Beaucoup de bruit pour rien

Il n’y a qu’en Israël que la restriction sonore de l’appel des muezzins fait polémique

Vue d'un haut-parleur  (photo credit: MARC ISRAEL SELLEM/THE JERUSALEM POST)
Vue d'un haut-parleur
(photo credit: MARC ISRAEL SELLEM/THE JERUSALEM POST)
C’est un projet de loi qui, s’il n’a pas encore été adopté, réverbère déjà à travers tout le monde arabe. « Provocation dangereuse », prévient la Ligue arabe à partir de son siège au Caire ; « Une mesure qui va blesser plus d’un milliard de musulmans », renchérit un journal jordanien, tandis qu’en Israël plusieurs manifestations se sont déjà produites dans des villes et villages arabes. La Liste arabe unifiée, qui dispose de 13 sièges à la Knesset, a vigoureusement condamné le texte par la voix de son chef, Ayman Odeh, le même qui s’est distingué récemment par son refus de participer aux funérailles nationales de Shimon Peres, qu’il juge comme un fauteur de guerre et un symbole de « l’occupation » à l’origine de lois racistes. Cette fois, le parlementaire s’élève contre ce qu’il qualifie de nouvelle mesure raciste et populiste ciblant les Arabes israéliens.
De quoi s’agit-il au juste ? D’un projet de loi tendant à limiter l’usage des haut-parleurs dans les mosquées la nuit et au petit matin. On sait que selon la coutume, c’est par cinq fois que, chaque jour, les fidèles musulmans sont appelés à la prière. Par « jour » on entend ici les 24 heures. Une tradition, ou plutôt une obligation, qui remonte à l’aube de l’islam. Oui, mais voilà. A l’époque, c’était la voix d’un homme, le « muezzin » (« celui qui appelle »), qui s’élevait vers le ciel. Le problème aujourd’hui est que les mosquées disposent de puissants haut-parleurs et les utilisent de jour comme de nuit. L’appel du muezzin est donc entendu à des kilomètres à la ronde, et pas seulement par les citoyens arabes d’Israël, ce qui constitue pour beaucoup de non-musulmans une nuisance sonore parfois insupportable. Ces derniers se sont donc adressés aux députés pour leur demander de mettre fin à ce qui, par ailleurs, dépasse largement les normes de bruit tolérées par la loi.
Est-ce vraiment du racisme que de chercher une solution qui respecte les droits des uns et des autres ? Doit-on souligner que dans de nombreux pays où les musulmans ne sont pas majoritaires, cet appel n’est pas autorisé ? Et qu’en France, comme dans le reste de l’Europe, l’usage des haut-parleurs pour convier les fidèles à la prière, de jour comme de nuit, est interdit ? Et plus encore, que dans certains pays arabes tel l’Egypte, des restrictions ont été apportées quant au nombre de décibels autorisé ? Mais ce qui est valable pour le reste du monde ne peut évidemment l’être quand il s’agit d’Israël. Qui se souvient encore que pendant des siècles, à travers le vaste Empire ottoman – en Orient comme en Occident – les chrétiens n’avaient pas le droit de faire sonner les cloches de leurs églises ? Pour appeler les fidèles à la messe, le clergé en était réduit à utiliser des patins de bois que l’on frottait l’un contre l’autre…
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