2014 : une année de croissance pour l’économie israélienne

Rencontre avec le président de la banque Hapoalim, Yaïr Seroussi, autour de la politique monétaire, de la déréglementation et des nouvelles technologies pour un aperçu global de l’année à venir.

P13 JFR 370 (photo credit: Banque Hapoalim)
P13 JFR 370
(photo credit: Banque Hapoalim)

L’économie mondiale semble avoir pris unnouveau virage en 2013, en préambule de la reprise attendue en 2014. En Israël,le premier pays à avoir relevé ses taux d’intérêt au sortir de la crise,l’année a vu ceux-ci revenir à 1 % alors que le pays s’efforce de maintenirsa croissance modérée. L’exploitation du gaz au large des côtes et la forcerelative de l’économie ont stimulé le shekel, tandis qu’une foule de nouveauxleaders économiques comme le ministre des Finances Yaïr Lapid et la gouverneusede la Banque d’Israël Karnit Flug ont pris leurs nouvelles fonctions. Leprésident de la banque Hapoalim, Yaïr Seroussi, fait partie de ces acteurs depremier plan. Entretien.

Comment résumeriez-vous 2013 sur le planéconomique ?

Si l’on observe la macroéconomie israélienne,la croissance est encore d’environ 3-3,5 %. C’est bien par rapport àd’autres pays, mais ce n’est pas assez. Nous devrions viser une croissance plusrapide, plus proche de 4-5 %.

Le secteur des technologies de l’informationcontinuera à maintenir son avance : ce moteur de croissance persiste àprendre de la vitesse. Le gaz récemment découvert va probablement rendrel’industrie israélienne plus propre et plus compétitive. Il s’agit d’unchangement majeur avec des implications économiques considérables et positives.

Plus globalement, je pense que l’économieisraélienne est surréglementée. Et nous en payons le prix ! Si nous sommesrestés en deçà de notre potentiel de croissance, je crains que cela ne soit dûà un régime de réglementation déséquilibré. Le secret de la croissance estavant tout de savoir actionner les bons leviers politiques en proportionadéquate.

La Banque d’Israël a une nouvelle gouverneuse,Karnit Flug. Quels sont les défis auxquels elle va devoir faire face dansl’année à venir ?

La gouverneuse est confrontée à un dilemmedifficile : stimuler la croissance en maintenant le taux d’intérêt déjàfaible ou opter pour le ralentissement, afin de prévenir l’inflation. Unesituation familière aux Américains, où la nouvelle présidente de la Réservefédérale, Janet Yellen, est face à un dilemme similaire.

Le taux d’intérêt des Etats-Unis, qui esttoujours proche de zéro, détermine les taux d’intérêt dans le monde entier. Lesdevises qui ont des taux d’intérêt plus élevés et font preuve de stabilité, commecelle d’Israël, deviennent trop fortes et cela crée des difficultésd’exportation aux entreprises. C’est un autre facteur qui a toujours reçu unegrande considération de la part de la Banque d’Israël. Il est donc fortprobable que nous assistions à la faiblesse généralisée des taux d’intérêtpendant un certain temps.

Ce phénomène, cependant, est à l’origine de lahausse des prix des actifs. En Israël, les prix de l’immobilier sont en hausse,ce qui génère des problèmes sociaux, un fardeau supplémentaire pour les jeuneset les secteurs les moins favorisés de notre société. Malgré la pénurie del’offre de logements, le faible taux d’intérêt pousse les investisseurs sur lemarché. C’est l’un des défis majeurs pour la nouvelle gouverneuse.

Quel effet a eu le faible taux d’intérêt surla banque ?

Le faible taux d’intérêt entraîne une baissedes bénéfices de la banque. Nos marges sur les dépôts en sont particulièrementaffectées.

La réglementation de l’après-crise metl’accent sur le coussin de capital et le désendettement. Les banquesisraéliennes sont parmi les moins endettées au monde. Nous maintenons etaccumulons également des niveaux élevés de capital.

Conséquence : il nous faut travaillerplus dur pour rester compétitifs, et nous connaissons une baisse de rendementdes capitaux propres. Au lieu de 12,5 % de rendement sur le capital, nousobtenons avec difficulté un taux de rentabilité financière (ROE) à un chiffre,et il nous faut aujourd’hui faire beaucoup d’efforts pour maintenir ce taux.

Comment la banque utilise-t-elle latechnologie pour faire face aux nouvelles demandes des clients ?

Les clients de nos jours sont plus avertis etplus exigeants. Nous, les banques, devons nous réinventer sans cesse pourrester à la pointe. Nous sommes à l’orée d’une révolution dans le secteurbancaire ici, menée par les clients et les avancées technologiques.

Nous devons construire de nouvellestechnologies. La banque Hapoalim emploie 1 300 personnes dans le seuldomaine de l’informatique et du développement de nouveaux produits. Latechnologie bancaire va continuera à évoluer rapidement dans les années à veniret je crois fermement qu’il s’agit d’un atout à exploiter. C’est pourquoi nousaugmentons nos budgets informatiques et de R & D en conséquence.

L’innovation principale de la banque Hapoalimest venue des nouvelles applications pour Smartphone. Dès le début, il nous estapparu évident qu’il fallait permettre aux utilisateurs de réaliser presquetoutes les opérations via leurs téléphones portables.

Nous avons joué sur notre audace israélienneet ouvert un programme qui offre aux start-up financières locales lapossibilité d’utiliser notre système. Nous possédons une équipe de stratèges etde banquiers spécialisés prêts à investir dans ces sociétés si nous estimons latechnologie prometteuse.

Jusqu’à présent, nous avons adopté 8 de cesinnovations mises au point par des start-up. Certaines sont des nouveauxsystèmes de paiement. D’autres ont pour but d’améliorer l’efficacité duprocessus bancaire. Nous augmentons l’utilisation et l’adoption de connaissanceextérieure qui provient d’innovations présentes dans le pays.

Dans quels autres domaines la banqueconcentre-t-elle son expansion ?

Dans le secteur arabe, nous avons ouvertplusieurs branches en Galilée. Nous nous intéressons également auxultraorthodoxes et accordons une attention particulière aux jeunes.

Nous avons mis beaucoup d’efforts au servicedes petites entreprises, qui ne figurent pas en tête de la liste des prioritésen Israël. Bien que la banque Hapoalim soit la première en termes de prêts auxpetites entreprises, nous pensons qu’il reste encore beaucoup à faire.

Le 3 janvier, nous avons organisé la Journéedes petites entreprises, avec des événements dans tout le pays offrant conseilset information sur le sujet. Cela nous paraît très important pour la croissancecontinue du pays.

Vous avez dit plus tôt que la réglementationdevait être allégée. Pouvez-vous être plus précis ?

Une réglementation intelligente, comme définiepar la Banque mondiale, doit être adaptée aux systèmes qu’elle réglemente, etassurer un équilibre entre les besoins des consommateurs, la sécurité dusystème et le mandat de la société d’offrir un rendement satisfaisant auxinvestisseurs. Notre réglementation devrait être basée sur ce principe, etproposer des lignes directrices plutôt que des interventions intrusives dansles affaires.

Le problème de la réglementation israélienneest qu’elle mélange les systèmes réglementaires internationaux et essaiesouvent d’être plus conservatrice que les autres. Cette rigidité empêche notreéconomie de se développer pour réaliser son plein potentiel.

Pour donner un exemple, je ne pense pas queles banques israéliennes devraient être les plus faiblement endettées du monde.C’est simplement la conséquence de la rigidité avec laquelle la Banque d’Israëlmesure nos actifs à risque.

Cela pourrait aboutir à des restrictions enmatière de crédit, un paradoxe pour nous qui avons continué à accorder desprêts tout au long de la crise, contrairement à d’autres banques dans les paysdéveloppés.

A mon avis,l’essentiel en matière de réglementation est de pouvoir gérer le risque, et nonpas de chercher à tout prix à l’éviter complètement.

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