Sous le figuier, l’alcool !

A l’occasion de la fête de Pourim, célébrée à Jérusalem le 25 février prochain, zoom sur l’arak et ses petites soeurs, la Mahia et la Boukha.

Figs 390 (photo credit: Thinkstock/Imagebank)
Figs 390
(photo credit: Thinkstock/Imagebank)
Les Juifs n’ont jamaisété de grands buveurs. Mais, paradoxalement, ils ont toujours été impliquésdans les productions et commerces d’alcool au fil des siècles. En Europe del’Est, beaucoup sont distillateurs, une des rares professions qui leur estautorisée. En émigrant aux Etats-Unis, ils importent leur savoir-faire pourproduire, illégalement, du whisky pendant la période de la Prohibition.
Aujourd’hui en Terre Sainte, les Israéliens, et essentiellement les jeunes,boivent principalement de la vodka. C’est, de loin, la boisson alcoolisée laplus consommée dans le pays. Mais, de son côté, l’arak a toujours tenu uneplace de choix au Proche-Orient. Le nectar fait l’objet d’une vraie renaissanceaujourd’hui. Chez les Juifs de diaspora, le Scotch whisky est très apprécié, enparticulier le whisky de malt. Cet alcool, qui semble fasciner les communautésdu monde entier, est profondément ancré dans la culture juive.
Une longue tradition 
Cependant, aucune de ces boissons n’est vraiment celle desJuifs. Le whisky appartient aux Irlandais, aux Ecossais, aux Américains ouencore aux Canadiens, en fonction du lieu de sa fabrication. L’arak est avanttout originaire du Liban.
Quant à la vodka, elle vient de Pologne et de Russie.
Il existe néanmoins deux spiritueux, assez méconnus, produits par des Juifs etpour des Juifs : la Mahia marocaine et la Boukha tunisienne. Deux alcoolsconsidérés comme des eaux-de-vie (mahia signifie littéralement « eau-devie » enarabe). Ce sont en réalité des brandies fabriqués à base de fruits qui passentensuite par les étapes de la fermentation et de la distillation. L’idée est deconserver et de révéler l’arôme principal. La plupart des eaux-de-vie viennentde France – en particulier d’Alsace –, d’Allemagne ou de Suisse, tandis que laMahia et la Boukha sont toutes deux originaires d’Afrique du Nord.Traditionnellement, elles sont fabriquées à base de figues.
Un fruit qui possède une place de choix dans le folklore et la littératurejuive… C’est notamment une des sept espèces d’Eretz Israël. En réalité, il estassez difficile de consommer des figues fraîches : beaucoup en font desconfitures, mais celles-ci demeurent assez sèches et ne supportent pas bien lesvoyages. Ce fruit délicat commence également à se détériorer dès sa cueillette.La distillation s’avère donc une solution pratique pour profiter malgré tout deses saveurs.
Claudia Roden, doyenne de la cuisine moyen-orientale et méditerranéenne,explique dans son ouvrage Le livre de la cuisine juive que la Mahia peut êtrefabriquée à partir de dattes, de raisins et surtout de figues, parfumés àl’anis.
Et de décrire le processus : « Les figues, ou n’importe quel autre fruit, sontrecouvertes d’eau, mélangées avec du sucre et de l’anis et fermentent ainsipendant 3 semaines.
La préparation doit bouillir et la vapeur refroidie est distillée dans unalambic ».
Il s’agit bien sûr d’une production maison : « Autrefois, la bouteille de Mahiaétait sur la table du dîner, en compagnie du whisky et du coca-cola », relèveRoden.
Anis et figues 
Un nouveau micro-distillateur à New York a récemment relancé latradition. Il s’agit de la société Nahmias et Fils, située dans le quartierartistique de Yonkers YoHo, fondée par Dorit et David Nahmias. La famille deDavid fabriquait de la Mahia au Maroc, à Taznakht. Aujourd’hui, soucieuxd’honorer la mémoire familiale, il a choisi de retourner à la tradition. Lecouple produit des lots faits main, au look luxueux.
Par ailleurs, voilà des années que Bokobsa est l’adresse phare pour la Boukha.La famille, originaire de Tunisie, a été la première à produire cet alcool, àSoukra, près de Tunis en 1880. Toujours aussi poétique, le nom Boukha signifie« la part des anges ». Un terme qui s’explique par la grande évaporationd’alcool lors de la fabrication du produit.
Les anges, près des distilleries, seraient donc plus heureux, respirantallégrement les vapeurs d’alcool.
Alors qu’elle s’installe en France, la famille poursuit la tradition. Aprésent, Bokobsa, demeurée familiale, est devenue une société internationale deproducteurs et de distributeurs de vins et d’alcool casher.
La Mahia et la Boukha sont toutes les deux majoritairement utilisées comme desapéritifs. Certains les consomment toutefois en digestifs.
La Mahia Nahmias contient 40 % d’alcool. Elle est présentée dans une joliebouteille givrée comprenant un motif mauresque à l’avant. Un cadeau à offrir ensoirée. L’arôme de la boisson est délicat, et l’alcool n’est pas spécialementagressif. Le parfum d’anis n’est pas reconnaissable à l’odeur, mais s’invitesur les papilles en arrière-goût, après les premières gorgées. Le produit estcasher : son prix varie entre 40 et 50 dollars.
La Boukha Bokobsa contient 37,5 % d’alcool. On retrouve des notes fraîches etfruitées et la saveur est un peu huileuse sur le fond. Il vaut peut-être mieuxmélanger cet alcool avec de la glace ou l’utiliser en cocktail. La Boukha estégalement casher. Son prix : 149 shekels.
Enfin, la Boukha Bokobsa Prestige présente un arôme de figue plus prononcé.Elle est meilleure que la Boukha Bokobsa si l’on veut la boire seule. A servirdans un petit verre, à température ambiante. Produit casher. Coût de labouteille : 183 shekels.