L'éthique de guerre israélienne

Peut-on gagner une guerre asymétrique contre le Hamas et d’autres terroristes du même acabit ?

Chars israéliens aux abords de la bande de Gaza (photo credit: MARC ISRAEL SELLEM/THE JERUSALEM POST)
Chars israéliens aux abords de la bande de Gaza
(photo credit: MARC ISRAEL SELLEM/THE JERUSALEM POST)
Quand les terroristes du Hamas – ou ceux d’organisations du même type qui opèrent dans la bande de Gaza – tirent des roquettes au hasard sur des civils israéliens, puis se cachent derrière des civils palestiniens, Israël doit faire face à un terrible dilemme moral.
S’il riposte et provoque la mort de Palestiniens innocents, il risque non seulement de perdre la bataille de l’opinion publique au sein même de la société israélienne, mais il s’expose en plus aux accusations de crimes de guerre dirigées contre lui par la communauté internationale.
C’est précisément à cela que l’on s’attend avec la présentation, ces prochains jours, à la Cour de justice internationale, des conclusions de l’enquête du Conseil des droits de l’homme de l’ONU sur l’opération Bordure protectrice de l’été dernier.
Mais si Israël se garde d’exercer des représailles contre les terroristes afin d’éviter les morts côté palestinien, il néglige alors son devoir de protéger les citoyens israéliens contre les agressions du Hamas.
Pour trouver le juste équilibre, les Etats-Unis et d’autres pays occidentaux, confrontés à des dilemmes similaires, par exemple en Afghanistan et en Irak, ont mis au point la doctrine du double effet et la règle de la proportionnalité.
Si l’on vise des objectifs militaires (des lanceurs de roquettes, par exemple) et que l’on sait par avance que l’attaque va également causer des victimes civiles (pudiquement désignées sous le terme de « dommages collatéraux »), on doit s’assurer que le nombre de civils tués ou blessés ne sera pas « disproportionné » par rapport à la valeur de la cible militaire.
Un calcul forcément très subjectif et qui a rarement permis de limiter les attaques militaires.
Dans la logique de guerre, quel que soit le nombre de morts parmi les civils, on peut toujours le justifier si l’objectif militaire est considéré comme suffisamment important.
De la moralité en temps de guerre
Un groupe d’experts militaires et de diplomates de haut rang vient d’apporter la preuve de la remarquable conduite de l’armée israélienne qui a réussi à gérer de façon étonnante un dilemme moral très difficile, au cours du conflit de l’été dernier entre Israël et la bande de Gaza contrôlée par le Hamas.
Parmi les membres de cette mission : l’ancien président du Comité militaire de l’OTAN, le général allemand (en retraite) Klaus Naumann, l’ancien ministre des Affaires étrangères italien Giulio Terzi, l’ex-ambassadeur itinérant pour les questions de crimes de guerre du Département d’Etat américain Pierre-Richard Prosper, et l’ex-commandant des forces britanniques en Afghanistan, le colonel (en retraite) Richard Kemp. Si l’ONG pro-israélienne UN Watch a participé à l’élaboration du rapport rédigé à la suite de leur enquête, il ne faudrait pas pour autant le rejeter d’emblée pour cause de partialité envers Israël.
Contrairement au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, qui nourrit des préjugés défavorables à l’Etat juif, cette délégation a comparé, de manière équitable et objective, la conduite d’Israël dans la bande de Gaza avec celle des armées occidentales dans des endroits comme l’Afghanistan et l’Irak, et noté le comportement en tous points remarquable d’Israël.
« Pour évaluer le sérieux d’Israël dans l’application de ses devoirs moraux et l’exercice de ses responsabilités en vertu du droit des conflits armés, il suffit de constater comment, dans certains cas, son respect scrupuleux des lois de la guerre lui a coûté la vie de ses propres soldats et civils », soulève le document. Un comportement qui va bien au-delà des normes morales les plus exigeantes.
L’intégrité morale d’Israël ne va certes pas impressionner les membres du Conseil de droits de l’homme de l’ONU qui s’apprêtent à livrer leurs conclusions en toute partialité. Mais l’analyse de ces militaires et diplomates de haut rang confirme ce que les Israéliens savent déjà : leur armée est l’une des plus morales – si ce n’est la plus morale – au monde.
Israël double l'ONU
Dans une volonté affichée de contrecarrer l’impact des conclusions de l’ONU sur le conflit de l’été dernier dans la bande de Gaza, avant même qu’elles ne soient publiées, le gouvernement vient de présenter son propre rapport sur le sujet. Pour Benjamin Netanyahou, le document de près de 300 pages dresse le « vrai tableau » du dernier conflit face au Hamas : « Ce rapport prouve sans aucune ambiguïté que les actions menées par l’armée et les forces de sécurité israéliennes dans la bande de Gaza étaient conformes au droit international », a déclaré le Premier ministre devant son cabinet. « Les soldats ont agi dans le but de défendre les civils israéliens contre une organisation terroriste coupable d’un double crime de guerre par l’attaque de civils et l’utilisation de boucliers humains ».
Israël a semble-t-il retenu les leçons du passé, et de la publication par l’ONU en 2009 de l’accablant rapport Goldstone sur l’opération Plomb durci. Cette fois, Jérusalem a donc décidé de prendre les devants et de fournir une réponse au prochain rapport de l’ONU.
Voici les principales conclusions du rapport présenté par le gouvernement intitulé : Conflit à Gaza en 2014 : aspects factuels et légaux.
 -La stratégie du Hamas est de multiplier les affrontements en milieu urbain afin d’utiliser les zones habitées et la présence de civils et d’en tirer un avantage tactique et un gain politique.
 -Ce qui a pu être perçu de l’extérieur comme des attaques visant délibérément des civils palestiniens était en réalité des opérations légitimes menées par Tsahal contre des cibles terroristes.
  -Israël a localisé et détruit 32 tunnels terroristes dont 14 qui arrivaient en territoire israélien.
     67 soldats de Tsahal, 6 civils israéliens et un homme d’origine thaïlandaise ont été tués.
    2 125 Palestiniens ont été tués : 44 % étaient des terroristes, 36 % des civils. Le statut de 20 % des victimes reste encore indéterminé.
  -Si le Hamas avait accepté de signer le premier cessez-le-feu proposé par l’Egypte le 15 juillet 2014, soit une semaine après le début du conflit, 90 % des victimes auraient pu être évitées.
  -Le Hamas et les autres groupes terroristes de la bande de Gaza ont tiré 4 500 roquettes et obus de mortiers sur Israël, dont 4 000 ont délibérément visé des civils.
  -En février 2015, 38 % des enfants israéliens habitant les villes proches de la bande de Gaza présentaient différents degrés de symptômes post-traumatiques.
   550 roquettes et obus de mortiers ont été tirés à proximité de sites « sensibles » : écoles, installations de l’ONU, hôpitaux et mosquées.
  -Le Hamas a lancé une vaste campagne dans la bande de Gaza afin d’inciter les civils à ne pas tenir compte des avertissements de Tsahal appelant la population à évacuer les zones qui allaient être bombardées.  Le groupe islamiste est allé jusqu’à la coercition physique pour empêcher les civils de quitter les lieux.
  -Toute opération des forces de Tsahal est préalablement validée par un panel composé de membres du renseignement et d’experts juridiques, afin de répondre aux critères fixés par la loi internationale dans les conflits armés.
  -La majorité des Palestiniens capturés par les forces de Tsahal sur le terrain des opérations ont été relâchés peu de temps après leur arrestation.
  -Tsahal s’est efforcé autant que possible de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire vers la population civile dans la bande de Gaza tout au long du conflit, mais également avant et après l’opération. Ce qui impliquait la fourniture d’équipements médicaux pour les blessés (y compris les combattants du Hamas), le transfert de denrées alimentaires, vêtements et médicaments, mais aussi la réparation des lignes électriques et des circuits de distribution d’eau.
 -Israël a lancé des investigations visant plusieurs de ses soldats soupçonnés de conduites inappropriées dans la bande de Gaza au cours du dernier conflit. Des délits qui, s’ils sont avérés, entraîneront des poursuites disciplinaires ou judiciaires contre le soldat incriminé.
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