La violence refait surface

Attentat en plein cœur de Tel-Aviv. Menaces de représailles sur le front Nord. Après un calme relatif, Israël est de nouveau plongé au cœur de ses priorités sécuritaires, alors que la campagne électo

Des policiers sur la scène de l'attentat, mercredi 21 janvier à Tel-Aviv (photo credit: NIR ELIAS / REUTERS)
Des policiers sur la scène de l'attentat, mercredi 21 janvier à Tel-Aviv
(photo credit: NIR ELIAS / REUTERS)
Depuis presque trois semaines, les médias israéliens étaient tous tournés vers Paris. Les attaques contre Charlie Hebdo et contre l’Hypercacher ont fait la une des journaux. Puis la marche républicaine, la visite de Benjamin Netanyahou dans la capitale, et le débat sur l’aliya des juifs de France ont pris le relais. Au même moment, certains ont remarqué qu’au niveau national, on parlait beaucoup de météo et d’une campagne électorale pas très rutilante. Mais c’était un calme trompeur.
Depuis le raid qui a tué six membres du Hezbollah et un général iranien la semaine dernière, la tension est à son comble sur le front Nord, car l’organisation terroriste chiite crie vengeance.
Et mercredi 21, la terreur a fait son retour dans les rues israéliennes, quand Hamza Muhammad Hassan, un Palestinien originaire de Tulkarem a poignardé 12 personnes, dont quatre grièvement.
Réactions, accusations et promesses de sécurité ont fusé après l’attentat. Pour Benjamin Netanyahou, aucun doute : le chef de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas est à tenir pour responsable, lui qui ne cesse d’inciter à la haine. « Nous continuerons d’agir de façon ferme contre le terrorisme qui tente de nous déstabiliser depuis la création de l’Etat, et nous ferons en sorte qu’il ne parvienne pas à ses fins », a promis le chef du gouvernement.
« Lorsque Mahmoud Abbas incite à la haine, baptisant des rues au nom des terroristes et les récompensant par de l’argent […] ces terroristes sont juste ses agents », a quant à lui accusé Naftali Bennett. Du côté de Ramallah, silence. L’Autorité palestinienne n’a pas encore condamné l’attentat.
Le ministre des Affaires étrangères Avigdor Liberman est allé plus loin, pointant également du doigt les députés Hanin Zoabi et Ahmed Tibi. Puisque le chef d’Israël Beiteinou concentre une fois de plus sa campagne sur la loyauté des Arabes israéliens.
L’opposition n’est pas restée silencieuse. « Les citoyens israéliens ne se sentent pas en sécurité, ni près de la frontière de Gaza, ni à Tel-Aviv », a réagi Itzhak Herzog. « Nous changerons cela grâce à des actions contre les organisations terroristes et ceux qui les commandent », a affirmé le chef de file du parti travailliste. Des propos repris par son acolyte, la chef de file de Hatnoua, Tzipi Livni. « Une chose doit être claire », a-t-elle assuré, « dans la guerre contre le terrorisme, il n’y a pas de compromis. Le terrorisme ne se règle pas par les négociations, mais par la force, la force et encore la force. »
La chef de file de Meretz Zehava Gal-On a rappelé que « le seul moyen de stopper le terrorisme est de comprendre ce qui le motive », avant d’exhorter ses camarades politiciens à ne pas jeter de l’huile sur le feu pour les besoins cyniques de la campagne électorale.
Un tournant sécuritaire ?
Les partis rivalisent donc de promesses sécuritaires et pourtant, il semblait bien jusqu’à mardi que ces questions n’étaient pas en premières lignes de leurs agendas respectifs. Ceux qui s’attendent à voir d’anciens chefs d’état-major, comme Ehoud Barak, Shaoul Mofaz, Dan Haloutz ou Gabi Ashkenazi, revenir sur le devant de la scène politique avant que les partis ne verrouillent définitivement leurs listes à la date butoir du 29 janvier, risquent d’être déçus.
Avant, ce titre était la promesse d’une retraite animée : après avoir retiré leurs uniformes militaires, les chefs d’état-major nouaient en vitesse une cravate, et démarraient ainsi la seconde partie de leur belle carrière, se hissant directement aux plus hauts rangs de la hiérarchie du pouvoir. Mais un seul regard sur ce qui est en train de se produire ces dernières semaines à l’intérieur des formations en lice prouve que ce n’est plus le cas.
Le parti travailliste a poussé Shaoul Mofaz vers la sortie et décidé qu’il se contenterait de la présence sur sa liste d’Omer Bar-Lev, ancien directeur de l’unité d’élite Sayeret Matkal. Le parti a certes recruté l’ancien chef des Services de renseignements militaires, Amos Yadlin, qui sera le candidat de la formation au poste de ministre de la Défense, si le parti travailliste remporte les élections, forme le nouveau gouvernement et conserve le portefeuille de la Défense – beaucoup de « si » – mais Yadlin ne sera pas député. Dans une lettre au conseil d’administration de l’Institut pour l’étude de la sécurité nationale qu’il dirige – lettre rendue publique par la première chaîne de télévision – Yadlin écrit que son congé autorisé du panel d’experts sera effectif jusqu’au 17 mars, « date après laquelle, en fonction des résultats, nous aviserons ».
Au Likoud, l’ancien chef du Shin Bet Avi Dichter a dégringolé de la 20e à 26e place, après un ultime comptage des voix, au profit de la ministre adjointe aux Transports, aux Sciences et à Technologie Tzipi Hotoveli, qui n’a elle pas fait l’armée, mais un service national en tant qu’émissaire de l’Agence juive à Atlanta.
La rumeur disait que le chef de HaBayit HaYehoudi, Naftali Bennett réservait une place à un ancien général. Le nom de l’ancien commandant des forces terrestres de Tsahal, Yiftah Ron-Tal avait été murmuré. Mais Bennett a récemment annoncé qu’il n’avait pas l’intention de modifier la liste élue par les membres du parti lors des primaires.
Israël Beiteinou se retrouve sans figure sécuritaire, après le départ du ministre de la Sécurité publique Itzhak Aharonovitz. Le parti a décidé de propulser sa candidate socio-économique, la députée Orly Levy-Abecassis à la seconde place de sa liste.
Meretz a toujours eu une personnalité sécuritaire dans ses rangs, mais depuis que l’ancien colonel Ran Cohen a quitté la formation en 2009, sa place est restée vacante. L’ancien député Avshalom Vilan, qui a servi au sein de la Sayeret Matkal, n’est pas parvenu à se hisser à une position éligible lors des primaires du parti la semaine dernière.
Les seuls partis qui peuvent se targuer d’avoir un garant de la sécurité dans les premières places sur leurs listes sont le Likoud – avec l’ancien chef d’état-major Moshé Yaalon – et Koulanou – en la personne de l’ancien chef du commandement sud Yoav Galant. Elazar Stern de Yesh Atid a certes le rang de général de division, mais il dirigeait le département des ressources humaines de Tsahal.
Au cours de cette campagne, les partis ont donc définitivement mis le cap sur les questions socio-économiques. Mais c’était avant que les sujets sécuritaires ne les rattrapent…
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