Bilan de la pauvreté en Israël

Dans son rapport annuel sur la pauvreté publié lundi 17 décembre, l’association Latet, qui vient en aide aux plus démunis, considère que 2012 est une « sombre année » pour l’Etat hébreu.

2612JFR08 521 (photo credit: Nir Elias/Reuters)
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(photo credit: Nir Elias/Reuters)
L’ inquiétude se focalise sur les enfants. Lerapport annuel de l’association Latet (Donner), présenté lundi 17 décembre àRishon Letsion, fournit une série de données quant aux conséquences de lapauvreté sur la vie des plus jeunes. Des chiffres qui interpellent etinterrogent sur le futur de ces adultes en devenir. La moitié des enfants defamilles pauvres se voient ainsi dans l’obligation de travailler. Une netteaugmentation par rapport à 2011, où ce chiffre n’était que de 19 %. Et ils ontégalement été 10 % à mendier au cours de l’année écoulée, contre 3 % l’annéeprécédente.
Les difficultés économiques affectent aussi l’éducation. Un cinquième desfamilles interrogées a déclaré avoir renoncé à une éducation convenable pourleurs enfants afin de pouvoir acheter des produits alimentaires de premièrenécessité. L’acquisition de livres et de fournitures scolaires s’est avéréedifficile. En effet, en 2012, 62 % de ces jeunes n’avaient pas le matérielnécessaire pour étudier. Leur sphère sociale se voit également touchée, car 69% d’entre eux n’ont pu participer aux activités périscolaires proposées par lesétablissements.
Quant aux personnes âgées bénéficiaires d’une indemnité gouvernementale, seules4 % déclarent que la somme perçue leur permet de vivre dignement. 95 % desIsraéliens qui vivent des aides associatives ont déclaré avoir été contraintsde renoncer à certains besoins élémentaires, par manque de moyens, et 63 %n’ont, par exemple, pas pu subvenir à leurs besoins médicaux. Une donnéeparticulièrement alarmante, car selon le rapport, 36 % des ces bénéficiairessont chroniquement malades, ou handicapés (soit une augmentation de 44 % parrapport à 2011).
La question de l’emploi a également été soulevée dans l’étude.
Elle révèle que 15 % des Israéliens cumulent deux emplois, ou ont dû en changerafin d’augmenter leurs revenus.
De surcroît, 18 % de la population a sollicité un emprunt bancaire pour faireface aux difficultés économiques de 2012.
Pour revenir à la santé, on remarque que 38 % des sondés souffrent de troublescausés par le stress et la malnutrition, et que 21 % des bénéficiaires d’aidessont atteints de diabète, en directe corrélation avec la pauvreté. Lesdéséquilibres glycémiques sont souvent dus à l’incapacité d’acheter médicamentset nourriture, adaptés aux maladies et à leurs exigences alimentaires.
Plus qu’un simple slogan électoral 
Eran Weintraub, directeur exécutif de Latet,a ainsi déclaré dans un communiqué : « Si nous voulons survivre en tant quesociété pour encore 60 ans, il ne faut pas considérer la pauvreté comme leproduit de circonstances, mais comprendre que sa portée, sa gravité et sonimportance sont la conséquence directe d’une politique». « La situationpréoccupante d’enfants pauvres et les obstacles grandissants qui les empêchentde s’extraire de cette situation promettent d’autres générations de misère etde détresse », a-t-il ajouté.
« Notre objectif à Latet, organisation non partisane et non gouvernementale,est d’empêcher que cette ‘banderole sociale’ ne se transforme en un simpleslogan électoral. Par conséquent, nous appelons les principaux partis en licepour la 19e Knesset à faire connaître leurs projets pour réduire la pauvreté età s’engager pour résoudre le problème », a lancé Weintraub.
L’étude annuelle sur la pauvreté, menée par Latet depuis 10 ans, propose unbilan plus détaillé que celui de la Caisse d’assurance nationale, en examinantde plus près les difficultés quotidiennes des pauvres en Israël.
Le rapport de cette année comprend également les réactions de 675 personnesbénéficiaires d’aides d’ONG alimentaires, et 500 autres réactions du grandpublic. Parmi ces dernières, 69 % des sondés considèrent le traitement de lapauvreté et des inégalités sociales de l’Etat hébreu comme le problème le plusurgent, suivi par l’éducation, considérée comme prioritaire par 61 % despersonnes interrogées, suivie enfin par la sécurité nationale, désignée parseulement 44 % des sujets.
Par ailleurs, 75 % d’entre eux estiment que la situation socioéconomique représenteune plus grande menace que l’Iran.
Anticipant sur les élections du 22 janvier prochain, 56 % des sondés ont enfindéclaré que la promesse d’un parti de se pencher sur ce problème de la pauvretéinfluencera grandement leur choix électoral.
Les associations sonnent l’alarme 
« On ne peut pas imaginer ce que c’est d’êtreun parent, et de devoir annoncer à son enfant qu’il ne mangera pas ce soir » 
SYLVIE BERG
 Le rapport du Conseil national pour l’enfance publié mardi 18décembre est sans appel : le nombre d’enfants israéliens sous le seuil depauvreté est en croissance. Les associations locales ne se disent que peusurprises. Les chiffres, disent-elles, sont alarmants. 27 % des mineurs ontpassé une journée entière sans rien manger l’année passée.
Menashé Cohen, fondateur de l’organisation non gouvernementale « Hom »(chaleur), commente : « Les chiffres sont choquants pour le public, mais paspour nous ».
Hom, fondée en 2004, combat la faim chez les plus jeunes en distribuant àl’échelle nationale de la nourriture, des vêtements, des jeux et des biens depremière nécessité.
Selon Cohen, ces enfants n’ont même pas de lait ou de pain à la maison. « Ilsont faim, et ils ne racontent pas à leur camarades qu’après l’école ils vonttravailler, la faim au ventre, pour contribuer au revenu familial. Ils onthonte ».
Il explique que « certains recherchent des bouteilles vides dans la rue. Ilsarrivent parfois à se procurer des médicaments en recyclant ces dernières». Homdit vouloir se donner les moyens d’apporter au moins un dîner de Shabbat chaudpour ces enfants dans la misère.
Le président Shimon Peres a réagi au rapport en appelant tous les partis encampagne à mettre leurs contentieux de côté afin d’établir une politiquesociale commune pour les mineurs. La priorité, a-t-il déclaré, est d’investirdans les générations futures. Et de rappeler : « Un enfant mal nourri estsusceptible de devenir un adulte en mauvaise santé, physique, intellectuelle etémotionnelle. » La forte natalité, surtout à Jérusalem où l’on compte 22 000naissances en 2011, est un facteur important de cette pauvreté.