Frappes en Syrie, Damas accuse Tsahal

Des médias israéliens et syriens affirment que l’armée de l’air israélienne a frappé diverses cibles en Syrie. Aucune confirmation officielle de Tsahal ne vient étayer ces déclarations

L'armée de l'air syrienne réagit aux frappes près de Damas (photo credit: ARAB SOCIAL MEDIA)
L'armée de l'air syrienne réagit aux frappes près de Damas
(photo credit: ARAB SOCIAL MEDIA)
La télévision d’Etat syrienne a affirmé dimanche que des avions israéliens ont bombardé des cibles proches de l’aéroport de Damas et dans la ville de Dimas, non loin de la frontière libanaise. L’agence de presse étatique a qualifié ces frappes « d’attaque flagrante contre la Syrie » qui prouve « l’implication directe d’Israël dans le soutien aux terroristes syriens contre lesquels se bat notre armée ».
D’après un correspondant de la télévision libanaise Al-Manar (proche du Hezbollah), Israël aurait frappé 10 zones cruciales du renseignement iranien. Des explosions auraient été entendues près de la frontière israélo-libanaise suite à ces frappes.
L’Observatoire syrien des droits de l’homme a, quant à lui, rapporté qu’une dizaine d’explosions ont été entendues à proximité de Dimas, ville située entre la capitale syrienne et le Liban. La même organisation affirme qu’un des missiles a touché un entrepôt d’import-export à l’aéroport international de Damas.
Pour Tony Badran, chroniqueur pour le site Now Lebanon et chercheur associé à la Fondation pour la défense des démocraties, prendre Dimas pour cible paraît sensé : il est tout à fait possible qu’une livraison d’armes transite par cet aéroport avant d’être acheminée vers le Hezbollah, et il est fort probable que de tels colis soient d’origine iranienne.
Nous avons interrogé le Pr Eyal Zisser, expert de la Syrie au Centre Moshé Dayan de l’université de Tel-Aviv. Pour lui, « la politique israélienne est claire : ne pas s’immiscer dans la guerre en Syrie. Israël n’a aucun intérêt à attaquer Bachar al-Assad et son armée, ou à renverser le régime. Toutefois, Israël a déjà profité de la faiblesse d’Assad pour agir contre des livraisons d’armes partant de Syrie à destination du Hezbollah ».
Ce n’est en effet pas la première fois que l’armée de l’air israélienne vise des cibles syriennes depuis le début de la guerre il y a 3 ans. Selon les officiels israéliens, la plupart de ces précédentes frappes avaient pour objectif de détruire des cargaisons d’armes (notamment de missiles) destinées aux terroristes chiites.
Lors de la réunion du cabinet dimanche 7 décembre, Benjamin Netanyahou a déclaré à ce sujet qu’Israël suivait avec attention l’évolution de la situation au Moyen-Orient, car « beaucoup de choses sont en train de se passer ». « Nous ne cesserons pas de surveiller la situation, et nous nous occuperons des menaces et défis à venir parce que, dans ce domaine, il n’y a pas de temps mort. Nous continuerons à traiter ces problèmes avec la même attention qu’avant », a-t-il ajouté.
L’armée israélienne n’a pour l’instant pas fait de commentaire.
La lutte contre la contrebande d’armes, un enjeu croissant pour la sécurité d’Israël
La guerre silencieuse que mène l’Etat hébreu contre le réseau de contrebande établi entre l’Iran, la Syrie et le Hezbollah surgit occasionnellement dans la sphère publique. On peut supposer que ces révélations surviennent quand les services de défense israéliens détectent une tentative de livraison d’armes sophistiquées au groupe terroriste chiite. En réalité, pas une semaine ne se passe sans qu’Israël n’intercepte une cargaison d’armes iraniennes, mais la plupart de ces opérations restent secrètes. Elles sont certainement le fruit d’une coopération rapprochée entre les services de renseignements militaires, le Mossad et le Shin Bet.
Car, même affaibli, le régime d’Assad reste le principal pourvoyeur d’armes du Hezbollah. Malgré son implication croissante dans la guerre civile du pays voisin, le groupe terroriste libanais n’a en effet pas cessé de reconstruire son arsenal. Il disposerait aujourd’hui de plus de 100 000 missiles, quasiment tous destinés à être utilisés contre Israël. Au cœur de ce réseau d’armement se trouve la Force Al-Qods, dirigée par Qasem Soleimani, souvent décrit comme un tacticien brillant. Plus tôt cette année, cette branche secrète des Gardiens de la révolution avait déjà tenté d’acheminer par bateau des roquettes M-302 vers Gaza. Israël avait réussi à intercepter la cargaison, au grand dam de la République islamique.
En cas d’attaque de ses infrastructures nucléaires par Israël, l’Iran pourrait riposter par procuration en utilisant le groupe terroriste chiite. Un tel scénario accroît encore un peu plus les enjeux liés à cette lutte secrète contre la contrebande d’armes. D’après les estimations de Tsahal, la puissance de feu du Hezbollah est l’une des plus importantes menaçant l’Etat hébreu. L’arsenal de Hassan Nasrallah est principalement composé de roquettes à faible portée, mais l’organisation terroriste s’efforce d’acquérir des missiles et roquettes guidés à longue portée. De telles armes seraient beaucoup plus dangereuses pour la sécurité d’Israël, puisqu’elles pourraient atteindre l’intérieur des terres et des cibles stratégiques comme les plateformes offshore.
Si les rapports sur les frappes israéliennes en Syrie sont avérés, il est probable que l’Iran, le Hezbollah et la Syrie s’interrogent sur la nécessité de répliquer et, si oui, comment. Leur décision dépendra, d’une part, de leur perception de la force de dissuasion israélienne et, d’autre part, de l’avancée de la guerre qu’ils mènent actuellement en Syrie contre la rébellion sunnite.
Les terroristes libanais pourraient pousser leurs partenaires à agir. Suite à l’attaque aérienne présumée par Tsahal d’une de ses bases au Liban, le Hezbollah avait répliqué en octobre en posant deux bombes dans la région d’Har Dov, près de la frontière avec l’Etat hébreu, blessant deux parachutistes israéliens. Signe que Nasrallah semble à nouveau prêt à répondre par les armes à chaque frappe israélienne supposée.
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