Qui prendra la relève de Mahmoud Abbas ?

Ils se prénomment Fadi, Ali ou Issa, et pourraient peut-être incarner demain le leadership palestinien. Pour autant, le prétendant numéro 1 reste le tristement célèbre Marouan Barghouti.

Selon un sondage mené cet été par le Centre palestinien d’opinion publique, Marouan Barghouti pourrait remporter des élections présidentielles palestiniennes (photo credit: BAZ RATNER)
Selon un sondage mené cet été par le Centre palestinien d’opinion publique, Marouan Barghouti pourrait remporter des élections présidentielles palestiniennes
(photo credit: BAZ RATNER)
«J’espère qu’il sera assez jeune pour diriger avec énergie, mais assez mûr pour agir avec sagesse, entre 40 et 60 ans. Il devra être instruit, cultivé, honnête. Personnellement, j’aimerais que ce soit une femme », confie Amal Al Qasem, active dans la vie associative du quartier de Sheikh Jarrah à Jérusalem-Est. Derrière elle, dans son bureau près de l’American Colony, les portraits de Yasser Arafat et de son successeur Mahmoud Abbas, ne laissent aucun doute quant à l’admiration qu’elle porte aux leaders palestiniens.
Pour autant, dans les rues de Jérusalem-Est, les habitants ne mâchent pas leurs mots envers leurs dirigeants. Pour eux, l’Autorité palestinienne n’est qu’une dictature corrompue dans la tradition des régimes arabes du Moyen-Orient. « Non, je ne me sens pas représenté par Abou Mazen et la nouvelle génération de leaders palestiniens », note Mahmoud Mouna, propriétaire d’une librairie près de la Vieille Ville. « Ils représentent les vestiges d’une époque révolue, celle où un seul leader détient tous les pouvoirs jusqu’à sa mort. »
Quand on parle de relève, le nom qui revient indubitablement est celui de Marouan Barghouti, chef des Brigades des martyrs d’al-Aqsa, condamné à cinq peines de prison à vie pour son rôle dans la seconde intifada. A gauche de l’échiquier politique israélien, certains sont d’avis de libérer Barghouti dans le cadre d’un échange de prisonniers. Dans la rue palestinienne, ses supporters aiment le comparer au leader sud-africain Nelson Mandela, qui après avoir purgé 27 ans de prison est devenu un des plus grands dirigeants du XXe siècle. « Certes, il était impliqué dans la seconde intifada, mais les attaques qu’il a ordonnées ont forcé Israël à reconnaître qu’il n’était pas invincible et que les Palestiniens pouvaient l’atteindre », explique Mouna.
Aux yeux de la société israélienne, Barghouti n’a rien de Mandela. Début novembre, il a été placé en isolement après avoir appelé à la lutte armée depuis sa cellule.
Quand la rue hausse les épaules
Alors qui sera le prochain chef de l’AP ? Peut-être Fadi Qouran, 26 ans, originaire d’El Bireh dans la banlieue de Ramallah. Diplômé en physique et en relations internationales, il a purgé plusieurs peines de prisons pour manifestations non violentes. Qouran semble être expert en matière de provocation. Il y a quelques mois, il était l’acteur principal d’une vidéo montrant des soldats de Tsahal le frappant, alors qu’il voulait traverser une artère principale du quartier juif de Hébron.
Ou bien Ali Abou Awad, lui aussi vétéran des prisons israéliennes, rejeton d’une famille du Fatah de Beit Oumar, près de Hébron. Depuis que son frère a été tué par les forces de sécurité israéliennes pendant la seconde intifada, Awad est actif au sein de Roots Judur Shorashim (Racines en anglais, arabe, hébreu), association israélo-palestinienne qui prône l’entente, la non-violence et la réconciliation. A 42 ans, Abou Awad, auteur d’Un espoir douloureux, est souvent invité à s’exprimer tant en Israël que dans les Territoires palestiniens, et à travers le monde, sur son parcours de la résistance armée à la non-violence. Le Martin Luther King palestinien.
Dernier candidat, Issa Amro, chef de la Jeunesse contre le mouvement d’implantations à Hébron. Comme Fadi Qouran, Amro a été arrêté à plusieurs reprises après des altercations avec des soldats israéliens et des habitants juifs de Hébron.
S’agit-il de prétendants sérieux pour remplacer Abbas ? Mais alors que le leader palestinien fêtera ses 80 ans en mars, dans la rue palestinienne on hausse les épaules, et on ne croit pas qu’un réel changement soit pour bientôt.
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