La mort d’Oslo ?

La commémoration de l’assassinat d’Itzhak Rabin entraîne un débat houleux à la Knesset

débat Rabin (photo credit: Marc Israel Sellem)
débat Rabin
(photo credit: Marc Israel Sellem)
Dimanche 28 octobre, les députés consacraient une session spéciale à la mémoire du Premier ministre assassiné Itzhak Rabin. Et se sont lancés dans un débat agité sur son héritage.
Le porte-parole de la Knesset, Reouven Rivlin, a proclamé que la solution à deux Etats n’était plus viable, tandis que le leader de Kadima Shaoul Mofaz, la chef des travaillistes Shelly Yacimovich et le ministre de la Défense Ehoud Barak ont au contraire vanté ses mérites.
“Aujourd’hui, presque 20 ans après Oslo, nous pouvons voir clairement que l’idée de séparer les nations palestinienne et israélienne a échoué”, a affirmé Rivlin.
“Aucune des nations n’en était convaincue à l’époque et aucune solution diplomatique sur le long terme n’a été trouvée”.
Selon le porte-parole, ceux qui croient toujours à la solution de deux Etats sont dans le déni des réalités. Et d’ajouter qu’il ne peut y avoir qu’un seul Etat entre le Jourdain et la Méditerranée. Ce dernier sera juif, démocratique et à majorité juive.
“Depuis mon enfance en 1948, nous avons su gérer la menace démographique, mais pour ce qui est des ridicules tentatives de diviser la terre, nous avons échoué encore et encore”, a-t-il pointé.
Rivlin a rappelé que Juifs et Arabes coexistent des deux côtés de la Ligne verte : à l’Université de Haïfa, à l’Université hébraïque et à l’Université d’Ariel. Avant de conclure en qualifiant Rabin de “visionnaire” qui a travaillé à garantir l’existence d’Israël. L’ancien Premier ministre était, at- il dit, “un leader, un visionnaire et un combattant pour la liberté d’Israël”.
L’opposition monte au créneau
Tous les orateurs suivants ont dénoncé son allocution. A l’exception du Premier ministre Binyamin Netanyahou qui n’a pas émis son opinion directement sur la question. Le dirigeant a déclaré que Rabin et lui n’étaient pas d’accord sur de nombreux points, mais “même lorsque nos adversaires politiques ne sont pas d’accord avec nous, cela ne signifie pas qu’ils aient moins d’amour pour le pays”.
Toutefois, Netanyahou a stipulé que si Israël “ne veut pas gouverner les Palestiniens ni qu’ils ne nous gouvernent, au cours de ces 17 années depuis les accords d’Oslo, tous les territoires que nous avons quittés ont été capturés par les émissaires de l’Iran”.
Barak a lancé une pique à Rivlin lorsque cela a été son tour de monter sur l’estrade : “Pour parler en toute franchise, j’aurais espéré que cette cérémonie à la mémoire de Rabin ne tombe pas sous la coupe des élections approchantes ni des primaires d’un grand parti - et ce, quelle que soit l’importance dudit parti”. Et d’ajouter que seule la solution à deux Etats assurera la continuation de l’entreprise sioniste. “Je suis convaincu que Roubi (Reouven) Rivlin, notre porte-parole, croit en la démocratie.
Et je lui suggère de se demander ce qui se passera lorsque des millions de citoyens à Naplouse, à Djénine et à Jéricho voteront pour cette assemblée. Ou encore quelle réputation Israël s’attirera s’il s’avère que ces millions de gens ne pourront pas voter pour la Knesset”, a tancé le ministre de la Défense avant de rappeler que Netanyahou s’était prononcé en faveur de la solution à deux Etats dans son discours à l’université Bar-Ilan, en juin 2009, puis à la Knesset et aux Etats-Unis.
Yacimovich s’est directement adressée à Rivlin en montant sur l’estrade, disant qu’elle avait modifié son discours après avoir entendu “sa performance extrémiste et régressive”. “Les Israéliens ne veulent pas de la vision que vous avez présentée”, a-t-elle poursuivi. “Cela ne les intéresse pas. Il n’y a pratiquement plus personne aujourd’hui qui souhaite vivre dans un Etat binational. Car qui souhaite abandonner la vision sioniste ?”, s’est interrogée la travailliste. Pour elle, ceux qui ne croient plus en la solution à deux Etats sont des extrémistes de gauche comme de droite et représentent un danger pour le sionisme. De plus, il est régressif de se focaliser sur les frontières car les Israéliens sont davantage intéressés par ce qui se passe à l’intérieur du pays. Elle a loué Rabin pour avoir fait passer une loi sur l’imposition des plus-values, ainsi que pour ses efforts pour distribuer “les ressources équitablement” et garantir l’égalité.
Mofaz a déclaré que sans processus diplomatique menant à la solution à deux Etats, “le rêve d’un Etat juif sioniste sur la Terre d’Israël sera anéanti”. Le chef de Kadima a pointé du doigt le vandalisme du “prix à payer”, le qualifiant d’activité antidémocratique et a fait le lien avec l’incitation contre le gouvernement à l’époque de Rabin. Et d’accuser “les dirigeants d’un parti dont nous avons appris l’existence il y a quelques jours”, faisant référence à la liste commune du Likoud-Israël Beiteinou, d’encourager de tels comportements, nés “dans la peur et la faiblesse”.