Il y a 40 ans, le drame de Munich

L’événement a modifié les mesures de sécurité de tous les grands événements à suivre

munich (photo credit: Assaf Kuttin/Archives du Jerusalem Post)
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(photo credit: Assaf Kuttin/Archives du Jerusalem Post)

Pour l’Etat juif,les Jeux olympiques de Londres portent en eux une série de chiffres-clés : 60ans de participation israélienne aux Jeux, 20 ans depuis la première médaille,et par-dessus tout, 40 ans depuis la tragédie des Jeux de Munich.

En 1972, Israël envoie 15 athlètes aux JO de Munich, en Allemagne de l’Ouest,pour concourir dans sept sports différents. La délégation comporte aussi 5entraîneurs, 2 juges internationaux désignés pour régir la compétition, et 8membres du personnel. En tout, une trentaine de personnes qui font ledéplacement. Aucune d’entre elles ne peut imaginer la tragédie qui se prépare.
Le jour du massacre, le 5 septembre 1972, correspond au 12e jour des JO. Lamajorité des athlètes israéliens ont déjà concouru dans leurs disciplines. Ilsn’ont pas décroché de médailles, mais l’ambiance est au beau fixe.
Le 4 septembre au soir, ils assistent à la projection d’Un violon sur le toitavec l’acteur israélien Shmouel Rodensky. Et regagnent leurs chambres asseztard. Les deux athlètes féminines, la sprinteuse Esther Shahamorov, et lanageuse Shlomit Nir sont logées dans un appartement à part.
Le manque de vigilance et les faibles mesures de sécurité alors en vigueur ontpermis aux terroristes d’escalader la clôture sans difficulté et de pénétrer levillage olympique sans être remarqués. D’autres athlètes les croisent sanssuspecter un instant le complot à venir. Et vont même jusqu’à les aider àenjamber la barrière.
Quand les membres de l’organisation terroriste Septembre noir gagnent lebâtiment où résidaient les sportifs israéliens, ils sortent leurs armesdissimulées dans des sacs de sport, ouvrent la porte d’entrée avec des clefsvolées et entrent sans éveiller les soupçons.
“Nous n’étions pas sûrs de ce qui se passait”, raconte Luis Barrionuevo. Lesauteur en hauteur argentin participait à l’époque aux épreuves, et a vécu deprès la tragédie.
“Nous ne comprenions pas pourquoi nous ne pouvions pas circuler librement. Lesheures passaient et nous avons découvert qu’il y avait eu un enlèvement, puisun décès.”
Plusieurs semaines avant l’ouverture de la compétition, le 26 août 1972,Barrionuevo avait acheté une petite caméra, sans se douter de l’importance desséquences qu’il allait prendre. “J’ai été invité à me rendre à Munich par cequi était alors l’Allemagne de l’Ouest. Et la première chose que j’ai faite,c’est d’acheter une caméra !”, se rappelle aujourd’hui le sportif.
“Le matin de ce jour tragique, je me suis levé et ne pouvais pas sortir ducomplexe. Alors j’ai décidé de monter sur le sommet du bâtiment de l’Argentinepour filmer ce que je pouvais voir.”
“J’étais très proche”, raconte Barrionuevo. “A quarante mètres du bâtimentd’Israël. J’ai des images de membres de la police ou de l’armée déguisés ensportifs avec des mitrailleuses, qui rampent autour du bâtiment des athlètesisraéliens. J’ai aussi le film des ravisseurs avec des bas de nylon sur la têtequi leur défiguraient le visage, postés sur le balcon pour observer lasituation”, explique-t-il.
Le spectacle doit continuer

 

En échange des otages israéliens, les terroristes exigent la libération de232 terroristes palestiniens incarcérés en Israël ; et de deux autres, détenusen Allemagne.
Ils menacent d’exécuter deux otages si leurs demandes ne sont pas satisfaites àmidi. Le gouvernement israélien refuse d’accéder aux requêtes ou d’ouvrir desnégociations avec les terroristes. L’Allemagne, au contraire, relâcheimmédiatement les deux prisonniers qu’elle détient, qui s’envolent pour laTunisie.
Les autorités allemandes tentent ensuite de pénétrer le bâtiment via le toit etles fenêtres, situées hors de l’angle de vue des terroristes. Mais grâce auximages retransmises à la télévision par les médias, les preneurs d’otagescomprennent la ruse. Ils exigeront que les lieux soient évacués.
Il a été avéré que les terroristes ont collaboré avec des membres de Stasi,appartenant à délégation d’Allemagne de l’Est : ils les ont aidés ensurveillant le bâtiment d’Israël et en leur rapportant en direct tous lesagissements des autorités.
En dépit de la mort des 11 athlètes israéliens, d’un policier allemand et decinq terroristes ; les organisateurs des Jeux s’opposent à la suspension del’événement.
La puissance économique des Jeux olympiques prend le dessus sur le reste. “Lecélèbre cirque devait continuer, malgré le fait que des hommes étaient morts.C’étaient des sportifs, des collègues, et je pense que si cela se passaitaujourd’hui, les Jeux ne se poursuivraient pas”, commente Barrionuevo. “Je mesens mal à l’aise. Un peu inquiet parce que, d’une certaine manière, j’ai étécomplice de cette décision.”
A l’époque il avait 23 ans. Aujourd’hui, l’entraîneur des équipes argentinesrêve de gagner une médaille d’or avec Las Leonas aux JO de Londres, après avoirremporté la médaille d’argent à Sidney en 2000 et le bronze à Athènes en 2004et Beijing en 2008.
Aux Jeux de Londres, estime-t-il, la sécurité sera nettement plus stricte qu’àl’époque. “Je pense que la vigilance sera plus importante. Nous étions àLondres il y a deux mois pour l’inauguration du terrain de hockey. Il y a descaméras dans tous les recoins. Les contrôles sont très stricts, de sorte queles foules et les sportifs peuvent se sentir en sécurité et profiter duspectacle.
Les failles sécuritaires de Munich dictent en effet les préparatifsd’aujourd’hui. L’échec de l’opération de sauvetage, il y a 40 ans, qui avaitdébouché sur le meurtre de 11 athlètes a définitivement redéfini le potentielrisque qui plane au-dessus d’événements de l’ampleur des Jeux olympiques.