De nouveau ministre ?

Tzipi Livni était présente à la Conférence diplomatique du Jerusalem Post. Contre toute attente, la candidate centriste ne serait pas opposée à rejoindre une coalition menée par le Likoud.

tzipi livni_311 (photo credit: Idan Gross )
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(photo credit: Idan Gross )

JerusalemPost : Si Netanyahou était prêt à prendre des initiatives diplomatiques, vousverriez-vous représenter son gouvernement à l’étranger ? Tzipi Livni : Il nes’agit pas de « son » gouvernement. C’est le gouvernement israélien. Ladernière fois qu’il a formé une coalition, j’ai vérifié à plusieurs reprisesauprès de lui s’il existait une chance d’avancer vers de vraies négociations,pas simplement un dialogue au nom du dialogue, mais ce n’était pas le cas.

J.P. : Avigdor Liberman est en poste depuis quatre ans, n’avez-vous pas enviede prendre la relève ? T.L. : Ma seule raison pour revenir en politique est desauver Israël. Lorsque Netanyahou a formé une coalition, la dernière fois, avecdes partis qu’il a qualifiés de partenaires naturels, j’ai compris qu’il nevoulait pas avancer. Si j’en avais fait partie, je l’aurais sauvé lui, mais pasIsraël. Aujourd’hui, avec l’imminence des nouvelles élections, je dois mettremes idées en avant et offrir un autre choix aux électeurs. Je déciderai de lasuite au lendemain du scrutin. Il ne s’agit pas de Netanyahou. Il s’agitd’idéologies, de valeurs, de ce qui a besoin d’être accompli.

J.P. : Que répondez-vous aux électeurs de centre-gauche qui envisagent de voterpour Yesh Atid ou Avoda car ils veulent un futur gouvernement plus modéré etpensent que ces partis rejoindront le gouvernement tandis que vous refuserez ? T.L. : Je n’ai pas dit que je n’en serai pas. J’ai fait aux électeurs la promessesuivante : que je ne trahirai jamais leur confiance, et que je prendrai madécision en fonction de mes valeurs et des leurs, de ma vision pour Israël etde la leur. Il ne faut jamais dire jamais. Mais j’ajouterai ceci : ceux qui neveulent pas de Netanyahou au pouvoir devraient voter pour quelqu’un qui n’estpas au gouvernement et qui représente ce qui leur paraît juste comme visiond’avenir. La question n’est pas de savoir qui fera partie du gouvernement, mais de quellevision les partis de centregauche se réclament. Le socialisme ne rend pas pourautant ses partisans plus modérés sur le conflit israélo-palestinien. Les Israéliens qui se disent que tout est lié, qu’on ne peut pas défendresimplement une seule cause et qui comprennent qu’un Etat binational serait undésastre pour le sionisme, doivent me soutenir et me faire confiance.

J.P. L’ancienne secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice a écrit dans sonlivre l’année dernière que vous lui avez dit, ainsi qu’aux Palestiniens, de nepas signer d’accord avec l’ancien Premier ministre Ehoud Olmert et d’attendreque vous soyez élue, car il n’aurait pas eu « le soutien nécessaire » enIsraël.
T.Z. : Ce sont des aberrations. Je suis désolée, mais c’est la seule réponseque je peux vous donner. C’est n’importe quoi ! Un mensonge ! Je me suisentretenue avec Condi après la publication. J’ai également rencontré Abou Mazen(Abbas) et lui ai demandé : l’ai-je vraiment dit ? Il m’a répondu non et je luiai demandé de le dire publiquement, car ma parole a été mise en doute.
Ouzi Arad lui-même a déclaré, après avoir pris connaissance du détail desnégociations, que je représentais les intérêts de la sécurité nationaleisraélienne au cours des pourparlers.
Je suis donc la dernière personne qui aurait pu dire aux Palestiniens : « vouspouvez en obtenir davantage ». Pendant les discussions entre Abbas et Olmert,je leur ai moins cédé que ce qui était de fait sur la table.
J.P. : Accepteriez-vous la demande palestinienne de reprendre les négociationslà où Olmert les a laissées ? T.L. : Non. Les Palestiniens pensent qu’ilspeuvent récupérer n’importe quelle offre israélienne et dire « commençons de là». C’est inacceptable. Je n’ai pas apprécié qu’ils aillent aux Nations uniesmais ils en ont manifestement retiré quelque chose. Alors qu’ils oublient leurspréconditions et relancent les pourparlers.
Cela me dérange que Netanyahou et d’autres élus de droite pensent que j’ai toutcédé à la table des négociations et que j’étais très faible. C’est faux. Lelieu pour défendre les intérêts israéliens, c’est justement la table desnégociations.
Regardez la situation maintenant, après quatre ans de stagnation et d’impasse.Les Palestiniens ont deux Etats : « Hamastan » à Gaza, qui s’est vu assurer unelégitimité grâce à Netanyahou, un fait inacceptable à mes yeux, et un nouvelEtat reconnu par l’ONU.
Ils ont donc deux Etats pour un peuple dans la bande de Gaza et enJudée-Samarie, parce que nous ne défendons pas les intérêts israéliens. Lorsdes négociations, il était clair que l’Etat palestinien serait démilitarisé,qu’il ne correspondrait pas aux lignes pré-1967 et qu’il signerait la fin duconflit.
J.P. : Ehoud Olmert a offert la totalité de la Judée- Samarie, avec deséchanges de terres. Feriez-vous de même ? T.L. : Je ne parle pas d’échanges de terresmais de compensations. Ceux qui rêvent de refaire l’histoire et de retourner àjuin 1967 doivent savoir qu’il n’y avait pas, à l’époque, de lien entre laJudée-Samarie et la bande de Gaza.
Il faut pouvoir exprimer l’idée d’un Etat palestinien unique de façondifférente. De l’avis général, si nous conservons les blocs d’implantations, ilfaut donner une compensation.
Mais je ne dirais pas à l’avance que le ratio doit être d’un pour un. Ce n’estpas ce que j’avais offert.
Sur la question des réfugiés, je suis parmi les plus extrémistes en Israël carje crois que chaque Etat doit répondre aux aspirations de son propre peuple.Israël a servi de refuge aux Juifs venus des pays arabes, il n’est donc pas uneoption pour les réfugiés palestiniens. C’est l’Etat palestinien qui doitrépondre aux aspirations nationales palestiniennes, pas Israël. Contrairementdonc à ce que Netanyahou et d’autres disent de moi, je ne ferai pas decompromis sur la sécurité. Après quatre ans de Likoud, il y a une érosion de laposition israélienne.
J.P. : Construirez-vous dans la zone E1 ? Fera-t-elle partie de votre frontière? T.L. : E1 est disputé, non pas entre Israël et les Palestiniens, mais entreIsraël et le monde entier, y compris les Etats-Unis. On n’y construira pas pourl’instant. Ce qu’a fait Netanyahou, c’était une déclaration politique p o u rgagner le soutien de la droite, et Israël en a payé le prix.
Nous établirons les frontières à la table des négociations en essayant depermettre au plus d’Israéliens possible de rester, mais je ne vais pas déciderde cela ici, avec vous. Seulement lors des négociations.
J.P. : Comment pouvez-vous espérer que les électeurs de Tel-Aviv votent pourvous alors que des roquettes sont tombées dans le centre, parce que Kadimas’est retiré unilatéralement de la bande de Gaza ? T.L. : Je n’ai jamais promisà qui que ce soit un conte de fées où « ils vécurent heureux et eurent denombreux enfants ». Je ne veux pas épouser les Palestiniens. Je veux divorcerd’avec eux. La palette de choix existant au Proche- Orient, en particulier pourIsraël, va souvent de Charybde en Scylla. Oui, nous nous sommes retirés de Gazaet oui, nous avons eu le Hamas en retour. Je pense qu’il faut agir fermement etuser de force militaire contre le Hamas. A ceux qui disent aujourd’hui que ledésengagement était une erreur, je réponds : voulez-vous vraiment allerreplanter le Goush Katif ? Pensez-vous vraiment que les habitantsd’implantations qui y vivaient nous protégeaient ? Dois-je vous rappelerqu’avant le retrait, nous étions malgré tout attaqués depuis la bande de Gaza ?Les implantations font partie de cette vision du Grand Israël, du peuple juifretournant sur sa terre natale et des implantations destinées à occuper toutela terre. Certains Israéliens croient toujours à cette idée. Très bien. Mais lavaste majorité d’entre nous aspirent à deux Etats. Lorsque Netanyahou parle dela solution à deux Etats, il doit également rappeler que les implantationsdesservent cette idée. La sécurité doit passer par le renforcement de l’effetde dissuasion. L’idée est d’avancer avec Abou Mazen sur un accord. Nous devonsisoler Gaza, mais le gouvernement actuel lui donne au contraire une légitimitéet isole Israël.
Nous ne pouvons pas nous le permettre.
J.P. : Contrairement à Shelly Yacimovich, vous continuez à critiquer les partisde votre bloc. Pourquoi ? T.L. : J’espère qu’en créant ma formation, davantaged’électeurs iront voter. Les gens me disaient qu’ils ne se reconnaissaient enpersonne. Ils ne sont pas socialistes et ne peuvent donc pas voter pour lesTravaillistes, mais ils ne se sentent pas non plus représentés par Lapid. Je necritiquerai pas Yacimovich ou Lapid, ni ne les attaquerai personnellement, maisnous dirons très clairement que ce que nous représentons n’existe pas ailleursdans les partis qui devraient dépasser le seuil électoral (deux mandats).
Si Kadima était encore un grand parti, je serais restée dans ma famillepolitique. Je suis retournée en politique parce qu’il y avait un vide et queKadima a cessé d’exister. Pas à cause de moi, mais parce que les électeurs deKadima ne pouvaient plus voter pour le parti après les primaires. C’estpourquoi j’ai fait le choix de former un nouveau parti.