Le dilemme iranien

Les médias ainsi que des voix présidentielle et populaires s’agitent autour d’une attaque imminente des infrastructures nucléaires iraniennes

Dilemme iranien (photo credit: Reuters)
Dilemme iranien
(photo credit: Reuters)
Israël est confronté à une menaceexistentielle en provenance de l’Iran pour la première fois depuis sa création,a fait savoir le nouveau ministre de la Défense passive, Avi Dichter. “Nosennemis ont acquis des capacités d’attaque contre Israël”, a-t-il déclaré lorsde son discours d’investiture.Et d’ajouter que l’Etat hébreu possède des “capacités de défense actives” - àsavoir, un parapluie antimissiles à plusieurs niveaux - et que “les moyensconsidérables aux mains de l’armée” visent à s’assurer que le territoirenational ne se transforme en ligne de front. Son travail selon lui : limiter aumaximum les pertes humaines et matérielles dans les brèches que l’ennemiparviendrait à attaquer.
Suite aux propos du président iranien Mahmoud Ahmadinejad, qualifiant par exempleIsraël “d’insulte à l’humanité”, le leader Suprême iranien, l’ayatollah AliKhamenei, a pris le relais. “Les grandes puissances ont dominé le destin despays islamiques durant des années et installé la tumeur sioniste au coeur dumonde islamique. Israël est un danger pour l’humanité.” Des déclarations auxquelles a réagi lePremier ministre d’Albanie, pays à majorité musulmane, Sali Berisha : “Enannonçant qu’Israël n’a pas sa place au Moyen-Orient, le président iranien aprouvé qu’il partageait l’idéologie d’Hitler sur le peuple juif et sa nation.” Alors que l’on s’attendait à ce que l’Iran se calme afin de sortir de sonisolement international, pour un expert israélien, l’attitude de Téhéran nefait que prouver sa volonté de ne pas obéir à la logique occidentale. Selonlui, il est plus important pour les Iraniens de rabâcher leur idéologie, leurbesoin de libérer toute la “Palestine” plutôt que de plaire aux Occidentaux.
Préside et tais-toi 
Pour le Premier ministre Binyamin Netanyahou, l’intérêt d’Israëlest de renvoyer les plans nucléaires iraniens à quelques années pour gagner dutemps en espérant un changement de régime ou tout autre développement imprévu.Car une attaque ne détruirait vraisemblablement pas totalement le programmenucléaire des Mollahs. Selon des membres du gouvernement, le Premier ministre promeut une actionlégitime, car elle pourrait provoquer de nombreux développements imprévisibles. Comme par exemple, mettre en exergue la vulnérabilité de Téhéran qui pourraitalors précéder un changement de régime. Mais certains clament au contrairequ’une frappe unirait la population iranienne autour d’un régime impopulaire.
Pour Shimon Peres, le monde a conscience du danger d’un Iran nucléaire etIsraël n’est pas seul dans cette bataille. Le président dit avoir confiance enBarack Obama, son homologue américain, pour passer à l’action et empêcherl’Iran d’obtenir la bombe. Et d’ajouter “qu’il est clair que nous ne pouvons yaller seuls. Nous pouvons différer cette décision. Il nous apparaît évidentd’agir conjointement avec les Etats-Unis. Il existe des questions de coordination et de timing, mais aussi considérableque soit le danger, cette fois au moins nous ne sommes pas seuls.” Des propos vivement critiqués par des sources proches de Netanyahou. Selonelles, Peres a outrepassé sa fonction présidentielle purement symbolique. Et delui reprocher ses nombreuses mauvaises analyses, par le passé, quant à lasituation sécuritaire.
Notamment son opposition à l’attaque contre le réacteur irakien, sa foi en lesAccords d’Oslo qui ont coûté la mort de plus de 1 000 Israéliens et saminimisation des menaces d’un retrait unilatéral de Gaza en 2005, qui s’estconclu par des milliers de tirs de roquettes et de missiles depuis le Sud. Réaction immédiate de la chef de file du parti travailliste : pour ShellyYachimovitch, Netanyahou a sali l’institution présidentielle en l’attaquantaussi violemment. “Les déclarations du Premier ministre sur Peres étaientgrossières et violentes. Le fait qu’il se cache derrière ses associés n’atténuepas la dureté de ses propos.”
Lis la presse, mais écoute ton gouvernement 
Le ministre de la Défense EhoudBarak, devenu le ministre le plus belliqueux concernant l’Iran, a déclaréqu’une action contre Téhéran aujourd’hui n’était “pas simple, sans risques ouconséquences inattendues. Mais je pense qu’il est considérablement pluscompliqué, considérablement plus dangereux, considérablement plus complexe etconsidérablement plus coûteux en termes de vies et de ressources d’affronterune puissance iranienne nucléaire.” Quant au débat public largement médiatisé, Barak a répondu qu’il “existe uneautorité conférée au Premier ministre, au ministre de la Défense et au ministredes Affaires étrangères. Ainsi qu’un groupe de neuf ministres et un cabinet desécurité. Et que lorsqu’une décision devra être prise, elle le sera par legouvernement israélien. Cela a toujours été ainsi et c’est ainsi que cela doitêtre. Ni les assemblées de citoyens ni même les éditorialistes ne [prendront ladécision].” Si l’on s’en tenait à l’avis de la population juive, selon un sondage pourl’Institut israélien pour la Démocratie et l’université de Tel-Aviv, Israëln’attaquerait pas, sans protection américaine.

L’étude, conduite par l’Institut Dahaf auprès de 516 Juifs israéliens, montreque 61 % d’entre eux sont profondément ou modérément opposés à une attaqueisraélienne sans la coopération des Etats-Unis. Seuls 27 % déclarent soutenirtout à fait ou avec modération une telle action. Malgré les nombreux articles dans la presse israélienne concernant une attaqueimminente, le sondage révèle que 56 % des personnes interrogées estiment cetteoption comme faible. 33 % la considèrent très ou modérément plausible. Et si Peres se dit convaincu du soutien américain, les Israéliens sont moinsconfiants. 22 % affirment croire aux déclarations du secrétaire de la Défenseaméricaine, Leon Panetta, selon lesquelles “l’Iran ne possédera jamais d’armeatomique.” 70 % sont persuadés du contraire.