Les temps changent

Lorsque Ramat Eshkol a été fondé, au lendemain de la Guerre des Six Jours, le gouvernement voulait créer une chaîne continue de maisons pour relier la rue Shmouel Hanavi, la colline française et le campus du Mont Scopus

Les prix à Ramat Eshkol oscillent entre 1,4 million de sheke (photo credit: © Avec l’aimable autorisation de Re/Max Vision)
Les prix à Ramat Eshkol oscillent entre 1,4 million de sheke
(photo credit: © Avec l’aimable autorisation de Re/Max Vision)

C’est en 1968 que les travaux de construction dans le nordde Jérusalem ont débuté. Le quartier de Ramat Eshkol, nommé d’après le Premierministre Levi Eshkol, était ainsi le premier à être fondé au-delà desfrontières de 1967.

Jusqu’au conflit de la guerre des Six jours, la ligne de cessez-le-feu de 1949avec la Jordanie était dessinée par la rue Shmouel Hanavi. A la fin des années1950, le gouvernement y construit une chaîne de shikounim (grands immeubles)aux épais murs de béton. Une sorte de forteresse, érigée au-delà de ce quiétait alors un terrain désertique, et par-delà la zone fortifiée de la Collinedes munitions, dédale de bunkers et de tranchées jordaniennes.
Le nom de la Colline des munitions date du gouvernement mandataire britannique,en place de 1917 à 1948. Les Anglais y avaient fondé l’Ecole de Police, et faitconstruire sur la colline proche un bunker pour y abriter leurs explosifs.
Plus tard, le 6 juin 1967, vers 2 heures du matin, près de 20 ans après lacréation de l’Etat, le régiment de réservistes parachutistes 66 prend lecontrôle de la Colline après de sanglants combats et ouvre ainsi la voie versle Mont Scopus et la Vieille Ville. La majorité des officiers et sous officierstombent lors de l’offensive militaire où les violents corps à corps rappellentla guerre des tranchées de la Première Guerre mondiale.
Au contraire de beaucoup d’autres villes, Jérusalem compte nombre de quartiersautonomes. Historiquement, cette réalité répondait à des raisons commercialeset sécuritaires. Mais cet auto-confinement s’est toutefois poursuivi jusqu’ànos jours.
Ramat Eshkol en est l’exemple type. La zone a été conçue avec des rues bordéesd’arbres, des petits parcs, une clinique médicale, un petit centre commercial,une maison de retraite et un supermarché. La majorité de ses immeubles nedépassent pas quatre étages. Quelques grands bâtiments apparaissent toutefoissur le boulevard Eshkol, qui font exception à la règle. Toutes les façades sontrevêtues de pierre, en conformité avec les règles de construction de lamunicipalité qui voulait une uniformité esthétique de la capitale.
Différentes contraintes allaient cependant se dresser lors des chantiers duquartier.
Ramat Eshkol est situé au niveau d’une ancienne frontière militaire, sur deschamps de mines israéliennes et jordaniennes qui devaient d’abord êtreneutralisés.
L’opération de déminage a été effectuée par le corps du génie militaire,supervisé par l’officier de réserve Israël Levitt. Cet architecte dans le civilconcevra ensuite les premiers immeubles d’habitation de la région.
Une lente dynamisation
En 1970, les premiers habitants commencent à affluer.L’infrastructure est pauvre, peu de routes sont en état, et aucun transportpublic ne dessert le lieu, à une époque les voitures sont encore peu répandues.Mais ces difficultés n’entaillent pas les volontés. Ramat Eshkol propose alorsun lieu de vie et le logement qui fait défaut.Le but du gouvernement : créer une chaîne continue de maisons pour relier larue Shmouel Hanavi, la colline française (HaGuiva Hatsarfatit) et le campus del’université hébraïque du Mont Scopus.La ligne d’autobus numéro 9 est ré-inaugurée pour relier le Mont Scopus à laJérusalem juive, puis étendue au nouveau campus de Guivat Ram, construitlorsque l’Université du mont Scopus est coupée de la ville par les Jordaniensen vertu du cessez-le-feu de 1948. Dans ces années-là, les travaux commencentégalement sur le quartier de Guivat Hamivtar, adjacent à celui de Ramat Eshkol.Celui-ci est cependant construit à la manière d’une banlieue résidentielle,avec maisons et terrasses. Il est alors la première zone de la périphérie deJérusalem à disposer d’habitations, style maisons de campagne avec de grandsjardins.Les parcelles de terrain sont départagées, mais les acquéreurs sont déçus. Lesdélais de construction sont longs et le quartier n’est toujours pas faciled’accès.Près de 80 % des logements sont des maisons jumelées, tandis que 20 % sont desmaisons unifamiliales. Les propriétaires construisent des maisons de 250 mètrescarrés sur des parcelles de 500 mètres carrés. Guivat Hamivtar donne auxrésidents un sentiment de vie de banlieue, avec ses rues, ses parcs, sesespaces verts.Aujourd’hui, il s’agit d’une zone riche.“Ces grandes et spacieuses maisons attirent les familles nombreuses. Mais depuisqu’elles sont vendues entre 3 et 5 millions de shekels, les acheteursisraéliens peuvent difficilement les acquérir. Ce sont donc des étrangers,français et anglo-saxon en majorité, qui s’emparent des propriétés”, expliqueMichael Liben, de l’agence immobilière Re/Max Vision.Beaucoup de familles ont divisé leur maison en deux, voire trois unités, afinde permettre aux enfants devenus adultes , et à leurs familles, de vivre sur lapropriété.D’autres propriétaires ont trouvé une source de revenus supplémentaire enlouant les unités les plus petites et en vivant dans la grande section”,commentet- il.Ramat Eshkol dispose d’un parc dédié à Raoul Wallenberg, le diplomate suédoisqui a sauvé de nombreux juifs lors de la Seconde Guerre mondiale. Le plus grandparc du voisinage est celui de Hahamisha Asar (Parc des 15), qui commémore lesquinze soldats tués en une seule journée de combats durant la guerre d’usureavec l’Egypte, en 1969, face au canal de Suez.Le quartier renferme également son lot de trouvailles architecturales. LeTombeau Eshkolot, et sa sculpture en pierresreprésentant une grappe de raisins, a notamment été découvert au début desannées 1970, lors de travaux de construction.Aujourd’hui, Ramat Eshkol est un quartier très animé, peuplé principalement pardes familles religieuses. Si les prix sont relativement élevés par rapport à savoisine HaGuiva Hatsarfatit, les jeunes foyers sont séduits par l’atmosphèrereligieuse et la proximité du quartier Sanhedria.Les prix oscillent en moyenne entre 1,4 million de shekels pour un appartementstandard de trois pièces, et 1,6 million de shekels pour un quatre pièces. Contrairement à d’autres endroits de Jérusalem, à Ramat Eshkol les appartementsde bas étage sont les plus demandés, et désormais les plus chers. Les famillesreligieuses comptent généralement beaucoup d’enfants et les poussettes sontmonnaie courante. Un poids - au sens littéral - à porter dans les cagesd’escaliers, d’autant que toutes les familles religieuses n’utilisent pas lesascenseurs de shabbat.La région a récemment connu une embellie de son parc immobilier, désormais auniveau des autres zones prisées de la capitale. De nombreux résidents aiment lequartier, et vendent leur petit appartement pour tenter d’acquérir un logementplus grand. Ramat Eshkol attire en particulier les jeunes couples dont lesépoux étudient à la yeshiva, en quête de locations.Beaucoup décideront finalement de rester et, plus tard, d’acheter une propriétédans le quartier.