Au village, sans pretention

Alors que les touristes se bousculent, Jerusalem Village offre aux jeunes qui visitent la capitale un accès convivial à la vie juive.

P23 JFR 370 (photo credit: Ronny Touvia)
P23 JFR 370
(photo credit: Ronny Touvia)

En général, sur le plan touristique, on associe plutôt la ville deJérusalem à de grands idéaux comme l’éternité et la spiritualité. Pas vraimentà la cuisine maison ou à une rencontre entre amis autour d’une tasse de café.Du moins, jusqu’à ce que Lisa Barkan et son mari, Jeremy, s’en mêlent.

Ils étaient tous deux assis à la terrasse d’un café, rue Emek Refaïm, unvendredi après-midi, il y a environ deux ans, quand Lisa s’est soudain demandéece que tous les jeunes qui traînent là-bas, visiblement pas des gens du cru,font le Shabbat.
Et c’est encore un vendredi matin à la terrasse d’un café, à Baka, cettefois-ci, où elle réside, que Lisa raconte la genèse d’un concept très simple,devenu rapidement très populaire auprès des jeunes visiteurs et nouveauximmigrants de la capitale. Jerusalem Village est le résultat de l’enquêtequ’elle a menée pour découvrir ce que font les jeunes visiteurs ou les nouveauximmigrants célibataires dans la ville sainte, quand arrive le Shabbat.
« Jérusalem a une atmosphère très différente des autres villes. La vie socialetourne plus autour des réunions de famille, et même les visiteurs nonpratiquants recherchent une ambiance plus traditionnelle le Shabbat,explique-t-elle.
Aussi avons-nous commencé, mon mari et moi, à explorer la question. Nous sommesvite arrivés à la conclusion qu’il nous fallait trouver un lieu agréable etaccueillant pour inviter ces jeunes adultes et leur offrir l’opportunité derencontrer leurs pairs autour d’un repas de Shabbat. Simple comme bonjour, maisil fait y penser ! » Jeremy est décédé voilà un an. Mais Lisa, malgré sonchagrin, s’est attelée, avec encore plus de détermination, à ce qui estaujourd’hui plus une mission qu’un projet. « C’est comme si j’exauçais ladernière volonté de mon mari », confie-t-elle.
Une communauté ouverte 

Jerusalem Village, qui a démarré comme une petiteinitiative locale, a pris récemment une autre dimension. Suite aux effortsconjugués de toute son équipe, c’est aujourd’hui un grand projet qui a reçu lesoutien de l’Agence juive et des fédérations juives à l’étranger. Un planquinquennal a même été établi.

Quel est le projet de Jerusalem Village ? La réponse est plus complexe qu’iln’y paraît de prime abord.
En gros, il s’agit d’accueillir les jeunes adultes en visite ici, afin de leurpermettre de rencontrer d’autres jeunes de partout dans le monde, dans uneatmosphère agréable, détendue et chaleureuse. Par ce biais, un accès convivialà la vie juive leur est offert – par exemple autour des repas de Shabbat. Ilspeuvent ainsi faire la connaissance d’autres jeunes Israéliens. Barkan veutaussi donner aux visiteurs un aperçu de ce qu’est une communauté juive, entoute ouverture d’esprit.
L’idée de base du projet est qu’un jeune juif, en visite à Jérusalem, ne doitpas ressentir la même chose ici que dans n’importe quelle autre ville du monde.Passer quelques jours ou quelques semaines à Jérusalem doit être quelque chosede spécial – et cela exige une attention particulière.
Une fois le principe de base établi, innovations et initiatives peuvent semettre en place. Jerusalem Village, avec la collaboration et le soutien dediverses organisations locales et internationales, offre maintenant beaucoupplus qu’un bon repas du Shabbat aux jeunes touristes juifs. Barkan, avec sonéquipe restreinte mais dévouée, a réussi à élargir son champ d’action.
Aujourd’hui, Jerusalem Village propose un large éventail d’activités telles quedes visites de la ville, des rencontres avec les jeunes du pays, des ateliers,des stages d’hébreu de courte durée, des animations autour de la cuisine, dujardinage et de la photo.
Mais les repas de Shabbat restent le point central.
De toute évidence, pour Lisa Barkan, l’idée est de favoriser les rencontres.
« Nous n’essayons pas d’encourager les mariages, déclare-t-elle. Tel n’est pasnotre but, même si nous n’avons rien contre. Ce que nous voulons, c’est donneraux jeunes un aperçu de ce que peut être une communauté juive. » 

Le pluralismeavant tout 

Barkan ajoute que, bien souvent, les visiteurs sont habitués à unecertaine forme de communauté juive chez eux. « Ils ont la synagogue, la familleou les amis, mais la plupart du temps ils ne sortent pas de ce cercle. Ilsignorent tout des autres. Ici, autour du repas de Shabbat, ils font laconnaissance d’autres jeunes religieux et non religieux comme eux. Je crois quecela leur apporte énormément. C’est en tout cas le retour que nous recevons,car nous leur ouvrons de nouvelles portes. Le message que nous voulons fairepasser est celui du pluralisme. A eux de s’en saisir et de se l’approprier. »L’initiative de Barkan s’inscrit dans un cadre plus large.

Jerusalem Village opère sous le patronage du service de la Jeunesse deJérusalem. Les dîners de Shabbat se déroulent au centre communautaire GinotHa’ir, rue Emek Refaïm. Il a le soutien de la Fédération juive et de NewSpirit, ainsi que de plusieurs cafés, en particulier ceux fréquentés par lesjeunes.
Ce partenariat avec les cafés n’est pas fortuit. Un des programmes les pluspopulaires offert par Jerusalem village s’intitule Be Sweet (Soyez gentils),qui propose aux jeunes résidents de Jérusalem d’aller prendre un café ou unchocolat chaud avec un nouvel immigrant ou d’inviter de jeunes visiteurs à lamaison pour un repas, etc.
« Le but est de les intégrer au sein de la jeune communauté de la ville,explique Barkan. Tel est l’objectif de toutes nos activités. Qu’il s’agisse desvisites de la ville hors des sentiers battus, des différentes activités du clubd’hiver (jardinage, cuisine, participation au marathon ou ateliers de photo) :au final, tout cela permet d’apprendre à mieux se connaître. » En ce moment,Lisa Barkan prépare un programme pour les cinq années à venir.
« Nous cherchons à identifier les enjeux et tendances majeures sur lesquelsaxer notre travail », explique-t-elle.
« Là encore, nous avons besoin de l’apport des participants aux programmes deJerusalem Village. Nous leur demandons de nous communiquer leurs idées etsuggestions. Pour cela, nous organisons des groupes de discussion sur nosprochains programmes, à l’attention des jeunes entre 20 et 35 ans.

C’est de cettefaçon que nous prévoyons de renforcer et de continuer cette initiative. »