A la découverte de ces galeries oubliées

Le Musée d’Israël vous propose une visite pour le moins originale. Guidés par les énigmes de Métatron, vous devrez aider une jeune conservatrice désemparée pour ne pas vous retrouver bloqués.

 Israël Cagliostro à l'origine du parcours original au sein du musée d'Israël (photo credit: DR)
Israël Cagliostro à l'origine du parcours original au sein du musée d'Israël
(photo credit: DR)
Nora Shomron vient d’être embauchée par le Musée d’Israël. Mais depuis sa prise de fonction, elle reçoit d’étranges messages de Métatron, puissance divine selon la tradition juive, que l’on retrouve surtout dans la littérature mystique. Cette sorte d’ange kabbalistique la met au défi, l’abreuvant de curieuses questions sur le fond et la forme du musée. Prise au dépourvu, la jeune conservatrice demande l’aide du public pour venir à bout des énigmes.
De Shai Agnon à Leonard de Vinci
C’est donc un escape game grandeur nature que propose, jusqu’au 25 août, le Musée d’Israël à ses visiteurs. Une première mondiale, qui répond à un constat simple : certaines galeries de l’établissement culturel sont moins fréquentées que d’autres, trop excentrées, ou moins connues. La direction a donc voulu mettre en place une activité pour faire venir le public vers ces ailes du musée qui regorgent bel et bien de trésors archéologiques, mais restent souvent désertées.
C’est tout naturellement qu’elle s’est tournée vers Israël Cagliostro, magicien de métier depuis plus de quatre décennies, devenu, ces dernières années, spécialiste des jeux d’évasion. Avec son associée Mayan Rogel, ce maître israélien du surnaturel a planché plus de trois mois pour élaborer un parcours initiatique, qui combine les éléments traditionnels des escape games – énigmes, casse-tête, devinettes – avec une visite d’un autre genre dans les allées du musée. Les participants utilisent une carte spécialement conçue à cet effet pour se repérer et se déplacer d’objets en objets. « Nous avons voulu leur proposer une nouvelle grille de lecture de ce lieu symbolique. Tout le monde connaît le Musée d’Israël, mais en général, on s’arrête à certains artefacts et leurs légendes. Avec ce concept, nous suscitons l’intérêt et piquons la curiosité du visiteur pour ces ailes ignorées qu’il doit parcourir pour résoudre l’énigme. Au total, il lui faudra déambuler dans un dédale de galeries sur un parcours de quatre kilomètres ! », poursuit Israël Cagliostro.
C’est à Mayan Rogel que revient le choix des objets sélectionnés. Sa réflexion était double : balayer l’ensemble du Musée et des époques, mais aussi servir le scénario de l’intrigue. « Ou comment relier Shai Agnon et Léonard de Vinci ? », pointe Cagliostro. « Il fallait créer du sens, trouver une logique, mais les choses ont toujours un lien entre elles si on sait les assembler. »
A la mi-août, plus d’un millier de familles étaient parvenues à défier Métatron. « Le jeu est corsé, il est d’un niveau difficile, mais nous enregistrons 85 % de réussite. Ceux qui ne baissent pas les bras vont au bout », se satisfait le concepteur. « Nous avons aussi placé dans le musée des jeunes guides vêtus de tee-shirts de couleur, chargés d’aider les participants égarés. »
Comme tout jeu d’évasion qui se respecte, celui du Musée fonctionne à plein régime. Il s’adresse à tous les publics. « Nous pouvons voir des familles orthodoxes de dix enfants, des amis célibataires, des vacanciers, il s’agit véritablement d’une activité universelle », insiste Cagliostro.
Deux parcours sont proposés, en hébreu ou en anglais : un rouge pour les amateurs de difficulté et un bleu, plus abordable, pour les familles avec jeunes enfants. Ces escape games regorgent d’énigmes qui exigent des participants de savoir lire, et sont donc recommandés à partir de 7 ans. En moyenne, il faut compter entre 1 h 15 et 1 h 30 pour venir à bout des colles de Métatron, mais au contraire des jeux d’évasion qui se pratiquent en salle, aucune durée maximale n’est fixée.
« Nous avons baptisé ce concept Escape game sans limite », explique Israël Cagliostro. « Sans limite dans tous les sens du terme. D’un point de vue temporel, car le jeu permet de passer d’une époque à l’autre, de la préhistoire à nos jours, sans limite dans l’espace, puisque le visiteur peut naviguer dans tout le musée, et sans limite de temps, puisqu’on peut y passer la journée. Certains participants commencent d’ailleurs par le parcours bleu, font une pause déjeuner et attaquent ensuite le parcours rouge. »
La magie Cagliostrio
Une fois tous les casse-tête résolus, les visiteurs se retrouvent devant une porte, qu’ils doivent débloquer en composant un code. « Ce qu’ils découvrent est tout simplement déroutant. Je ne peux pas en dire plus. Ils sont photographiés quand ils arrivent au but, il faut voir leurs sourires et leurs exclamations de joie », s’enthousiasme le magicien. Ce qu’ils vont trouver va se révéler déterminant à plus d’un titre, d’une part pour la jeune Nora Shomron qu’ils ont entrepris d’aider, mais également pour eux, puisque leur découverte leur servira d’indice pour le prochain escape game que le Musée d’Israël prévoit d’ores et déjà de mettre en place à l’occasion des fêtes de Hanoucca, la suite de cette première version.
Israël Cagliostro ne signe pas là sa première collaboration avec le Musée d’Israël. En 1984, déjà, il avait réalisé un projet d’envergure, intitulé Magie de l’été, transformant l’institution en école géante d’apprentis sorciers. Puis en 2001, il avait conçu un spectacle de magie autour du dadaïsme et du surréalisme, Abracadada.
Cagliostrio est familier des coups de maître. En juin 2015, il faisait voler en éclats le précédent record du Guinness, en créant Haïfa, la magie pour la paix, la plus grande leçon de magie au monde. L’événement avait rassemblé 1 573 élèves de 10-11 ans, issus de 35 écoles de la région, juifs, druzes, chrétiens, bahaïs ou musulmans. Le maestro du passe-passe leur avait enseigné un tour de cartes basé sur les notions de paix, de dialogue et de coexistence.
Car ce magicien, sur le devant de la scène depuis 43 ans, aime donner du sens. Connu pour son savoir-faire en matière de jeux d’évasion – il possède lui-même son propre escape game à Raanana –, il est surtout l’un des concepteurs israéliens les plus en vogue des jeux d’évasion itinérants, un concept éducatif mobile en plein essor. « Aujourd’hui, les méthodes pédagogiques se doivent d’évoluer », explique-t-il, « chaque écolier a son téléphone, il est en permanence connecté. Notre idée consiste à faire de l’escape game une méthode éducative interactive qui intéresse et captive les plus jeunes. » Et de fait, cela fait bientôt deux ans que ses jeux d’évasion itinérants se déplacent d’école en école, à travers tout le pays. 
Jusqu’au 25 août
Prix du kit familial escape game : 15 shekels
Le Musée d’Israël est gratuit pour les enfants en août.
© Jerusalem Post Edition Française – Reproduction interdite