Du pouvoir de l’encartage

Pourquoi militer dans un parti ? Pour lutter contre les lacunes du système électoral.

1912JFR10 521 (photo credit:  Jerusalem Post)
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(photo credit: Jerusalem Post)

Peu avant les élections américaines,je lisais un article du fameux chanteur israélien Shlomo Artzi, qui déploraitqu’Israël n’avait pas son Barack Obama. Espoir, changement, dynamisme : Artzi,et beaucoup d’autres Israéliens selon moi, veulent voir ces ingrédients chez unleader. Mais peine perdue.
Le système politique israélien n’est pas conçu pour. Dans notre systèmepolitique, le véritable enjeu pour tout candidat à la Knesset se joue au momentdes primaires. Si son parti obtient 27 mandats et qu’il est 28e sur la liste,il est hors-jeu.
Mais malgré l’importance évidente des primaires, très peu de citoyens ont leurcarte de parti.
Si l’on prend les grands partis démocratiques du pays (qui ont organisé desprimaires) – le Likoud, Kadima, le Parti travailliste et Habayit Hayehoudi –ils totalisent seulement 347 000 membres (environ 4,4 % de la population), pourenviron 150 500 votants lors des élections internes (environ 1,9 %).
Une variété de facteurs expliquent ces chiffres dérisoires : le citoyen lambdane saisit pas pleinement l’importance des élections primaires ; il ne prendtout simplement pas le temps de s’inscrire ; le processus d’inscription et demise à jour peut être fastidieux. Sans parler du fait que tout cela n’est pasgratuit (40 à 64 shekels en fonction du parti) et nécessite une périoded’attente.
Pour le Likoud par exemple : 16 mois.
Peu importe la raison, ce taux de participation honteusement bas dénature ledéroulement et les résultats des primaires, car quelques centaines de membrespeuvent influer sur l’avenir politique d’un membre de la Knesset.
Beaucoup profitent de ce faible nombre en inscrivant à leur parti amis etfamille, collègues de bureau, voire employés. De braves citoyens qui neconnaissent souvent rien à la politique interne de la faction et ignorent pourqui voter, n’ayant fait qu’écouter les belles paroles de celui qui les aencartés.
Certains, parfois, s’inscrivent pour soutenir un groupe d’intérêt auquel ilsappartiennent, comme un lobby ou un syndicat. L’exemple le plus extrême estcelui d’entrepreneurs qui inscrivent au parti de leur choix des milliersd’employés dès l’embauche.
Ils promettent à ces nouvelles recrues moult faveurs, emplois et autresprivilèges prodigués par les membres de la Knesset et les ministres pourlesquels ils ont oeuvré.
95,6 % des Israéliens, sans voix 

Pour survivre et s’octroyer le plus desoutiens possibles, les députés sont donc contraints de faire desronds-de-jambe. Objectif double : inscrire un maximum de votants, mais aussi sefaire bien voir par les autres députés ou candidats.
Difficile d’imaginer Barack Obama, ou du moins l’Obama tel qu’on se l’imagine,se livrer à de telles pratiques. Car en Israël, c’est bien ce qu’il aurait dûfaire pour s’assurer la victoire. Et quand bien même, ce n’est pas pour autantle succès garanti.
Bien sûr, en Israël, nous n’avons pas nécessairement besoin d’un Barack Obama.Ce dont nous avons besoin, c’est d’un système politique qui permetted’introduire de nouveaux talents, des hommes et des femmes qui ne soient pasnécessairement d’anciens généraux, des fils de politiciens célèbres, ou despersonnalités médiatiques. La Knesset ne doit pas être La Croisette descélébrités.
Plus encore, il nous faut un système qui place le pouvoir électoral dans lesmains du public, et non dans celles d’un comité central ou d’un secrétariat departi.
Ne vous attendez pas à une réforme radicale pour tout de suite. Le systèmeactuel place le pouvoir dans les mains des partis. Et il semble peu probableque ces mêmes partis votent en faveur de réformes qui limiteront leur pouvoir.
Les Israéliens non plus ne semblent pas comprendre que 95,6 % d’entre eux n’ontpas de voix dans la moitié du processus démocratique. Jusqu’à ce qu’ils ensoient conscients et demandent une réforme, la seule solution est d’accroîtrela participation du public en encourageant les citoyens à voter lors desprimaires.
Un système infirme 

Une chose est certaine : si vous n’êtes pas membre d’unparti qui organise des primaires, vous avez très peu d’incidence sur ceux quivous représentent. Pouvoir voter pour un représentant est un droit dont tout lemonde devrait bénéficier.
A mon arrivée en Israël, je n’imaginais pas que je concourrai un jour pour uneplace sur la liste parlementaire du Likoud peu de temps après. Je voulais êtreimpliqué dans le processus politique, soutenir le parti et voir comment leschoses tourneraient.
Mais plus j’en apprenais, plus je comprenais à quel point le système étaitinfirme. En tant que membre du Comité central du Likoud, j’ai pu constater lamanière dont les votes étaient indéfiniment retardés par peur du résultat,comment des propositions à-prendre-ou-àlaisser - propositions qui auront unimpact direct sur la composition de la Knesset - étaient soumises au Comitéjuste avant le vote.
J’ai vu comment le Comité central était élu, comment les électeurs soumettaientdes bulletins de vote pré-imprimés avec les noms de candidats dont ilsn’avaient jamais entendu parler.
Ce n’est pas là un acte d’accusation contre le Likoud – au moins il tient desprimaires. Mais il est difficile d’imaginer que n’importe quel processus soitjuste quand la participation du public est si faible.
Mon espoir est de servir de porteparole à ceux qui en ont tout simplement assezdu manque de responsabilité et du manque de fidélité qui résultent de notresystème politique.
Et j’espère qu’avec le temps, non seulement j’aurai l’honneur de servir leparlement israélien, mais également que mes efforts contribueront à rendrenotre culture politique un peu plus respectueuse et qu’elle devienne une sourced’inspiration pour les autres démocraties.

 L’auteur est arrivé à la 49e placesur la liste du Likoud à l’issue des primaires.