Le Français de la côte

Le touriste francais, attendu mais aussi critiqué. Qui est-il vraiment ?

tourisme francais (photo credit: Photo illustrative/Reuters)
tourisme francais
(photo credit: Photo illustrative/Reuters)

La rentré est là, les vacances sontfinies. C’est l’heure du bilan pour l’industrie du tourisme. Cette année, lesecteur va probablement battre un nouveau record : dépasser la barre des 3,5millions de touristes, contre 3,4 millions en 2011. Depuis quelques années, lesvacanciers se rendent toujours plus nombreux en Israël pour profiter desplages, visiter Jérusalem, admirer les paysages désertiques de la mer Morte, oules sites verdoyants et les rivières du Nord.

Des visiteurs qui forment un monde cosmopolite, dominé, toutefois, parquatre nationalités : Américains, Russes, Français et Anglais. Si en 2011, lestouristes français faisaient partie du top 3 des principales nationalités àvisiter Israël, avec 273 000 ressortissants, ils sont cette année détrônés parles Anglais.

De janvier à juillet 2012, le nombre de touristes en provenance del’Hexagone s’élève à 172 313. Il est donc fréquent d’entendre parler la languede Molière en longeant les plages de Tel-Aviv, ou de croiser des touristesfrançais, dans le centre-ville de Jérusalem. Rien d’étonnant, non plus, en ceschauds mois de juillet et août, de les rencontrer lorsque l’on prend un café àNetanya, que l’on pourrait surnommer : la petite France d’Israël.

Le touriste français en chiffres

Le touriste français de l’été s’assemble et se ressemble. Autour dequelques destinations privilégiées : Netanya, Eilat, et bien sûr Tel-Aviv etJérusalem. C’est d’ailleurs la Ville blanche qui détient la palme du nombre devisiteurs : ils sont plus de 65 %, toutes nationalités confondues, à se rendreà Tel-Aviv au moins une fois lors du séjour, et 62 % à Jérusalem.

Quant aux motivations des Français qui arrivent dans la Ville sainte :visiter famille et amis pour 33 % et explorer la cité historique pour 27 %.Précision, ou peut-être évidence : le touriste en provenance de France estessentiellement juif. Les pèlerins chrétiens ne représentent que 7 % des visiteursoriginaires de l’Hexagone.

Un chiffre très faible si on le compare aux données du ministère duTourisme, à l’échelle mondiale : en 2011, seuls 24 % des visiteurs étaient deconfession juive, pour 60 % de Chrétiens. La preuve de l’importance du tourismereligieux chrétien, si cher aux autorités israéliennes, pour la plupart enprovenance des Etats-Unis.

Bon nombre des touristes n’en sont pas à leur premier séjour. En 2011, 39 %d’entre eux, sans regard à leur pays d’origine, étaient déjà venus. Certainsviennent au moins une fois par an, voire plus. A noter qu’il s’agit souvent defamilles au grand complet ou de groupes de quatre personnes minium qui posent leursvalises en Terre sainte.

Cette année, plusieurs hôteliers font remarquer que Tisha Beav étant plustardif que d’habitude, les touristes français sont également arrivés plus tard.Ce qui met en valeur une catégorie spécifique et religieuse parmi lesHexagonaux. La plupart des vacanciers rencontrés (d’âges divers et résidantdans différentes villes en France) restent au moins une semaine en Israël. Lesstatistiques de 2011 estimaient la durée moyenne d’un séjour touristique à unedizaine de jours, contre une douzaine en 2010. Si les motifs des voyages sont divers, les festivités familiales,bar-mitzvas et mariages, arrivent cependant en tête.

Pénurie d’Hexagonaux ?

Bien que le pays reste une destination prisée des Juifs français, leurfréquentation a légèrement baissé en 2012. Selon les statistiques du ministèredu Tourisme, le mois de juin a enregistré une baisse de 7 % d’arrivées enprovenance de France. Une diminution pas forcément ressentie par lescommerçants sur place, certains allant même jusqu’à souligner une augmentation.Mais dans les hôtels de la rue Hayarkon à Tel-Aviv, les avis sont partagés.Pour les uns, aucune différence. D’autres, en particulier dans les hôtels hautde gamme (Leonardo, Renaissance, Hilton) notent une baisse franche, voire unechute de 50 % ! Mais quelles en sont les raisons ? Elles tournentprincipalement autour de considérations économiques. La récession, bien sûr,qui frappe l’Europe en général et la France en particulier et réduit d’autantle pouvoir d’achat des vacanciers. Et en parallèle, ces derniers sont nombreuxà souligner l’augmentation du coût de la vie en Israël

Les visiteurs dépensent en moyenne, toutes nationalités confondues, 1 320dollars en Israël pendant leur séjour. Selon les professionnels, les vacancierss’autorisent en général un budget d’environ 1 000 euros par personne. Avec lahausse de la TVA israélienne et le flottement des devises américaines eteuropéennes, les considérations budgétaires sont donc de mise. Mais comme lenote l’agence de voyages Jad à Paris, certes il est “difficile de dépenseraujourd’hui, mais les touristes partent quand même”. Les Français n’hésitentd’ailleurs pas à sortir de leurs frontières, pour un tiers d’entre eux auminimum.

Même pas peur

Principal obstacle évoqué : le coût des hôtels israéliens. Selon lesdernières estimations, environ un quart des vacanciers prennent des forfaitssans hôtel. Ils étaient pourtant 72 % en 2011 à avoir réservé une chambre dansles nombreux hôtels israéliens (selon les chiffres de 2010, le parc hôtelier deTerre promise s’élevait à 47 600 chambres). 22 millions de nuits dans un hôtelont été enregistrées pour 2011, autant qu’en 2010. La moitié des réservationsétaient touristiques.

Conscient des prix élevés pratiqués dans tout Israël, le ministre duTourisme, Stas Misezhnikov s’est empressé de réagir : “Au vu de l’augmentationde la demande, il est urgent de créer de nouveaux hôtels, ce qui permettra destimuler la concurrence et ainsi de baisser les prix.”

Second obstacle avancé : le prix du billet d’avion, lui aussi hors de prix.Un désavantage considérable quand on sait que 73 % des touristes voyagent parles airs. Des données qui sont toutefois à relativiser : un grand nombre deFrançais sont propriétaires de résidences secondaires en Israël, appartementsde vacances à Eilat, Tel-Aviv ou Netanya. Et ne sont pas rares non plus ceuxqui sont hébergés par la famille lors de leur séjour. Les pèlerins, quant àeux, descendent souvent dans des résidences religieuses (notamment àJérusalem). Pour tous ceux-là, les prix du marché hôtelier n’auront aucuneincidence. 

Et quid de la situation politique ? Pour l’heure, les considérations sur uneéventuelle guerre avec l’Iran ne semblent pas faire peur aux Juifs de France,connus pour leur solidarité sans faille avec un Etat régulièrement en proie àdes menaces sécuritaires. Cet été, les agences de voyages n’ont enregistréaucune annulation pour cause de tensions dans la région. Les touristes juifsfrançais ne prennent pas en compte les soubresauts politiques au moment de réserverleurs vacances annuelles en Israël. Que le ministère du Tourisme se rassure,Tel-Aviv et Netanya n’ont pas fini d’entendre parler la langue de Molière.