L’islamiste Morsi est déclaré président d’Egypte

Le candidat des Frères musulmans a gagné l’élection à 51,7 % des voix

Morsi (photo credit: (© Reuters))
Morsi
(photo credit: (© Reuters))

Euphorie sur laplace Tahrir. Ils étaient des milliers à attendre le résultat officiel d’uneélection-marathon, dimanche 24 juin après-midi. Une explosion de joie a saluél’annonce de la victoire de Mohamed Morsi, candidat des Frères musulmans. Cedernier a conquis la présidence avec 51,7 % des voix, sur le total des25,577,511 votes valides. Il succède à Hosni Moubarak, renversé suite à larévolte populaire de février 2011. Un conseil militaire de 20 générauxgouvernait depuis.

C’est Farouq Soultan, dirigeant de la commission électorale égyptienne, qui aannoncé les résultats à 17h30 heure locale.

Morsi a battu son rival Ahmed Shaffik de trois points. A 60 ans, ce docteurdiplômé de l’Université du Sud de la Californie est membre des Frères musulmansdepuis des années, ce qui lui a valu la prison sous le régime Moubarak. Il estentré en politique en 2011, lorsque les Frères fondent le parti Liberté etJustice.
Difficile encore de savoir s’il opérera indépendamment des autres leadersislamistes ou sous leur férule. “Je traiterai tout le monde sur un piedd’égalité et servirai le peuple égyptien dans son ensemble”, avait-il promisdepuis ses quartiers généraux du Caire, une semaine avant l’annonce desrésultats. De nombreux citoyens, notamment de la minorité chrétienne, restentcependant suspicieux devant ces déclarations et certains sentiments anti-Frèresmusulmans, alimentés par les médias, se sont exprimés ces dernières semaines.
Plusieurs scénarios envisageables Les experts sont partagés sur lesconséquences de cette victoire islamiste. Pour Zvi Mazel, membre au Centre deJérusalem pour les affaires publiques et ancien ambassadeur en Roumanie, Egypteet Suède, le résultat de l’élection signifie l’échec de la révolutionégyptienne : “C’est la confirmation que la démocratie n’est pas la priorité del’Egypte”. Et de souligner que le but affiché des Frères musulmans, fondés enEgypte en 1928, est d’introduire la loi de la Charia et d’islamiser le monde.
“Israël doit s’inquiéter”, dit-il, ajoutant que Morsi a suggéré de soumettrel’accord de paix avec Israël à un référendum. De plus, le but du mouvementradical serait de progressivement transformer l’Egypte en un Etat islamiste. Cequi pourrait signifier notamment le soutien du Caire au Hamas, avec unefrontière ouverte à Gaza et provision d’armes. Mazel pense également quel’armée égyptienne, qui n’a pas su résister face à la montée de l’islamisme,est en danger d’affaiblissement de la part du nouvel exécutif. Selon lui, denombreux jeunes, déçus par le gouvernement militaire, ont voté pour les Frèresmusulmans par réaction.
Le docteur Mira Tzoreff, du Centre Moshé Dayan pour les études du Proche-Orientet de l’Afrique à l’Université de Tel-Aviv, se montre plus optimiste. Elle quia étudié les Frères musulmans pense que si Morsy s’engagera probablement dansune ligne rhétorique plus dure, il n’agira pas pour autant en conséquence. Carpour réussir politiquement et économiquement, le nouveau président devraadopter des mesures acceptables par tous les Egyptiens, y compris les libérauxet les laïques selon Tzoreff. Faisant cela, il pourrait peut-être hisser lepays hors de la misère. Pour la spécialiste, Morsi est capable de réussir, à conditionde ménager l’armée et les autres partis et de ne pas devenir captif del’idéologie islamiste.
Quant à savoir si Le Caire prend le chemin d’un nouveau Téhéran, Tzoreff estseptique : “Il y a des différences importantes entre l’Egypte et l’Iran”, dit-elle,notant que le leadership des Frères musulmans possède malgré tout un importantbagage laïc tandis que les dirigeants de la République islamique sontd’éducation entièrement religieuse. “Morsi possède un doctorat d’ingénieried’une université américaine”, note Tzoreff. “C’est très significatif”.