La Syrie, entre bombes et défection

Le conflit syrien s’étend sur ses pays voisins, faisant 93 morts vendredi 6 juillet.

Syrie (photo credit: Reuters)
Syrie
(photo credit: Reuters)

Samedi, le conflit syrien a débordé sur le Liban. Les forces d’Assad ontlancé des bombes sur le pays du Cèdre où certains de ses rebelles avaientcherché à se réfugier. Résultat : 5 morts dans des villages du nord-Liban.

Le nord du Liban, nouvelle base arrière des combattants d’Assad, subit denombreux bombardements en provenance de la Syrie. Désormais, les forces duleader syrien n’hésitent plus à franchir la frontière pour poursuivre lesrebelles. Selon des habitants de la région de Wadi Khaled, des bombes demortier se sont abattues sur des bâtiments agricoles, sur une distance compriseentre 5 à 20 km dans la nuit. A la mi-journée, vendredi, ils ont entendu desexplosions et tirs à proximité de la frontière.

Dans le village de Al-Mahatta, une famille a déploré la destruction d’unemaison et la mort d’une jeune fille de 16 ans. Deux enfants de 2 et 4 ans ontégalement été blessés. Dans les villages alentour, une femme de 25 ans et unhomme ont trouvé la mort. A Hishe, où la rivière chevauche et délimite lafrontière, deux Bédouins ont été tués, dans leur tente, par des roquettestirées depuis la Syrie. Le Liban a confirmé l’un des décès et les obus syriens. Le président Michel Suleiman a déploré les morts et promis une enquête.

L’effusion de sang syrienne empiète également sur la Turquie, un grand voisin, pluspuissant militairement. Après l’attaque syrienne d’un jet turc, Ankara a renforcé sa frontière etdéployé des avions de combat.

Alep, nouveau centre de violences 

Selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH) basé enGrande-Bretagne, l’armée a bombardé samedi des localités de la région nordd’Alep, dans l’objectif de déstabiliser les insurgés qui avaient repris lecontrôle de certaines zones. “Les bombardements sont les plus lourds depuis le début des opérationsmilitaires dans les zones rurales de la province d’Alep”, précise l’OSDH. Et dedénombrer 3 morts, dont deux rebelles.

Vendredi, toujours, l’agence officielle de presse syrienne (SANA) annonçait quedes troupes avaient déjoué les tentatives d’infiltration de l’armée par desTurcs et libanais armés. Résultat de l’affrontement : une douzaine de blesséset de morts.

Enfin, SANA a aussi rapporté qu’un groupe de terroristes de la province d’Haremen Turquie avait tenté d’infiltrer la province d’Idlib. Un grand nombre d’entreeux ont été tués tandis que le reste a pu s’enfuir vers les territoires turcs. 

Selon l’Observatoire, la situation empire : de nombreuses familles fuient leursfoyers et le manque d’eau, d’électricité et d’équipement médical commence à sefaire sentir.

Alep, seconde plus grande ville de Syrie et carrefour commercial, avait jusqu’iciété préservée des violences. Mais en 16 mois, la périphérie et les grandes provinces ont vu les rebellesprogresser et prendre le contrôle de certaines zones. SANA a même rapporté unaffrontement avec un groupe terroriste qui avait attaqué et tué des civils àAzaz, au nord d’Alep : 8 des assaillants ont été abattus et 6 véhicules équipésde mitrailleuses, ainsi qu’une ambulance, détruits.

L’entêtement de la Chine et de la Russie

Des opposants déclarent qu’au moins 15 000 personnes ont trouvé la mortdepuis le début de la révolte. Assad préfère parler de rebelles-terroristessoutenus par l’étranger, qui auraient tué des milliers de militaires policiers,provoqué des guérillas et bombes d’accotement.

L’Observatoire a estimé le bilan de la seule journée de vendredi 6 juilletà 93 morts, principalement des civils.

La Russie et la Chine ont usé de nombreuse fois de leur veto aux Nations uniespour empêcher toute possibilité de pousser Assad à quitter le pouvoir, ce quipermettrait une transition démocratique.

Lors de la réunion des “Amis du peuple syrien”, réunissant les opposantsoccidentaux et arabes d’Assad, Clinton a appelé à ce que Moscou et Pékin“payent le prix” de leur soutien au régime autoritaire d’Assad.

“Toute parole ou tout acte calomniant la Chine et semant la discorde entre laChine et d’autres pays restera vain”, a prévenu Liu Weimin, porte-parole duministère chinois des Affaires étrangères.

La Russie et la Chine soutiennent le projet de Kofi Annan qui promeut undialogue national. Mais refusent la position des puissances occidentales etpays du Golfe : pour obtenir une réforme en Syrie, Assad doit quitter lepouvoir.

Une défection qui en dit long 

Manaf Tlass, garde républicain et fils de Hafez,ministre de la Défense sous le père d’Assad, n’a toujours pas refait surface àl’étranger, et pour l’heure, son soutien aux rebelles reste à prouver. Mais sadéfection a été confirmée par le gouvernement français lors de la réunion des“Amis du peuple syrien”, à Paris.

Les puissances occidentales et autres gouvernants arabes sunnites opposés àAssad - dont la secte alaouite domine la Syrie depuis des décennies - n’ont pashésité à annoncer qu’ils soutenaient massivement l’opposition syrienne.L’impasse de la diplomatie internationale réduit les puissances occidentales àlancer des paris pour donner l’impression d’un mouvement d’oppositiongrandissant contre Assad. De nombreuses conférences ont ainsi vanté lesdéfections, dans l’objectif de mettre sous pression psychologique l’élitegouvernante d’Assad.