trump le 15 février prochain. Une entrevue qui s’annonce donc comme capitale pour le Premier ministre israélien : à l’issue de cet entretien, le chef du gouvernement saura s’il peut réellement compter sur le soutien indéfectible du nouveau locataire de la Maison-Blanche.
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