Fais-moi peur

L’embrasement annoncé après les déclarations de Donald Trump n’a pas eu lieu

Des activistes du "Socialist Unity Centre" manifestant en Inde (photo credit: REUTERS)
Des activistes du "Socialist Unity Centre" manifestant en Inde
(photo credit: REUTERS)
Comment ? Le président américain s’apprête à reconnaître que Jérusalem est la capitale d’Israël ? Avant même l’intervention de Trump, médias et hommes politiques de tous bords se sont déchaînés. Pour les occidentaux, et particulièrement les pays de l’Europe de l’Ouest, une telle déclaration allait, dans l’ordre : mettre en danger le processus de paix (lequel, au juste ? Les négociations sont au point mort puisque les Palestiniens refusent de venir discuter avec les Israéliens) ; porter atteinte au fragile équilibre du Moyen-Orient (un équilibre pourtant invisible à l’œil nu) ; risquer de plonger la région dans le chaos (un chaos pourtant visible, lui, à l’heure actuelle). Lesdits Occidentaux ajoutaient que la mesure serait condamnée par le Conseil de sécurité, oubliant sans doute que les Etats-Unis y disposent d’un droit de veto. Ils disaient que Jérusalem, ou tout au moins la Jérusalem-Ouest, était bien la capitale de facto d’Israël, mais qu’il n’était pas nécessaire de dire tout haut ce que tout le monde savait. Ne lisant pas l’arabe, ces pays ignoraient sans doute que le monde arabe et musulman n’était pas du tout d’accord sur ce point ! Certains n’hésitent pas à proclamer que Jérusalem, de l’Est comme de l’Ouest, est la capitale de la Palestine depuis plus de 7 000 ans ! D’où le déferlement de haine et de menaces à l’approche de la déclaration et dans les heures qui l’ont suivie. « Vous allez voir ce que vous allez voir ! Les portes de l’enfer vont s’ouvrir ! Attendez-vous à des jours de rage ! La Palestine va s’enflammer de la rivière – le Jourdain – à la mer – Méditerranée ! Les nations arabes vont se soulever contre cette mesure sacrilège ! »
Il y a 70 ans déjà, de telles pressions avaient été exercées contre David Ben Gourion, l’adjurant de ne pas faire la folie de proclamer l’indépendance d’Israël, ce qui entraînerait un bain de sang et la fin de l’entreprise sioniste. Mais le président américain a tenu bon. C’est alors que s’est produit un phénomène curieux. Tandis que les dirigeants arabes couraient de sommet en sommet et faisaient assaut de condamnations, les peuples n’ont pas bougé. On a bien vu quelques milliers de protestataires ici et là, des drapeaux américains et israéliens brûlés en Egypte, en Jordanie ou au Liban. Mais à Jérusalem et dans les territoires palestiniens, les manifestations sont restées limitées, réunissant tout au plus 5 000 personnes pour l’ensemble du pays. C’est peut-être le résultat le plus encourageant de l’effet Trump. Les Palestiniens ne se laissent plus manipuler si aisément par leurs dirigeants. Et les Européens ? Là aussi, le ton s’est considérablement adouci. On ne condamne plus, on regrette. On écoute le Premier ministre israélien reçu en grande pompe à Paris et courtoisement à Bruxelles. Pendant ce temps, le 11 décembre à Jérusalem, sourdes aux appels à la violence, des milliers de personnes – juifs, arabes, chrétiens et simples touristes – se sont réunies devant la porte de Jaffa pour célébrer le 100e anniversaire de l’entrée du général Allenby dans la ville.
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