Une bonne et douce année pour l’économie israélienne

Experts et analystes scrutent les tendances du marché. Avec l’année nouvelle, la reprise s’annonce imminente, pour un démarrage en douceur.

p14 350 (photo credit: Reuters )
p14 350
(photo credit: Reuters )

Depuis le tempsdes pommes trempées dans le miel de l’an dernier, l’économie israélienne aconnu de nombreux soubresauts. Après une année particulièrement orageuse, ceRosh Hashana apporte avec lui la promesse d’une plus grande stabilité politiqueet économique.

En septembre dernier, alors que gâteau au miel et grenades ornaient la tablefamiliale, à travers le pays, pour le nouvel an juif, la crise autour du budgetde l’Etat était déjà en germe. Elle finira par faire tomber le gouvernement etconduire à de nouvelles élections.
Un déficit monstrueux 
Au lieu des 2 % du PIB fixés comme objectif de déficit,le dépassement des dépenses de l’Etat oscille aux alentours de 3 %, ce qui anécessité des augmentations d’impôts et des coupes budgétaires. En janvier, leschiffres définitifs du déficit atteignaient même 4,2 %, résultat desestimations de recettes trop optimistes faites deux ans plus tôt, lors del’adoption du budget bisannuel 2011-2012.
« Monstrueux ». C’est le qualificatif qu’employait alors Shelly Yachimovich, laleader travailliste, pour qualifier le déficit, au cours de la campagneélectorale. Quant à Yaïr Lapid, nouveau venu sur la scène politique, ilexigeait que le gouvernement cesse de se servir de la classe moyenne comme «distributeur automatique » pour combler ses lacunes budgétaires.
Après les élections, en janvier 2013, le premier ordre du jour du nouveaugouvernement était de s’atteler au budget. Car l’impossibilité de le faireadopter pouvait entraîner un nouveau tour de scrutin. Pourtant, avant que Lapid– il affirme lui-même être un novice en la matière – soit nommé ministre desFinances, rédige le projet de budget, le soumette au vote du cabinet, le fasseadopter par le comité des finances et finalement le fasse passer à la Knesset,le mois d’août était déjà presque arrivé.
Dans le même temps, l’agence de notation financière Standard & Poor’s (S& P) baissait la note de crédit d’Israël de AA- à A+. 
Nouveau gouverneur…sortant ! 
Dans sa forme définitive, le budget déclarait 2013 cause perdue etfixe l’objectif de déficit à 4,65 %, mais met en place un plan pour le ramenerà 3 % l’année suivante. Pour ce faire, Lapid doit faire passer plusieursmesures impopulaires : relever le taux de la TVA, augmenter les impôts sur lerevenu pour la deuxième année consécutive, pousser à la hausse l’impôt sur lessociétés, et réduire toute une série de prestations sociales.
Les prestations destinées aux familles ultraorthodoxes ont notamment étéréduites et redéfinies dans le cadre d’un effort pour pousser l’un des secteursles plus pauvres de la population dans la vie active.
Comme si l’incertitude qui entoure le budget ne suffisait pas, quelques joursaprès les élections, l’éminent gouverneur de la Banque d’Israël, StanleyFischer, annonce qu’il quittera ses fonctions en juin. Bien que les réformeslancées par Fischer pour professionnaliser la Banque, comme l’installation d’uncomité de six personnes pour prendre des décisions concernant les tauxd’intérêt, doivent permettre une transition en douceur, le Premier ministreBinyamin Netanyahou et Yaïr Lapid ne parviennent pas à nommer qui que ce soitpour prendre la relève, au cours des cinq derniers mois de mandat du gouverneursortant.
Finalement, leur choix se porte sur Jacob Frenkel, qui a dirigé la Banque de1991 à 2000. Durant son mandat, il a notamment contribué à juguler l’inflationgalopante en Israël.
Mais là où Fischer se servait d’un certain nombre d’outils stratégiques pourtenter de s’attaquer aux différents problèmes qui touchent l’économie d’Israël,comme le maintien d’une inflation modérée, la réduction des inégalités, lecontrôle du marché du logement, et la mesure dans le renforcement du shekel,Frenkel lui est plutôt considéré comme le roi de l’inflation.
Les analystes se demandent s’il saura s’adapter pour faire face à l’ensembleplus large des questions auxquelles Israël est confronté. S’il est prêt àintervenir sur les marchés comme Fischer. Cela reste une question théorique. Eneffet, le scandale d’un présumé vol à l’étalage dans un aéroport de Hong Kong,que Frenkel nie avec véhémence, l’amène à retirer sa candidature un mois aprèssa nomination.
Accalmie en vue 
Craignant peut-être un examen public similaire, le secondcandidat, Leo Leiderman, économiste en chef de la Banque Hapoalim, retire sacandidature après seulement deux jours.
Au milieu du brouhaha, un autre bouleversement agite également la Bourse de Tel-Aviv.Son directeur et son président annoncent tous deux leur démission, lorsd’affrontements avec la commission de contrôle des valeurs mobilières d’Israël.Aucun remplaçant n’a encore été nommé.
Pourtant, après tout ce tumulte, la période de remarquable incertitude enmatière de politique budgétaire et monétaire israélienne touche à sa fin,ouvrant la voie à une navigation en douceur pour l’année qui s’annonce. Lebudget pour le reste de 2013 et pour 2014 est complètement établi, et unnouveau gouverneur de la Banque d’Israël devrait prendre les rênes de lapolitique monétaire du pays après les fêtes, même si pour l’heure, aucun nomn’est encore avancé.
Les questions à l’avenir seront plutôt de savoir si le gouvernement va réussirà mettre en œuvre les réformes du marché, comme la construction de nouveauxports, le démantèlement des grands conglomérats et la lutte contre l’inflationdes prix du logement. Ou s’il va butter sur les stratégies régissant le gaznaturel récemment découvert en Israël et d’autres ressources.
Après les manifs, la reprise ? 
Au cours de l’année écoulée, le pays desstart-up a continué à faire ce qu’il connaît le mieux. Google, IBM, etBerkshire Hathaway ont tous réalisé d’importants investissements dans dessociétés israéliennes (Waze, Trusteer et Iscar, respectivement). Ons’attendait, par ailleurs, à ce que l’introduction du gaz naturel vienneajouter un point de pourcentage au taux de croissance du PIB du pays.
La poursuite de la crise économique mondiale, associée à un conflit deréglementation interne, a toutefois entravé les marchés israéliens, déjà à latraîne. Le volume des transactions a chuté à son plus bas niveau en huit ans,soit moins d’un quart de celui de 2010.
« Il ne s’agit pas d’une récession. Nous sommes encore en phase de croissance,mais à un degré moindre », déclare le responsable de l’analyse financière de laBanque Hapoalim, Yaron Fridman. « Assurément, il va y avoir une reprise. Laquestion est de savoir quand. » 
Fait intéressant, ce ne sont pas les plus grandesentreprises qui favorisent la croissance. L’analyse du taux de croissance de8,86 % d’après le TA-100, l’indice des 100 plus grandes entreprises, montre uneaugmentation de 26,19 % si l’on prend en compte l’indice qui exclut les 25premières entreprises. Le TA Midcap-50, qui comprend les 50 titres avec la plusgrosse capitalisation boursière non intégrés dans l’indice TA-100, a fait unbond de 46,51 %.
Bon nombre de grandes entreprises, qui ont traversé des moments difficiles, ontsubi l’influence d’événements extérieurs. Ainsi la compagnie pharmaceutiqueTeva a perdu un litige de brevet sur son médicament Copaxone aux Etats-Unis.Quant à l’Israel Chemical Corporation, ses pertes sont dues en partie à unequerelle qui a opposé les principaux négociants de potasse étrangers etentraîné l’effondrement des prix du produit chimique.
Prix à la baisse, clients en liesse 
Les entreprises qui ont tenu compte deschangements apportés par les manifestations de 2011, soit une plus grandesensibilité envers le consommateur israélien par rapport aux prix, ont refaitsurface cette année. Par exemple, les réformes très appréciées dans le domainedes télécommunications, qui ont fait chuter les prix des abonnements detéléphones portables, ont coûté aux entreprises jusqu’à la moitié de leurvaleur face à cette nouvelle concurrence.
« Cette année a été marquée par la relance après les manifestations sociales del’année précédente. Ces entreprises, au bout du compte, ont encore de lavaleur. A un certain moment le marché l’a compris », souligne Fridman. Commeles grandes entreprises de télécommunications continuent à fournirl’infrastructure, leurs revenus se maintiennent.
Les chaînes comme celles du supermarché Shufersal, ont également compris qu’enbaissant leurs prix, elles encourageraient leurs clients à revenir.L’immobilier, les services et le secteur financier ont également affiché desgains solides.
Avec l’incertitude affectant certaines entreprises et secteurs spécifiques,mais une tendance globalement positive, explique Fridman, les investisseursdevraient chercher à diversifier leur portefeuille. « Au lieu de la sélectiondes valeurs, il faut aujourd’hui suivre les indices », insiste-t-il. « On croitque nous allons assister à reprise importante, car nous sortons d’une passedifficile. » L’inverse est vrai pour le marché obligataire, soutient IlanBouchbout, qui dirige le secteur des titres à revenu fixe de la BanqueHapoalim. « Nous avons pu constater un intérêt grandissant pour les placementsà risque chez les investisseurs, avec une tendance au transfert de fonds versdes obligations plus risquées », explique-t-il. « Contrairement au portefeuilled’actions diversifié, de nombreux détenteurs d’obligations ne prennent passuffisamment le risque en compte. Pourtant on devrait vraiment sélectionner desobligations spécifiques. Les indices sont solides, mais il vaut mieux leschoisir. » 
Quant à l’avenir, après une nouvelle année de récession en Europe,et de dysfonctionnement politique qui a quelque peu entravé la reprise auxÉtats-Unis, la tendance économique mondiale semble enfin prendre un nouveauvirage à la hausse. Pour l’économie israélienne, ce sont de bonnes nouvellespour la douce année qui s’annonce.