Coup dur pour Liberman

La nouvelle affaire qui éclabousse Israël Beiteinou tombe mal : trois mois à peine avant les élections, et au moment même où Liberman s’est détourné de son électorat de prédilection

Le ministre des Affaires étrangères Avigdor Liberman (photo credit: MARC ISRAEL SELLEM)
Le ministre des Affaires étrangères Avigdor Liberman
(photo credit: MARC ISRAEL SELLEM)
Depuis sa formation en 1999, Israël Beiteinou a fait l’objet d’enquêtes policières à chaque campagne électorale, sans exception. Le ministre des Affaires étrangères l’a souligné lui-même mercredi, après que l’affaire ait été rendue publique : « Comme cela a été le cas au cours de chaque période électorale depuis qu’Israël Beiteinou a été créé, la police, une fois de plus, n’a pas manqué l’occasion de médiatiser les arrestations et les investigations contre des membres de notre parti. »
Mais la mauvaise publicité n’existe pas. Qui le sait mieux que Liberman ? En 2009, malgré l’investigation qui se poursuit contre lui, son parti remporte 15 sièges à la Knesset – un record. Comme si les enquêtes policières aidaient finalement Israël Beiteinou, éveillant au sein de son électorat – à grande majorité originaire d’ex-URSS – un sentiment de solidarité contre la victimisation de ses membres – essentiellement russes d’origine. Ces investigations attiraient également les électeurs les plus à droite, heureux de dénoncer la mainmise de la gauche sur le pays, les médias et la police. Et ce, même si la droite est au pouvoir depuis des décennies, que le journal le plus lu en Israël aujourd’hui est pro-Netanyahou, et que l’actuel ministre de la Sécurité publique, en charge de la police israélienne, est issu d’Israël Beiteinou.
Mais cette fois, cela pourrait ne plus être le cas. Car Liberman a changé de direction, s’éloignant de son électorat de prédilection : les Russes et la droite.
Ce n’est pas la première campagne au cours de laquelle Israël Beiteinou tente de se démarquer de son image de parti des russophones. Selon les sociologues et les sondages, la plupart des immigrants de l’ancienne Union soviétique ne votent plus en bloc. Sans compter la nouvelle génération, mieux intégrée à la société israélienne.
Le parti russophone se déplume ?
Mais le phénomène nouveau, c’est que le leader d’Israël Beiteinou se présente ces dernières semaines comme l’homme du centre et répète à qui veut bien l’entendre son soutien à la solution à deux Etats. Il déclare que les implantations isolées devront être évacuées – alors qu’il vit lui-même dans l’une d’entre elles, Nokdim. Selon certaines rumeurs, que les dirigeants du parti ont refusé de confirmer, les figures les plus à droite d’Israël Beiteinou – le ministre du Tourisme Ouzi Landau, le ministre de l’Agriculture Yaïr Shamir et le député David Rotem – pourraient même ne pas faire partie des candidats à la prochaine Knesset. Israël Beiteinou change donc de direction. Pour l’instant, le parti perd des voix à droite, au profit du Likoud et d’HaBayit HaYehoudi, sans parvenir à voler l’électorat des partis centristes, Yesh Atid et Koulanou.
Quand Liberman a été acquitté des charges qui pesaient contre lui en 2013, les analystes politiques avaient prédit, sur le ton de la raillerie, qu’il paierait son innocence aux prochaines élections. Il semble que, contre toute attente, ils aient vu juste. La semaine dernière, Liberman était encore crédité de 9 sièges, mais selon un sondage de la radio militaire, 40 % des électeurs d’Israël Beiteinou affirment ne plus être sûrs de voter pour le parti suite à ce nouveau scandale.
Mais cette nouvelle enquête aurait pu ne pas être fatale à Liberman si seulement il ne s’était pas détourné des électeurs qui le soutenaient envers et contre tout. Le ministre des Affaires étrangères risque bien de devoir réviser sa stratégie.
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