Ciblés parce que juifs

Après la terrible agression de Créteil, le gouvernement déclare l’antisémitisme « cause nationale »

Bernard Cazeneuve le 7 décembre à Créteil (photo credit: DR)
Bernard Cazeneuve le 7 décembre à Créteil
(photo credit: DR)
Une semaine après le violent cambriolage d’un couple à Créteil, visé en raison de ses origines juives, la communauté est encore sous le choc. Lors d’un rassemblement de plusieurs centaines de personnes dimanche 7 décembre dans le quartier, le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve a appelé à « faire de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme une cause nationale ». « Derrière ce crime, il n’y a pas seulement un acte lâche, crapuleux et antisémite ; derrière ce crime, il y a un mal qui ronge la République et que nous devons combattre ensemble à tout prix », a martelé Cazeneuve.
Après l’attaque, le Premier ministre Manuel Valls a déclaré sur son compte Twitter : « L’horreur de Créteil est la démonstration immonde que la lutte contre l’antisémitisme est un combat de tous les jours ». Le président de la République a, quant à lui, condamné la « violence insupportable » de l’agression. « Dans la lutte contre le racisme, contre l’antisémitisme, contre les discriminations il ne faut rien laisser passer » a-t-il ajouté.
Lundi 1er décembre, 12 h 30. Trois hommes, dont deux armés, pénètrent dans un appartement du quartier du Port à Créteil. La cible n’est pas choisie au hasard : ils observent la famille depuis des mois et pensent que le fils est gérant d’une grande enseigne d’habillement (il n’est, en réalité, que l’un des vendeurs du magasin). Et, surtout, ils sont juifs. Les trois agresseurs s’attendaient à trouver les « vieux juifs », les parents, mais seuls leur fils de 21 ans et sa petite amie de 19 ans étaient dans l’appartement. « Les juifs, ça a de l’argent et ça le met pas à la banque », disent-ils. Ils menacent le couple avec leurs armes, volent leurs cartes bleues. Pendant que l’un des agresseurs va retirer de l’argent, les deux autres restés sur place séparent les victimes. Le jeune homme est ligoté et tenu en joue, la jeune femme est entraînée dans une chambre et violée. Les trois agresseurs quittent ensuite les lieux, emportent l’argent extorqué, du matériel informatique et des bijoux.
Deux d’entre eux sont interpellés le soir même, reconnus par les victimes et mis en examen. Le troisième agresseur n’a pas encore été appréhendé. Un autre jeune, âgé de 18 ans, est soupçonné d’avoir aidé au repérage des lieux. Il est également accusé d’avoir, avec les deux autres prévenus, « roué de coups » un septuagénaire juif du même quartier début novembre.
Les réactions ont été vives au sein de la communauté. Le CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) réclame des mesures concrètes pour lutter contre la montée de l’antisémitisme en France. Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, les actes antisémites ont augmenté de 100 % au cours des dix premiers mois de l’année et plus de 930 affaires ont fait l’objet de poursuites au premier semestre 2014. Aujourd’hui 40 % des actes racistes répertoriés sont antisémites. La France, qui abrite la plus grande communauté juive d’Europe, voit de plus en plus de ses ressortissants juifs faire leur aliya poussés, entre autres, par le climat délétère actuel.
« Dire “Plus jamais ça” ne suffit pas, il faut développer des programmes dans les écoles avec des objectifs précis », a confié Bernard Kanovitch, membre du directoire du CRIF, à France 24. « Tant que la société ne mettra pas en œuvre tous les moyens qu’elle a, qu’elle ne rassemblera pas toutes ses forces associatives et publiques dans des projets, on ne pourra pas prévoir une baisse de l’antisémitisme. »
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