France et Israël : le difficile combat contre le terrorisme de l’intérieur

La clémence ou la dureté face aux nationaux coupables d’actions terroristes est un choix éthique que chaque nation fait face à elle-même au moment où ce fléau la frappe.

 

Tandis que la France se partage entre partisans et opposants à la déchéance de nationalité des bi-nationaux convaincus de terrorisme, les uns au motif d’une citoyenneté-droit qu’aucun crime ne peut faire perdre, les autres de l’avis que le terrorisme doit être entendu comme une crime contre la nation, et qu’à ce titre, il justifie des mesures d’exception, Israël vit en ce moment un débat aux tenants très similaires, sur la réponse appropriée au terrorisme juif.

 

Mais malgré l’évidente similitude des enjeux du débat, l’affaire du « mariage de la haine », dans laquelle des extrémistes juifs sont filmés en train de poignarder symboliquement la photographie d’un bébé palestinien tué dans l’attaque terroriste de sa maison en juillet dernier, a été traitée par certains médias français avec toute la malhonnêteté intellectuelle et journalistique qu’on aurait pu attendre. Entre autre, l’article (fort peu journalistique) du Monde « Les images choquantes d’extrémistes juifs célébrant la mort d’un bébé palestinien », une fois de plus, use et abuse de (lourdes) subtilités lexicales et syntaxiques pour susciter le dégoût et l'intérêt morbide du public français. (On pourrait par exemple très difficilement trouver un titre plus artificiel que celui-ci pour concentrer autant de mots répugnants pour qualifier l’affaire…).

 

L’affaire est en soit tout à fait mineure et sa mise à jour médiatique par le Monde on ne peut plus biaisée: cela est clair dans la mesure où si le journal prend la peine de relayer les délires macabres d’extrémistes vaudous dans leur sphère privée, on ne comprend pas pourquoi il n’a pas relayé l’attaque terroriste où deux hommes juifs ont été poignardés (cette fois à couteau réel) et tués par un terroriste palestinien, le même jour, dans la vieille ville de Jérusalem (voir ici).

 

Et on ne comprend pas non plus pourquoi, si tout la valeur journalistique d’un sujet résidait dans le macabre et sensationnel, le Monde n’a jamais rapporté les affaires similaires dans la société palestinienne, ou chaque attaque terroriste réussie en Israël suscite des démonstrations d’allégresse dans les rues (voir Huff Post), des caricatures choquantes d’inhumanité (voir Times of Israel) ou la production de vidéos macabres enseignant aux enfants la gloire de la mort et de l’assassinat des juifs (voir ici).

 

Mais l’extrême partialité (qui s’apparente à de la manipulation délibérée du public) du Monde sur le conflit israélo-palestinien n’est déjà plus à établir.

 

En revanche, en ignorant délibérément de relayer la vague d’indignation généralisée que cette affaire a provoqué en Israël et les débats sur la réponse appropriée au ‘terrorisme juif’ qu’elle a suscité dans la société israélienne, elle nous prive en plus de l’analyse intelligente et enrichissante que les évènements en Israël pourraient apporter à la situation française.

 

En effet, de la gauche à l’extrême-droite, les mots n’ont pas été assez durs de la part du leadership politique israélien pour condamner les images. Le éditoriaux des journaux nationaux ne parlaient que du « mariage de la honte », les politiques condamnaient l’extrémisme nationaliste juif comme le péril même du projet de société israélien. Et, au moment où l’attaque terroriste de Duma avait lieu l’été dernier, la ministre de la Justice Ayelet Shaked (pourtant très à droite) n’a pas hésité à dire que les terroristes juifs méritaient la peine de mort tout autant que les terroristes palestiniens.

 

Israël a donc fait le choix de la dureté face au terrorisme, qu’il soit arabe ou juif, au prix de risquer d’abaisser les exigences de l’état de droit. Soit.

Que l’on soit pour ou contre une telle politique n’est pas ici immédiatement la question. Cependant, au moment où se profile la question de l’adoption d’une ligne politique dure en France contre le terrorisme, la France et Israël se tiennent du même côté –du côté des sociétés pour lesquelles la violence, son emploi et la réponse qu’elle appelle- est un problème plutôt qu’une solution.

 

Chaque société a ses « durs » et ses « cléments ». Mais, alors que la réponse juridique et éthique face à un terrorisme de l’intérieur est un débat difficile à trancher et qui agite toutes les sociétés démocratiques de manière similaire, la condamnation unanime et claire de toute forme de haine par la classe politique et la vaste majorité de la population reste la seule marque véritable d’une société politique saine, le seul espoir que la paix, intérieure et extérieure, ne soit pas définitivement perdue.