Vers leur dernière demeure

Les 4 victimes de l’Hypercacher seront enterrées en Terre promise

Le supermarché Hypercasher où s'est déroulé le drame (photo credit: DR)
Le supermarché Hypercasher où s'est déroulé le drame
(photo credit: DR)
Ils reposeront en Israël. D’après un responsable communautaire français, « les quatre familles ont décidé d’enterrer leurs morts en Israël ». Les obsèques, initialement prévues au mont des Oliviers, avaient finalement été fixées au mardi 6 janvier à 11 heures, au cimetière Har Hamenouhot à Jérusalem.
L’un d’entre eux, Philippe Braham, devait être enterré aux côtés de son fils, décédé il y a plusieurs années. « C’est ce qu’il aurait voulu », a confié sa femme au Jerusalem Post. Cadre dans une société d’informatique, père de trois enfants, Philippe Braham avait une quarantaine d’années. Il fréquentait la synagogue de Montrouge et ses enfants étaient inscrits dans une école juive de la ville, non loin du lieu où Amedy Coulibaly avait fait sa première victime jeudi matin. Son frère est le rabbin de la synagogue de Pantin, en proche banlieue parisienne. L’un de ses amis le décrit comme « quelqu’un de dévoué, toujours prêt à rendre service aux autres ». Il était dans l’Hypercacher pour faire quelques courses pour shabbat à la demande de sa femme. Bouleversée, inquiète, elle ne sait pas comment l’annoncer à ses enfants, et se demande : « Comment vont-ils grandir sans leur père ? ». Selon Ynet, l’ex-femme et le premier fils de Philippe Braham vivent également en Israël.
Au mauvais endroit, au mauvais moment
François-Michel Saada est l’aîné des victimes de l’attentat. Agé de 63 ans, il est né à Tunis en 1951. Il était marié depuis plus de 30 ans à Laurence Saada, institutrice psychomotricienne, et père de deux enfants, Jonathan et Emilie, qui vivent tous les deux en Israël. Un proche le décrit comme « un papa et un mari exemplaire », « quelqu’un d’extrêmement droit, qui a conduit sa vie pour le bonheur de sa famille, qui ne faisait jamais d’histoire ». Ce vendredi, François-Michel Saada se rend au supermarché pour acheter des halot (pains de shabbat). Quand il arrive, il voit le rideau du magasin en train de se baisser. Il n’est pas au courant des événements dramatiques qui sont en train de se dérouler à l’intérieur et, croyant que le magasin est en train de fermer, il se dépêche d’entrer pour faire ses courses. Coulibaly l’abat dès qu’il passe l’entrée.
Yohan Cohen, 23 ans, travaillait au supermarché Hypercacher. Il tenait l’une des caisses du magasin lorsqu’il s’est fait tirer dessus. Ses parents, comme beaucoup de juifs séfarades, s’étaient installés en France dans les années soixante, à l’époque où le vivre-ensemble au sein de la République était une réalité. Ils avaient posé leurs valises à Sarcelles, ville de banlieue parisienne longtemps emblématique pour sa coexistence pacifique entre communautés juives et musulmanes, jusqu’aux destructions de magasins cacher en marge d’une manifestation pro-palestinienne cet été. Contactée par L’Express, Yona Draï, une de ses amies, se rappelle d’un garçon « profondément gentil qui faisait passer le besoin des autres avant les siens ». La jeune fille décrit Yohan comme « un gros nounours, jamais énervé ou en colère ». Quelques jours avant de périr dans ce terrible attentat, Yohan avait, comme des millions d’internautes, exprimé sa solidarité avec les victimes de Charlie Hebdo, en affichant le panneau « Je suis Charlie » sur sa page Facebook.
« Quelqu’un d’à part »
Tous ceux qui le connaissaient parlent de son sourire et de sa joie de vivre. De son visage d’ange aussi. Mais loin de l’image du beau gosse à qui tout réussit, Yoav Hattab faisait avant tout parler son âme, distribuant à la pelle mots de Torah, d’encouragement ou de réconfort. Les habitants de Sarcelles où Yoav passait shabbat, évoquent également sa lecture de la parasha impeccable et particulièrement touchante.
Originaire de Tunis où son père Binyamin Hattab officie comme Grand Rabbin, le jeune homme, âgé de 21 ans, vivait depuis quelque temps en France où il étudiait le marketing et le commerce international. Au grand réconfort de sa famille qui le jugeait plus en sécurité à Paris… Ce vendredi 9 janvier, il se trouvait dans le supermarché Hypercacher de la Porte de Vincennes. Selon les témoignages, le jeune homme aurait tenté, dans un geste héroïque, de s’emparer de l’une des armes du terroriste avant d’être froidement assassiné, tout comme les trois autres victimes de ce terrible attentat.
Yoav rentrait tout juste d’un séjour en Israël organisé par Taglit et Relev. C’est Raphaël Gottfarstein, le coordinateur de cette association étudiante, qui avait organisé son voyage. Les deux se sont vus pour la dernière fois il y a tout juste une semaine lors d’un cours de Torah à Paris. En témoigne le selfie que Raphaël, encore sous le choc, vient de mettre en ligne. Comme les autres, il parle d’un jeune homme qui sortait largement du lot : « Lorsque je suis arrivé en Israël il y a deux semaines pour visiter le groupe de français Taglit-Relev, j’ai tout de suite demandé au guide, comme je le fais à chaque fois, s’il avait remarqué un totakh, c’est-à-dire un meneur, quelqu’un qui se distingue particulièrement. Sans hésiter, il a immédiatement désigné Yoav. J’ai alors aperçu un jeune homme en jogging, affairé à mettre les tefiline aux uns et aux autres avec un drapeau d’Israël sur le dos. »
Ce drapeau, Yoav ne l’a pas quitté de tout son séjour, marque de sa flamme pour l’Etat juif. Le jeune homme, qui avait découvert le pays cet été, aimait raconter qu’il avait embrassé la terre à sa sortie de l’avion : « Je suis amoureux d’Israël », répétait-il. Nathan Levi, qui a également fait la connaissance de Yoav lors du séjour avec Taglit, raconte à quel point les quelques jours passés avec lui l’ont marqué : « C’était vraiment quelqu’un d’à part, j’ai rarement connu une telle gentillesse et un tel enthousiasme vis-à-vis d’Israël ».
Rentré de voyage, Yoav n’avait plus qu’une seule idée en tête : terminer ses études le plus vite possible pour s’installer en Terre sainte et servir dans Tsahal. Avec un espoir : celui d’entraîner toute sa famille dans son sillage.
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