"The Kaiser is coming !" : Histoire du journalisme

Information de dernière minute, le Kaiser Guillaume II sera bientôt à Jérusalem. Une actualité brûlante en ce mois d’octobre… 1898 ! Aujourd’hui, en 2012, une exposition retrace l’aventure, mêlant Histoire, journalisme et nouveaux médias.

Kaiser 521 (photo credit: Bibliothèque du Congrès, Collection Matson)
Kaiser 521
(photo credit: Bibliothèque du Congrès, Collection Matson)

Du 29 octobre au 4 novembre 1898, l’empereur Guillaume II rend visiteà Jérusalem, afin de consacrer la plus importante Église luthérienne de TerreSainte. Derrière ce prétexte, se cachent d’autres ambitions : affirmer latoute-puissance de l’Allemagne, en renforçant ses relations avec l’EmpireOttoman. Ce voyage constitue le sujet d’une exposition, présentée au musée del’histoire de Jérusalem depuis le 29 octobre.

L’excursion du Kaiser, d’allure anecdotique, n’a pas été choisie auhasard. Advenu à la fin du XIXe siècle, l’événement permet dedresser le portrait d’une Jérusalem à l’aube de grands bouleversements. À cetteépoque, la cité est sous domination ottomane et de maigre importance. GuillaumeII s’y rend en grande pompe accompagné de son épouse, la Kaiserin Augusta Victoria.Leur suite est imposante : chevaux, tentes, membres de la cour etsecrétaires font partie du convoi. Selon Renee Sivan, commissaire del’exposition, "la venue de Guillaume II met la ville en effervescence.Jérusalem, à l’époque insignifiante, se met à faire la une de la presseinternationale. Cette rencontre entre l’Orient et l’Europe a été une semaine defolie. L’idée de l’exposition, c’est de saisir ce virage entre deux époques." En effet, peu de temps après, suivrontle mandatbritannique et ses transformations.

Le voyage connaît une ampleur médiatique mondiale. Il est couvert partous les journaux, du Figaro à La Stampa, en passant par Le New York Times etL’Illustrated London News. Le secrétaire d’Augusta Victoria tient un journal debord, tandis que l’impératrice réalise un photoreportage. En face, la routinehiérosolymitaine est chamboulée. L’avènement de l’ère "paparazzi" estannoncé. Pour réaliser l’exposition, Renee Sivan et Ruth Peled ont eu accès àune profusion d’archives, notamment une collection impressionnante de clichéset photographies. Dans l’ensemble, la presse était plutôt critique à l’égard duKaiser. Guillaume II n’était pas très aimé. La responsabilité de l’Allemagne –alliée à l’Empire Ottoman du sultan Abdul Hamid Khan II – dans le déclenchementde la Première Guerre mondiale accélérera par la suite l’abdication dusouverain.

 

Herzl et Guillaume II : l’un des premiers"photoshops" au monde

 

Quant à la création d’un état d’Israël, quelles sont les intentions dusouverain ? Réponse décevante : le voyage est motivé par des intérêtséconomiques. À l’époque, l’Empire Ottoman est sur le point de s’effondrer. Àl’issue de la Première Guerre, il sera totalement démembré. En 1898, lespuissances européennes regardent vers l’Empire avec convoitise : chacuneespère en récolter de nouveaux territoires. Soutenir l’entreprise de TheodorHerzl est donc le dernier des soucis de Guillaume II. Les deux hommes secroiseront à la va-vite. Anecdote amusante : le cliché immortalisant leurrencontre est l’un des premiers "photoshops" au monde. Sous le coupde l’émotion, le photographe chargé de couvrir l’entrevue rate ses prises. Deretour à la rédaction, un montage est réalisé.

Dans la salle du musée, les murs sont couverts de panneaux, chacunrelié à une "souris", une reproduction d’appareil photo sur trépied,datant du XIXe siècle. L’exposition est en phase avec les nouvellestechnologies, proposant écrans tactiles et journaux numériques à contenuinteractif. "C’est un choix délibéré", confirme Renee Sivan. "Ona essayé de mettre en scène une exposition de "médias" : c’estle "press report", le reportage d’une presse écrite de la fin du XIXe,face à l’ère actuelle des "médias". Il fallait montrer comment lesjournalistes travaillaient à l’époque et comment ils travaillent aujourd’hui.Comprendre ces innovations qui ont bouleversé la profession. Et leur rendrehommage."

Cette e-exposition vise à sensibiliser les jeunes à l’Histoire, viades outils de leur génération. Ces moyens modernes pourront attirer enfants etadolescents, et leur faire découvrir le passé. Tandis que leurs aînésconstateront les progrès permis. Quand le high-tech se met au service del’Histoire : les résultats sont à voir à la Tour de David !

 

"The Kaiser is coming !"

Du 29 octobre 2012 au 31 mars 2013

Tour de David, Porte de Jaffa, dans la Vieille Ville