Représenter tout le peuple d’Israël

Entré dans la course pour la présidence du parti Habayit Hayehoudi, Naftali Bennet a un programme chargé

rencontre (photo credit: DR)
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(photo credit: DR)

Naftali Bennetest entré de plain-pied dans l’arène politique.

Pour devenir l’une des personnalités politiques les plus intrigantes du moment.A 40 ans, son curriculum vitae comprend des success-story dans de multiplesdomaines : commandant de brigade d’une unité d’élite de l’armée, chef decabinet de Binyamin Netanyahou lorsque celui-ci menait l’opposition, présidentdu conseil de Judée-Samarie, cofondateur de My- Israel, plus grand mouvementnational sioniste d’Israël, fort de 80 000 membres, et, plus récemment,fondateur du mouvement Yisraelim qui a pour ambition d’attiser les valeurssionistes auprès des jeunes de centre-droite.
Mais s’il est engagé, l’homme est aussi d’affaires, devenu millionnaire en 2005avec la vente de sa startup Cyota, pour 145 millions de dollars, et vient defaire un don de 160 000 shekels à son parti pour sa propre campagne. L’annoncede son entrée officielle en politique a suscité l’attention de nombreux observateurs.Rencontre avec un politicien d’un nouveau genre.
■ Après des mois de spéculations, rumeurs politiques et courtes interjectionsen direct, vous avez finalement décidé de vous porter candidat pour laprésidence du parti Habayit Hayehoudi (Le Foyer juif) lors des prochainesprimaires. Pourquoi cette option ? N’aurait-il pas été plus simple d’intégrerle Likoud ?

Le camp nationala disparu. Le Likoud était autrefois un groupe national. De nombreux membres dela c o m m u n a u t é n a t i o n a l - r e l i - gieuse - dont moi - onténormément travaillé à faire de Netanyahou le Premier ministre. Pourtant, unefois élu tout a changé : Ehoud Barak a empoché le ministère de la Défense, encharge de la Judée et Samarie, puis le gel des constructions a affecté 350 000personnes. Il faut former un grand camp national avec Habayit Hayehoudi commenoyau. Pour reconstruire le camp national, il faut travailler ensemble avec despartenaires traditionnels et laïcs. C’est notre seule option.

Pour l’instant, nous ne disposons que de trois sièges à la Knesset. C’est pourcette raison qu’aucun député national-religieux ne participe à la prise dedécisions et que le parti est exclu des portefeuilles-clés - ministère de laDéfense, des Affaires étrangères, des Finances, ou même Premier ministre. Nousn’avons aucun membre qui siège à la Shminiya (cabinet fermé du gouvernement quicomprend 8 ministres). C’est comme si nous n’existions pas. Nous ne sommes paspris en considération. Et l’unique moyen pour que cela change, c’est de devenirplus puissant. Pour mener et non rester sur le banc de touche, il nous faut 15sièges à la Knesset.
■ Imaginons un instant que vous deveniez le nouveau président d’HabayitHayehoudi, quelle direction donneriezvous au parti ?

Se tourner versl’extérieur et cesser le sectarisme serait ma ligne directrice. Ceci impliquequ’il faut s’occuper des membres du conseil religieux de Hadera mais égalementde se consacrer à des sujets fondamentaux comme les écarts socio-économiques,la domination de la Cour suprême, la situation du Néguev et de la Galilée oùnous perdons nos terres nationales. Nous avons également besoin d’inculquer unebonne et forte identité juive et sioniste à tous les enfants d’Israël, passeulement aux religieux. En d’autres termes, nous devons arrêter de nousreplier sur nousmêmes et commencer à porter notre intérêt à Am Israël. Unmeneur doit prendre en compte toute la nation. Si nous voulons avoir l’étoffed’un leader, nous devons être un parti courageux qui s’occupera de tout lepeuple d’Israël.

■ Habayit Hayehoudi est pourtant considéré par beaucoup comme un parti en voied’extinction.Pensez-vous pouvoir le ressusciter ?

Nous avons lechoix entre la mort du parti et sa transformation en un mouvement juif etsioniste dominant. Lors de son heure de gloire (le Mafdal à l’époque) disposaitde 12 sièges, puis 7 et aujourd’hui 3. Pour survivre, nous devons changer notrepropre vision du parti et notre rôle dans la société. Ce que je veux dire,c’est que nous devons arrêter de nous voir uniquement comme des “religieux”.Pour donner un exemple, j’étais commandant des forces spéciales dans l’armée.Et je suis actuellement major de réserves au sein de Sayeret Matkal (unité derenseignement), mais je ne me considère jamais comme le “religieux”.

Quand j’ai créé mon entreprise et dirigé 140 employés, je ne me suis jamais vucomme le “religieux”. J’étais le patron, c’est tout. Par contre, en politique,nous nous laissons facilement étiqueter. En conséquence, les seules petitsportefeuilles que l’on nous offre sont le ministère de la Hasbara (diplomatiepublique) ou le ministère de la Science. C’est ridicule ! Au lieu d’être à latête du pays, nous sommes en charge des affaires religieuses. Il est temps quenous participions à la manoeuvre du pays.
■ Vous souhaitez donc que le parti Habayit Hayehoudi sorte de son rôled’“influent” à celui d’instigateur ?

C’est même plusque cela. Puisque le parti s’intitule “le Foyer juif”, il faut réaliser cetteidée. Créer une maison pour tous les Juifs : religieux, laïcs ettraditionalistes. En se faisant, nous passerons d’un petit parti ferméreligieux à celui d’un large refuge juif-sioniste. C’est notre projetd’ensemble.

■ Comme vous le savez, le camp des prosionistes comprend des religieux, deslaïcs et des traditionalistes issus d’un large éventail politique. Pensez-vousque ce groupe puissant, un des plus grands en Israël, puisse se retrouver dansun unique parti ? Si oui, comment ?

La première étapeconsiste en notre victoire aux primaires, qui ont lieu dans quelques semaines.Pour atteindre cet objectif, il faut que des dizaines de milliers de personness’inscrivent au parti Habayit Hayehoudi. Ainsi, j’invite tout le monde às’encarter pour pouvoir ensuite nous aider à accomplir notre projet. Pourfaciliter les démarches, nous avons créé un site : www.israelim.org.il. Tout lemonde peut s’inscrire en ligne.

Deuxièmement, après notre victoire aux primaires, nous inviterons tout le mondeà rejoindre le parti. Plus de dix mandats du Likoud ont été formés par dessionistes religieux. Nous leur dirons : “Que faites-vous au Likoud ? Nous luiavons ouvert la porte du pouvoir, puis Ehoud Barak et le gouvernement ontprocédé à un gel des constructions de dix mois. En nous ignorant, Netanyahou aensuite confirmé la vision d’Ehoud Barak d’un Etat palestinien en Judée etSamarie, ce qui va à l’encontre de nos idées. C’est aussi le Likoud qui a faitcapoter le projet de loi pour modifier la structure de la Cour suprême. Etc’est encore le Likoud qui a repoussé le projet de loi pour interdire lefinancement européen d’ONG anti-israéliennes. A chacune de ces étapes, noussommes mis de côté. Si nous voulons être pris en compte, nous devons êtreforts. Regardez le Shas. Il ne prend en compte qu’une partie de la population,alors que nous voulons nous occuper de tout Am Israël. Mais il dispose de 12mandats, et c’est un des partis des plus puissants en Israël. Nous, nous sommesdispersés et “sans voix”. C’est la grande différence.
■ Ces six derniers mois, vous avez promu le projet d’annexion par Israël de lazone C en Judée et Samarie. De quelle manière les sionistes laïcs qui ontrejoint vos rangs, perçoivent-ils ce projet ? Le soutiennent-ils ?

Dans les rangs ducamp national, religieux ou laïc, il existe un soutien considérable au projetde souveraineté israélienne en Judée et Samarie. Par ailleurs, nous avonseffectué un sondage qui indique que la majorité des Israéliens (au-delà du campnational) soutiennent cette idée. Ce n’est pas une grande majorité, mais unemajorité tout de même.

■ En résumé, quelles sont les questions fondamentales qui doivent être résoluesen Israël ?

Il faut avanttout inculquer à notre jeunesse une forte identité sioniste et juive, via lesystème éducatif. Chaque enfant doit savoir qui sont Yoni Netanyahou et leRambam (Maïmonide). Ce n’est malheureusement pas le cas aujourd’hui, nous avonsencore beaucoup de travail. Le deuxième enjeu est celui de la périphérie. Ilfaut prendre en considération ce problème car l’écart socio-économique continueà se creuser entre les habitants du centre et les résidents au nord et sud dupays. C’est une bombe à retardement. Enfin, troisième enjeu, il faut trouverune solution rapidement (d’ici un an ou deux) à la menace iranienne, d’unemanière ou d’une autre. C’est une question de sécurité.