Le prochain bras de fer entre Israël et les Etats-Unis

Alors que les négociations entre les grandes puissances et l’Iran sont en suspens, dans les coulisses de la diplomatie, l’équation se complique

Netanyahou et Obama (photo credit: DR)
Netanyahou et Obama
(photo credit: DR)
Début janvier, la composition de deux des institutions les plus influentes à l’échelle mondiale, le Congrès américain et le Conseil de sécurité des Nations unies, va changer pour les deux prochaines années. Au Sénat, au moins 8 nouveaux sénateurs républicains vont rejoindre leurs 45 collègues du même front, donnant au parti républicain le contrôle du Sénat et de la Chambre des représentants, pour la première fois depuis 2006. Au sein du Conseil de sécurité onusien, cinq membres non permanents – la Nouvelle-Zélande, l’Espagne, l’Angola, la Malaisie et le Venezuela – feront leur entrée pour un mandat de deux ans, remplaçant l’Australie, le Luxembourg, le Rwanda, la Corée du Sud, et l’Argentine. Les sièges restants seront occupés pour un an de plus par le Tchad, le Chili, la Jordanie, la Lituanie, et le Nigeria.
Vu d’Israël, cela signifie deux choses : encore plus de soutien de la part du Congrès américain, mais aussi plus de critiques de la part du Conseil de sécurité, puisque trois de ses membres n’entretiennent pas de relations diplomatiques avec l’Etat hébreu : la Malaisie et le Venezuela parmi les nouveaux venus, et le Tchad, parmi les Etats déjà membres.
Le Premier ministre israélien devra donc s’accommoder des nouvelles compositions des deux institutions pour gérer ce qui reste pour lui la priorité d’Israël : le dossier iranien.
Fin novembre, un vent de soulagement a soufflé sur Jérusalem quand les puissances du P5 + 1 et l’Iran ont annoncé qu’ils n’étaient pas parvenus à un accord. Pour Benjamin Netanyahou, les puissances occidentales ont pris la bonne décision. « Dans les prochains mois, alors que les négociations vont se poursuivre, il est crucial que les sanctions soient maintenues et même intensifiées », a-t-il insisté. Pour le Premier ministre israélien, ce sont les sanctions qui ont poussé la République islamique à s’asseoir à la table des négociations et forceront l’Iran à faire les compromis nécessaires à un accord pour que Téhéran ne devienne pas une puissance nucléaire. Même si le secrétaire d’Etat américain John Kerry n’a rien dit qui laissait supposer qu’un durcissement des sanctions était à l’ordre du jour.
Donnant-donnant
Une bataille a donc été gagnée, mais la guerre n’est pas finie. La prochaine mêlée risque bien de se jouer non pas entre les grandes puissances et l’Iran, mais entre Israël et les Etats-Unis. Et c’est là que la composition du nouveau Congrès américain et celle du nouveau Conseil de sécurité viennent compliquer la donne.
Si l’administration Obama ne fait pas un pas vers le durcissement des sanctions dans les prochaines semaines, Benjamin Netanayhou pourrait décider de contourner le président américain, usant de son soutien au sein du Congrès. Après tout, c’est le Congrès qui a initié des sanctions, c’est à lui de décider de les intensifier.
Mais une telle mesure pourrait coûter cher au Premier ministre israélien. S’il ne ménage pas la susceptibilité du président américain, ce dernier pourrait se retourner contre lui dans le dossier palestinien. Barack Obama pourrait mettre moins de zèle à empêcher les Palestiniens d’imposer leur projet de résolution concernant un retrait israélien à l’intérieur des frontières de 1967 dans les trois prochaines années, devant le Conseil de sécurité de l’ONU. Le chef du gouvernement de Ramallah, Riyad al-Maliki a en effet expliqué cette semaine que les Palestiniens avaient repoussé leur plan, à cause de la pression exercée par la Maison-Blanche, et en raison de l’incapacité à obtenir les neuf voix nécessaires pour faire passer leur texte. Mais en janvier, quand les cinq nouveaux pays siégeront au Conseil, les écarts risquent de se réduire. Et Israël aura plus que jamais besoin du veto américain. Que fera alors Obama, si Netanyahou a agi derrière son dos sur le dossier iranien ?
Les deux dossiers ont toujours été liés. Plus Israël fait preuve de bonne volonté à l’égard des Palestiniens, plus Washington accepte de durcir le ton face à Téhéran. Mais l’équation est désormais plus complexe : plus Netanyahou usera de son influence pour faire plier Obama sur le dossier iranien, plus le soutien américain s’étiolera sur le dossier palestinien.
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