Citoyens français de l’étranger, à vous de voter !

Dans trois mois, plus de deux millions de Français, qui ont choisi de vivre hors des frontières nationales, se rendront dans les bureaux de vote pour élire leurs députés. Une première

votez (photo credit: © DR)
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Sous l’Ancien Régime, les Français qui souhaitaient s’installer à l’étranger étaient destitués de leur “qualité d’être français”. C’est-àdire qu’ils perdaient leur capacité à hériter. Comme les étrangers résidant en France, ils étaient soumis au droit d’aubaine : à leur mort, toutes leurs possessions revenaient au roi.
A cette époque, le concept de nationalité, encore flou, était régi par le “jus solis” (droit du sol). Quitter le territoire revenait à refuser de faire allégeance au roi.
C’est sous le règne de Napoléon que le droit de la nationalité évolue vers une conception patrimoniale, à l’occasion de la rédaction du Code civil. Et que le “jus sanguini” (droit du sang) fait son apparition. La nationalité peut désormais être transmis à ses enfants depuis l’étranger.
Du droit de vote des Français établis hors de France à l’élection de députés au suffrage direct, il aura fallu plus de quarante-cinq ans. Des associations avaient pourtant vu le jour voilà une vingtaine d’années pour défendre les droits de ces exilés. Elles permettent d’entretenir les liens avec la France mais ne disposent d’aucun pouvoir législatif. Les grands thèmes de l’expatriation, au coeur de leurs préoccupations : la protection sociale, l’emploi, la fiscalité et l’enseignement.
Si les Français résidant à l’étranger pouvaient voter lors des élections présidentielles et aux référendums, aucun représentant ne leur était accordé au Parlement.
Depuis juin 2011, ils possèdent leur secrétaire d’État, David Douillet dans un premier temps, suivi d’Edouard Courtial. “Les Français de l’étranger sont une véritable force et une richesse pour notre pays”, a déclaré ce dernier lors de son discours de présentation. Pour Boris Faure, vice-président de Français du monde- ADFE (Association des Français de l’étranger), le taux de participation aux législatives témoignera du “vouloir vivre ensemble” des Français hors frontières, selon la définition de la nation d’Ernest Renan. Définition considérée comme l’essence de la nationalité française. Le désir de “vivre ensemble” de Renan s’articule autour de “gloires communes dans le passé, [d’] une volonté commune dans le présent ; [...] de grandes choses [faites] ensemble, [du désir d’] en faire encore”.
“On ne sait pas quoi faire d’Israël”
Selon le “registre mondial des Français établis à l’étranger”, le nombre de ressortissants s’élevait à 1 504 001 personnes au 31 décembre 2010. Un chiffre qui augmente de 3 à 4 % par an en moyenne, depuis la dernière décennie. Les hommes politiques s’intéressent par conséquent de plus en plus à ces Français un peu particuliers.
L’idée de les voir représenter à l’Assemblée a émergé dans les années 1980. Nicolas Sarkozy en avait fait l’une de ses propositions de campagne. Qu’il a réalisée.
Une loi a ainsi entériné le projet et le gouvernement s’est attelé au découpage électoral à l’étranger et au redécoupage de la métropole. La division du territoire français, jugée impartiale, a été vivement dénoncée par l’opposition. Créer les circonscriptions des Français de l’étranger ne s’est pas avéré une mince affaire. Notamment en ce qui concerne Israël.
En mars 2009, explique Daphna Poznanski,vice-présidente de l’Assemblée des Français d’Israël et candidate pour la députation de la 8e circonscription des Français de l’étranger, le gouvernement de Nicolas Sarkozy présente un projet de répartition où Israël est regroupé avec des pays tels que le Soudan, la Somalie, l’Iran, l’Egypte ou la Syrie. “J’espère que c’est une plaisanterie”, aurait-elle rétorqué. Réponse du conseil : “On ne sait pas quoi faire d’Israël”. La candidate socialiste propose alors de placer l’Etat hébreu au sein d’un groupe euroméditérranéen, en compagnie de pays avec lesquels il entretient des relations diplomatiques. La 8e circonscription des Français de l’étranger était née.
Les douze sénateurs au service des expatriés resteront en poste. Répartis non pas par territoires mais par groupes de travail, ils ont pour mission de rendre compte des conditions de leurs compatriotes aux quatre coins du globe.
Au 31 décembre 2011, 58 840 Français étaient enregistrés dans les consulats de France en Israël.
Les 3 et 17 juin prochains, les Français de France et d’ailleurs se rendront aux urnes pour élire leur député. Le Jerusalem Post a cherché à mieux connaître les candidats de la 8e circonscription des Français de l’étranger, désireux de représenter à l’Assemblée nationale les intérêts des ressortissants établis en Israël, mais aussi à Chypre, en Grèce, en Italie, à Malte, à Saint-Marin, au Saint-Siège et en Turquie.
A l’heure où nous mettons sous presse, six candidats sont officiellement déclarés : Valérie Hoffenberg (UMP), Pierre Jestin (Verts), Philippe Karsenty (indépendant divers droite), Daphna Poznansky (PS), Gilles Taïeb (Indépendant) et Michel Thooris (FN). Le parti du Nouveau Centre devrait lui aussi désigner un représentant en la personne de Philippe Soussi. Quant à Edward Amiach, il a par contre annoncé son retrait de la course. Une décision qu’il explique par sa volonté de ne pas favoriser une dispersion des voix de droite, qui, selon lui, pourrait se révéler profitable à la socialiste Daphna Poznansky, “dont le parti a la position la plus hostile à l’égard d’Israël”. Cette semaine, rencontre avec Pierre Jestin, Daphna Poznanski et Gilles Taiëb. Suite des présentations des candidats la semaine prochaine. Tous les entretiens ont été réalisés avant parution de cette édition.