Michel Jonasz, l’enfant de 65 ans

Après avoir présenté sa pièce de théâtre musicale Abraham en hommage à son grand-père déporté à Auschwitz, Michel Jonasz revient à Tel-Aviv pour faire découvrir son dernier album : Les Hommes sont toujours des enfants

jojo (photo credit: © DR)
jojo
(photo credit: © DR)
Michel Jonasz revient faire chanter l’opéra de Tel Aviv. Tubes et nouveautés résonneront dans une salle qu’il connaît bien. Cette fois, il sera accompagné de trois musiciens (un pianiste, un percussionniste et un guitariste) et de deux chanteurs. “La couleur du spectacle” tiendra aux nouveaux titres. Spectateurs, arrivez à l’heure, aucune première partie pour chauffer le public.
Sa voix de jeune homme perpétuel continue de faire vibrer les âmes. Quoi, déjà 65 ans ? Non, non, “les hommes sont toujours des enfants. [...] Des enfants qui se déguisent en grandes personnes.” La chanson phare de l’album, celle qui lui donne son titre, narre une certaine période de sa vie. L’enfance. L’enfance “c’est la vie, l’émerveillement, les fous rires”. Chacun a besoin de se sentir aimé, consolé, “comme un enfant”. Ces sentiments que beaucoup ressentent, Jonasz les chantent.
“lls ont besoin d’être aimés/sans amour on ne vit pas longtemps/lorsqu’ils se sentent perdus paumés/les hommes sont toujours des enfants.”
L’auteur-compositeur-interprète considère ne rien avoir perdu de l’enfant qu’il était. L’enthousiasme, le plaisir de découvrir, l’intensité des émotions, de la vie, l’intensité de l’amour, tout est relié aux “qualités de l’enfance”.
Beaucoup d’amour, “comme des mots d’amour qui survolent/et toi l’amie/ce sont tous nos mots d’amour qui défilent/je te protège, contre les mauvais coups du sort, les sortilèges”, et des tonnes de souvenirs : “Tiens ce soir j’ai d’la visite/Ils viennent sans qu’on les invite/Les souvenirs/On croyait tourner la page/Mais toujours d’anciennes images/Peuvent revenir.”
Mais aussi quelques calembours, “Que celui qui n’a jamais pêché me jette la première canne à pêche” et un soupçon de vague à l’âme “Entre le ciel du haut et le ciel d’ici, s’il existe un double sens, un couloir de correspondance que l’on oublie/si la mort n’est vraiment rien d’autre qu’un raccourci/entre la vieillesse et l’enfance/est-ce que je retrouverais ma douce dans une autre vie/ et le même amour immense ?”
“Qui êtes-vous Monsieur ?”
Son nouvel opus, jazz-pop et blues, s’inscrit dans la lignée de cet art musical que Jonasz a su créer dès les années 1970. Harmonieuses sonorités de piano, parfois chatouillées par des grattements de guitare. Et la voix de Jonasz. Brute. Juste.
Déchirante. Quelques titres dénotent une certaine originalité. “Entre nous le courant ne passe plus/les bougies de secours s’allument”, puis le tempo du 9e titre mi salsa mi caribéen donne l’occasion de remuer le pied en rythme. Jesse Owens, le seul morceau coécrit avec Caroline Liborio, relate l’histoire de ce sprinteur noir américain qui a concouru aux Jeux olympiques, tristement célèbres, de Berlin en 1936.
On entend le souffle du coureur et la voix de Jonasz, qui a délaissé pour l’occasion le vibrato. L’artiste parle, tout simplement, “Afrique/ma lointaine/c’est mon heure de gloire aujourd’hui”, “Negro and dogs are not allowed”.
Son style inimitable : un mélange de jazz, de chansons françaises (Brel, Ferret, Piaf), de musique tzigane et de blues. Genres qu’il a célébrés avec un album hommage à la chanson française, avec sa pièce Abraham, célébrant son grandpère et ses origines ashkénazes. A venir : un opus consacré au blues et au rock’n roll.
Si certaines chansons ont jailli de l’imagination de l’artiste peu avant la sortie de l’album (telles que Les Hommes sont tous des enfants), le chanteur a ressorti quelques compositions de ses cartons. Ébauches de texte ou couplets, Michel Jonasz garde recluses des esquisses de ritournelle gribouillées sur des carnets.
Lorsque décision est prise de composer un album, il replonge dans ces cahiers et sort du néant des chansons qui attendaient patiemment leur heure. Poète, Jonasz accorde au texte une place primordiale. Pour lui, ce sont les paroles qui “déterminent le choix des musiciens, des accords.”
Définir “Les Hommes sont des enfants” ? Mission impossible pour Michel Jonasz. Un album c’est le résultat de “tout ce qui [l’]agite.” L’enjoindre de le décrire revient à lui demander : “qui êtes-vous Monsieur ?” Un disque c’est tout simplement “le reflet de ce que l’on est”. Michel Jonasz, un artiste authentique, doué, surprenant, et émouvant toujours.
Michel Jonasz sera en concert le 25 mars à 20h30 à l’Opéra de Tel-Aviv.Réservations : 03-6023619 / www.israstage.co.il