Likoud-Beiteinou : opération choc

L’annonce de l’union entre les deux partis de droite a pris la classe politique de court. Réactions

BB Liberman poignee de main (photo credit: Reuters)
BB Liberman poignee de main
(photo credit: Reuters)
Surprise. Le Premier ministre Binyamin Netanyahou, qui n’en est pas à sa première manoeuvre politique, et Avigdor Liberman, ministre des Affaires étrangères, ont annoncé que leurs partis respectifs, le Likoud et Israël Beiteinou, allaient se présenter sur une liste commune aux élections du 22 janvier. Lundi 29 octobre au soir, le comité central du Likoud devait voter la fusion. Le Premier ministre a demandé aux membres de l’approuver, tandis que Michael Eitan, ministre pour l’amélioration des Services publics, se battait contre la mesure.
La veille, deux sondages publiés par Aroutz 2 et Aroutz 10 tâchaient d’estimer les résultats de la nouvelle liste conjointe. Si les deux enquêtes donnent 23 sièges au parti travailliste, ils divergent sur le Likoud-Beiteinou : 42 mandats pour Aroutz 2 (soit le même nombre que les deux partis combinés à l’heure actuelle) et 35 sièges selon Aroutz 10. Dans les deux cas, le bloc de droite garde un avantage sur le bloc de gauche avec 5 à 4 sièges de plus.
Ces chiffres sont tombés alors qu’aucune campagne officielle n’a été encore lancée. Seul élément à avoir changé : la photo de couverture sur la page officielle de Netanyahou.
Mais selon plusieurs médias, certains membres influents du Likoud tentaient encore de combattre la fusion lundi matin.
Une idéologie commune ?
Dans un message enregistré à l’intention des membres du comité, Bibi a expliqué que l’entreprise est destinée “à garantir un Likoud indépendant qui continuera sur sa voie : protéger le peuple d’Israël, la Terre d’Israël et la tradition juive. Se présenter ensemble permettra au Likoud de continuer à diriger l’Etat d’Israël. Votons en faveur de cette mesure : l’Etat d’Israël a besoin d’un Likoud fort”.
Dans la journée de dimanche, Netanyahou a rencontré des maires de sa formation ainsi que des secrétaires de fédérations locales pour les encourager à approuver la liste commune, en qualifiant celle-ci de “pré-coalition” qui ne modifierait pas les idéologies des partis respectifs.
De son côté, Michael Eitan continuait sa campagne opposée à la fusion. Et d’annoncer qu’il prévoyait de réunir les 400 signatures nécessaires pour lancer un vote à bulletin secret. Signatures qui devaient provenir des membres du comité présents à la réunion de lundi soir et ne pouvaient donc pas être collectées à l’avance. Lors du conseil des ministres du Likoud, Eitan a été le seul à s’opposer à la démarche de Netanyahou. Car selon lui, les deux partis “n’ont pas d’idéologie commune” et une liste conjointe conférerait à Liberman “la capacité potentielle de prendre les rennes du parti”.
Bien que demeuré silencieux, le ministre de l’Education Guideon Saar, numéro 2 sur la liste du Likoud, a fait une sortie contre Israël Beiteinou lors de la cérémonie commémorative qui a eu lieu pour Itzhak Rabin dimanche matin à la Knesset, sans toutefois nommer la formation directement. “Il y a malheureusement un nombre croissant de partis en Israël qui ne tiennent pas d’élections démocratiques pour déterminer qui les représentera à la Knesset”, a-t-il lancé.
“Lorsque la liste d’un parti n’est pas choisie via un processus démocratique, ses représentants ne sont pas tenus de servir le public, mais bien la personne qui les a désignés”.
Le Premier ministre a déclaré à ses collaborateurs qu’il avait offert à Liberman le poste de ministre des Finances ou de la Défense, mais que le leader russophone préférait rester aux Affaires étrangères. Peu après, l’actuel préposé aux Finances, Youval Steinitz, a plaisanté avec les journalistes en affirmant qu’il n’avait pas peur de perdre son emploi.
Samedi soir, le ministre des Agences de renseignements Dan Meridor a démenti les rumeurs qui le voyaient quitter le Likoud en postant une photo sur sa page Facebook entouré de ses conseillers dans sa cuisine. “En dépit des rumeurs, mon équipe et moi-même continuons à préparer les primaires. Bonne nuit de Jérusalem”, a-t-il écrit.
Dimanche, Meridor a répété qu’il préparait la campagne et annoncé la tenue de meetings à Haïfa et dans la région du centre.
Un peu plus tard dans la journée, la députée dissidente de Kadima, Yulia Shamolov Berkovich, a annoncé officiellement qu’elle se présentait aux primaires du Likoud le 25 novembre, avec la bénédiction de Netanyahou.
“Je suis heureux de vous voir rejoindre le Likoud”, lui a dit Bibi, “c’est naturel, car vous avez les mêmes valeurs que nous. Je suis sûr que vous allez beaucoup apporter à notre parti”
Quid du poste pour les nouveaux immigrants ?
La fusion Likoud - Israël Beiteinou, vue par Emmanuel Navon, candidat sur les listes du Likoud pour le siège réservé aux nouveaux immigrants
La soudaine alliance entre les partis de Binyamin Netanyahou et d’Avigdor Liberman ont décontenancé plus d’un homme politique. Au Likoud comme au sein d’Israël Beiteinou, on s’interroge.
Quelles conséquences en interne ? Et quelles chances de victoire ? Pour le docteur Emmanuel Navon, israélien d’origine française, le scrutin semble plus favorable. Explications.
Navon a soumis sa candidature aux primaires du Likoud qui se tiendront le 25 novembre prochain.
Sans la fusion, il aurait été candidat aux postes réservés aux immigrants sur la liste, soit à la 21e et 30e places.
Mais ses chances d’être élu au poste numéro 21 étaient infimes car le Comité central du Likoud a approuvé un nouveau statut il y a deux semaines, qui permet aux immigrants déjà députés (comme Youli Edelstein et Zeev Elkin) de bénéficier du siège, dans le cas où ils ne se feraient pas élire entre la place 2 et la place 20. Le poste numéro 30 est réservé aux immigrants qui n’ont jamais été députés. C’est donc pour ce poste que Navon se serait battu. Mais les sondages prévoyaient un peu moins de 30 députés Likoud.
La liste commune Likoud-Israël Beiteinou, en revanche, est susceptible d’obtenir 50 mandats, d’après un sondage mené par Arthur Finkelstein. Dans la liste commune, le poste des immigrants est numéro 47.
A la tête de la liste commune figurera bien sûr Netanyahou. En numéro 2 : Liberman. Puis deux députés Likoud, un député Israël-Beitenou, deux députés Likoud, un député Israël-Beiteinou, et ainsi de suite.
La liste des députés Likoud aura été sélectionnée par les primaires du 25 novembre. La liste des députés Israël Beiteinou aura été sélectionnée par Liberman.
Autre élément à prendre en compte : Liberman s’est engagé à faire passer, immédiatement après les élections, une loi obligeant les députés nommés ministres à quitter la Knesset. Ce qui signifie qu’une quinzaine de sièges se libéreront sur la liste Likoud-Israël Beiteinou dès la formation du gouvernement.
Ainsi, un candidat arrivé même à la 60e place sur la liste commune pourrait devenir député, à cause de la démission en masse qui suivra la formation du gouvernement.
Les chances de Navon de rentrer à la Knesset s’en voient donc nettement améliorées.