Quand l’eau ne coule pas de source

Malgré des ressources en eau limitées, Israël a, depuis des décennies, développé une technologie de l’eau reconnue et enviée par le monde entier.

P13 JFR 150 (photo credit: Aline Juillard)
P13 JFR 150
(photo credit: Aline Juillard)

L’or bleu, comme on l’appelle aujourd’hui, estdevenu un enjeu international de plus en plus sérieux, notamment au vu dutarissement grandissant des principales sources hydrauliques, essentielles pourla survie des hommes. Dans la région du Moyen-Orient, personne n’est sanssavoir que cette ressource attise, par ailleurs, nombre de convoitises etconstitue un élément de discorde bien réel entre les pays.
En Israël, les principales réserves aquifères sont le Jourdain et le lac deTibériade. Les ressources en eau se trouvent essentiellement dans le nord dupays : en Galilée et dans le Golan à 80 %. Mais cette région nord est loind’être la plus nécessiteuse. Les deux tiers des besoins industriels et urbainsen eau se trouvent au centre du pays, sans oublier le sud, grand consommateurpour son agriculture. Dans sa gestion de l’eau, Israël doit prendre en comptecette mauvaise répartition des ressources, mais également des facteursextérieurs liés à la société israélienne elle-même.
Un Etat en mutation

La consommation annuelle des Israéliens s’élève à 2milliards de m3 d’eau. Un chiffre en perpétuelle augmentation, dû à unaccroissement de la demande et de la consommation. Car aujourd’hui Israël estun pays en pleine mutation. En l’espace de 20 ans, la population aconsidérablement augmenté. De plus en plus moderne, la société israélienne voitses besoins évoluer. Cette modernité peut avoir des effets néfastes.

Avec un phénomène d’urbanisation de plus en plus prégnant, les sols sonttouchés. L’Etat hébreu est en effet soumis à une intense évaporation desressources hydrauliques, due notamment au phénomène d’érosion des sols qui sontde plus en plus imperméabilisés par l’urbanisation.
Problème : cette nouvelle tendance de société est en totale inadéquation avecle volume réel des ressources hydrauliques nationales. Plus grave encore,Israël est en déficit hydrique, c’est-à-dire que le pays consomme plus que cequ’il détient en réalité. Seulement 1,4 milliard de m3 d’eau est disponible,alors que les Israéliens en consomment presque le double chaque année.
A noter également que l’agriculture en Israël, malgré son faible poids dansl’économie – seulement 2 % de la population active israélienne travaille dansce secteur, qui représente moins de 3 % du PIB israélien – est une grandeconsommatrice. Sur la consommation totale d’eau en Israël, près d’un tiers estspécifiquement dédié à l’élevage et la culture. Chiffre assez conséquent, bienqu’en légère baisse ces dernières années. En somme, la question de l’eau en Israël reste épineuse.
Comment Israël se débrouille aujourd’hui pour rendre vert son désert etsubvenir aux besoins de ses citoyens, malgré ces chiffres alarmants ?Simplement par l’utilisation de techniques intelligentes et ingénieuses, quilui permettent de se classer parmi les meilleurs dans les technologies liées àl’eau et à sa gestion.
A la pointe de la technologie hydraulique 

L’Etat hébreu est un des premierspays du monde à avoir mis en place de multiples technologies visant à laréutilisation de l’eau. Ces techniques ont un double objectif : économiser lesressources et protéger l’environnement en diminuant le volume des rejets d’eaupollués. Lors de l’édition 2009 de la conférence internationale de l’eau àIstanbul, l’Etat d’Israël a été reconnu comme le pays ayant la meilleuremaîtrise des technologies de recyclage et de traitement des eaux usées.

En Israël, plusieurs grandes firmes sont chargées du recyclage de l’eau, ainsique de son dessalement, ou encore – et plus simplement – de la distribution del’eau partout en Terre promise.
En matière de recyclage des eaux usées, Israël est un des leaders mondiaux. L’Etatrecycle chaque année plus de 70 % de ses eaux usagées, contre 1 % auxEtats-Unis par exemple. Le centre Shafdan est justement spécialisé dans cedomaine. Il est considéré comme l’un des plus grands centres spécialisé dans leretraitement de l’eau, mais aussi le plus avancé et le plus ingénieux duMoyen-Orient. Chaque année, au fil de quatre étapes correspondant à quatretraitements successifs dans d’immenses bassins, il traite 130 millions de m3d’eau, soit les besoins en eau de 2 millions de citoyens israéliens. Ces eauxrendues réutilisables, sont pour la plupart envoyées par pipeline vers larégion du Néguev pour les besoins agricoles.
Une faiblesse transformée en force 

Mais la vision d’Israël, en matièrehydraulique, n’est pas fataliste, loin de là. Mekorot, la compagnie israéliennede l’eau, via des techniques de réutilisation et de dessalage des eaux, affichecomme principal objectif le renforcement et la multiplication des sourceshydrauliques en Israël. La compagnie nationale israélienne est leader mondialen matière de désalinisation, que ce soit dans la conception, le développementou encore l’exploitation. Ce sont près de 300 millions de m3 d’eau qui sontdessalés chaque année par Mekorot.

Le dessalement des eaux ainsi que leur réutilisation ne répond pas simplement àun besoin domestique. Il va bien au-delà. Ainsi, pour produire 1 mégawattd’électricité, 30 000 litres d’eau sont nécessaires. Ou encore, dansl’industrie agroalimentaire, l’eau est utilisée en grande quantité. Elle peut,tour à tour, jouer le rôle d’ingrédient ou d’agent nettoyant. Et s’avèreégalement utile pour le transport ainsi que pour le conditionnement desmatières premières.
Plus concrètement, lors du processus de pasteurisation du lait par exemple,l’eau est utilisée à forte température afin d’éradiquer les bactéries présentesdans le produit laitier via diverses techniques très pointues.
Malgré des statistiques peu encourageantes concernant la disponibilité de l’eauau Moyen-Orient, et notamment en Israël, l’Etat hébreu a su transformer lafaiblesse que représentait son manque d’eau en une force technique etéconomique. Grâce à sa matière grise, le pays a réussi à élaborer destechniques de traitement de l’eau reconnues par le monde entier, et a crééainsi indéniablement un impact bénéfique sur l’économie et sur l’environnement.