Un orage qui gronde tout bas

L’antisémitisme se nourrit de l’hypocrisie ambiante

Antisémitisme (photo credit: WIKIPEDIA)
Antisémitisme
(photo credit: WIKIPEDIA)

Ce sont des petites nouvelles sans importance pêchées dans la rubrique des faits divers. Un musée indonésien vient de retirer le portrait 3D d’Hitler, pourtant très prisé par les visiteurs qui affluaient pour faire des selfies avec le dictateur. Son directeur regrette que la pression internationale l’ait obligé à prendre cette décision ; un éminent chirurgien d’origine japonaise a été exclu de l’académie de chirurgie esthétique américaine pour avoir fait l’éloge du nazisme, et déclaré que le nombre de victimes d’Auschwitz avait été exagéré ; des jeux vidéo prennent comme thème des camps de concentration. Mais rien à voir avec l’antisémitisme, bien sûr, pour une certaine presse bien-pensante.

Il ne faudrait pas non plus voir de l’antisémitisme dans les positions du mouvement BDS – boycott, désinvestissement et sanctions –, lancé par les Palestiniens en 2005 et bénéficiant d’un large soutien dans les milieux libéraux occidentaux. Il ne s’agit « que » de contraindre Israël à respecter le droit international, et notamment à permettre aux millions de descendants des Palestiniens ayant fui en 1948 de « revenir » chez eux à l’intérieur d’Israël – sorte de version moderne du cheval de Troie. C’est d’ailleurs par un pur hasard que les tenants du BDS ont organisé une grande manifestation à Berlin la semaine dernière, le jour où l’Allemagne commémorait le pogrom de la Nuit de cristal. Ils n’étaient sans doute pas au courant. Bien sûr, ils ne cautionnent pas certaines pancartes ouvertement antisémites affichées par des « éléments incontrôlés » lors de leurs activités, mais leurs services d’ordre se gardent bien de les faire retirer. Ils ne condamnent pas non plus le slogan « de la mer (Méditerranée) au fleuve (Jourdain), la Palestine sera libre » qui appelle ouvertement à la destruction d’Israël ; pour finir, le site officiel du mouvement a critiqué une nouvelle fois la déclaration Balfour, la qualifiant de « déclaration de guerre contre le peuple palestinien ». On s’en voudrait, également, de parler de l’antisionisme doublé d’antisémitisme de « milieux issus de l’immigration » en Europe, qui sont pourtant à la pointe du mouvement, car le faire nous exposerait à des accusations d’islamophobie.
Tous les antisémites ne sont pourtant pas antisionistes. Ainsi le Congrès juif européen se dit-il préoccupé par « la hausse spectaculaire du nombre d’incidents antisémites » en Pologne, pays ami d’Israël, tandis que les manifestations d’antisémitisme se multiplient aux Etats-Unis, notre allié de toujours. En France, la situation est plus nuancée du fait d’une confluence entre la droite traditionnelle qui soutient Israël mais n’aime pas les juifs, et l’extrême gauche antisioniste, laquelle fait souvent front commun avec « les milieux issus de l’immigration ». La presse française évoque régulièrement des insultes et parfois des attaques physiques à l’école contre les élèves juifs. Alors la lente hémorragie des juifs de France se poursuit. Un peu plus de 3 000 d’entre eux sont montés en Israël cette année. Moins que les deux années précédentes, certes, mais preuve, tout de même, de la tension dans laquelle ils vivent. C’est sûrement la faute à l’Etat juif. 
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