Kabuki : premier lever de rideau en Israël

Pour la toute première fois, Israël accueille une exposition de théâtre kabuki, un art folklorique japonais vieux de quatre siècles

japonais (photo credit: Collection The Jacob Pins collection du Musée d’Is)
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(photo credit: Collection The Jacob Pins collection du Musée d’Is)

C’était à l’occasion de la célébration des 60 ans de relations diplomatiquesavec le Japon. L’ambassadeur japonais avait suggéré qu’il y avait là une belle opportunité defaire découvrir la culture japonaise en Israël. Une opportunité que le Muséed’Israël et la conservatrice de la section Arts asiatiques, Miriam Malachi,n’ont pas laissée passer. Désormais, une partie de l’aile des Arts asiatiquesaccueille une exposition menue mais haute en couleurs consacrée à un élémentemblématique de la culture japonaise : le théâtre kabuki. Le thème est plusparticulièrement celui du travestissement d’acteurs masculins jouant des rôlesféminins.

L’exposition se base sur la collection de peintures et estampes du muséeainsi que sur le prêt de costumes originaux arrivés tout droit du Japon pourl’occasion. Le théâtre kabuki est une discipline vieille de 400 ans. Inventépar une prêtresse, cet art populaire était d’abord une affaire de femmes : surdes scènes de fortune montées à l’extérieur des villes, jouaient, dansaient etchantaient des femmes, chose alors révolutionnaire dans un Japon conservateur.

Alors que le pays connaît sa première période de paix depuis fort longtemps etque l’enrichissement de la population lui permet l’accès aux loisirs, le succèssera vite au rendez-vous.
De quoi attirer l’attention des puissants, et de la dynastie Tokugawa qui régnealors sur le pays du Soleil levant. En 1629, les femmes seront interdites dejouer sur scène par ce pouvoir au parfum totalitaire, qui jugeait fort immoralque s’exhibent ainsi des créatures féminines, qui étaient bien souvent desprostituées. C’est de là que vient l’onagata (rôle féminin joué par un homme) :il fallait que le spectacle continue.

Le métier se transmet, pas le costume

D’abord décoratifs, simples représentations féminines qui agrémentaient lascène, les onagata ont pris au fur et à mesure des décennies une importanceaccrue, devenant des personnages principaux. Les acteurs sont alors admirés,désirés, entretenus par de riches mécènes qui leur paient de flamboyantscostumes... Au milieu du XVIIIe siècle, le théâtre kabuki et les onagataconnaissent leur apogée, au cours de l’époque Edo qui voit un renouvellementculturel sans précédent au Japon. Les onagata incarnent la beauté et inspirentle respect à tous.

Entre-temps, ce théâtre de rue a quitté l’extérieur des villes pours’installer confortablement dans de luxueux locaux au coeur des quartiers deplaisir. Devenu un divertissement populaire extrêmement prisé, le kabuki attirede bruyantes foules qui viennent dîner, se détendre tout en assistant au spectacle,dans un mode de fonctionnement comparable à celui du cabaret. L’onagata estaussi devenu une affaire de famille : le métier se transmet de père en fils, etil n’est pas rare que des dynasties de plusieurs générations émergent. Ce quine se transmet pas en revanche, ce sont les costumes. Sublimes, colorés, faitsde soie pure et brodés de fil d’or ou de pierreries, ces objets extrêmementcoûteux restaient éphémères. L’acteur les portait quelques représentations,puis s’en débarrassait une fois l’étoffe salie par la sueur et la scène.

Ainsi il reste aujourd’hui peu des innombrables costumes d’onagata. C’est grâceà l’aide d’une grande chaîne de magasins japonais, qui au début du XXe sièclese spécialisait dans la mercerie et en possède aujourd’hui une collection, quele Musée d’Israël peut exposer certaines de ces magnifiques pièces. 

Chaque couleur et motif a un sens, et les parures brillent de mille feux aucentre de la salle d’exposition. Preuve du succès du kabuki, cet art autrefoisvulgaire est aujourd’hui le sujet de représentations dont le public s’apparenteà celui des opéras.

Curieux mais toujours flamboyant, l’art du travestissement théâtral aencore aujourd’hui sa place dans le coeur des Nippons, et qui sait, avecl’exposition du Musée d’Israël, peut-être bientôt dans celui des IsraéliensL’exposition est ouverte jusqu’au 10 novembre.

Deux soirées de représentation de théâtre kabuki sont organisées les 30 et 31août au Musée d’Israël.

Plus d’informations sur www.imjnet.org.il