Nausée

Le cycle infernal du terrorisme

L'hommage rendu aux victimes de l'attentat de Barcelone (photo credit: DR)
L'hommage rendu aux victimes de l'attentat de Barcelone
(photo credit: DR)
Des milliers d’hommes et de femmes qui défilent en clamant crânement : « Nous n’avons pas peur » et « Nous ne changerons pas nos habitudes ». Des dirigeants communautaires qui affirment la main sur le cœur : « Nous refusons la haine. » Des monceaux de fleurs, des nounours attendrissants. Des dessins d’enfants. De petites bougies blanches. La photo des victimes dans un cadre noir. Et personne pour crier : « Mais dans quel monde vivons-nous ! »
Il y a quelque-chose d’effarant dans cet aveuglement collectif, dans cette complaisance dans la banalité des réactions. La tour Eiffel qui éteint ses lumières, les grands monuments européens qui se parent des couleurs de l’Espagne. Les chefs d’Etat qui vont de leur couplet de solidarité. Les hommes politiques qui plastronnent. Les politologues qui pérorent.
Les experts en sécurité qui se succèdent sur les plateaux pour dire tout et son contraire. On reparle de condamnation unanime, de l’islam qui est une religion de paix et d’amour. Demain, les familles brisées par la perte d’un être cher se retrouveront seules avec le deuil, et nombre de blessés qui gisent sur leur lit d’hôpital, devront réapprendre à vivre dans la souffrance. Aux grands discours succédera la bureaucratie. Les demandes de compensation et d’assistance à remplir en triple exemplaire et à assortir de certificats et autres documents. Les batailles d’experts. Tout cela dans l’indifférence générale. Ce n’est que lors de l’attentat suivant – car il y en aura forcément d’autres – que l’attention se portera à nouveau sur ces victimes oubliées, les journalistes s’étonnant alors en chœur, qu’après tant de mois ou d’années, les dossiers soient toujours en cours d’examen et que les réparations si nécessaires se fassent attendre. Puis on passera à autre chose.
Les terroristes, eux, n’oublient pas. Les réactions à chaque nouvel attentat ne font que les encourager. Ils perdent du terrain au Moyen-Orient ? Qu’importe. Un attentat à Barcelone, Londres ou Nice est bien plus efficace qu’une bataille perdue à Mossoul. D’ailleurs, on a bien vu que les dizaines, les centaines de milliers de victimes civiles dans la lutte contre Daesh ne pèsent guère dans l’opinion publique occidentale. Et qui se souvient des « valeureux » combattants du califat tués dans des combats douteux ? Qui connaît leur nom ? Tandis que c’est la gloire qui attend les tueurs en Europe. Leur photo à la une des journaux, leur profil soigneusement étudié, analysé, leurs proches interrogés – Ah, cet insoutenable concert repris par familles et voisins : « Il était si gentil, non ce n’est pas possible, il disait toujours poliment bonjour dans l’escalier et aidait les vieilles personnes à porter leurs paquets. » On nous dit que des soldats de l’Etat islamique moribond commencent à se replier vers l’Europe d’où ils sont issus ; vers l’Europe occidentale, patrie des droits de l’homme où les forces de l’ordre sont souvent démunies face à cette menace amorphe et pourtant si réelle. Ce ne sont pas les beaux discours et les émouvantes cérémonies qui pourront les arrêter.
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