A nouveau sur les rails...

L’ancienne gare ferroviaire de Jérusalem va reprendre du service en avril 2013, pour devenir l’antre de l’art et de la gastronomie

la Première Station p19 521 (photo credit: Marc Israël Sellem)
la Première Station p19 521
(photo credit: Marc Israël Sellem)
Voilà quatorze ans qu’il était fermé et laissé à l’abandon. Mais ce bâtiment historique qui date de l’Empire ottoman n’a pas craché son dernier souffle... de vapeur. Après avoir dignement abrité la gare de Jérusalem pendant des décennies, il se prépare désormais à accueillir un centre de loisirs et de divertissement.
A l’origine du projet : Avi Murdoch, Hiérosolomytain et entrepreneur couronné de succès qui faisait toutefois plutôt penser à un enfant montrant son nouveau jouet, lors d’une récente présentation presse des lieux.
Pour ceux qui se souviennent encore de ce à quoi la station ressemblait quand elle était en service, les changements intérieurs paraîtront énormes. De l’extérieur, pourtant, depuis la rue Remez qui va de Derekh Hebron jusqu’au Théâtre Khan, l’ancien bâtiment a tout d’une ruine. Mais une fois franchi le seuil de la porte, l’endroit est étonnant. On peut déjà y voir, côte à côte, les restes de gloire passée de cette structure historique et les premiers signes d’une rénovation à grande échelle.
Il faudra attendre avril 2013 pour que les imposantes portes en bois de la gare (entièrement restaurées selon les strictes instructions des experts chargés du suivi du projet) s’entrouvrent sur une vaste installation moderne conçue pour le plus grand plaisir des résidents de la ville et des visiteurs.
C’est en septembre 1892 que le premier train pénètre la Ville sainte pour une halte à la station nouvellement construite de Jérusalem. Les dignitaires présents à l’inauguration sont en nombre, toutes origines confondues (Juifs, Arabes et Turcs). Parmi eux : Eliezer Ben-Yehouda, l’homme qui a redonné vie à la langue hébraïque. Fidèle à sa mission, il va déterminer un nouveau mot pour l’occasion. En Israël, on parlera désormais de “rakevet”, pour désigner l’imposante machine, et non de “cheval de fer”.
De la Jérusalem d’hier à la cité de demain 
Aujourd’hui, la Première Station, tel que se nomme le projet, apporte sa pierre au renouveau culturel qui s’opère dans la partie sudest de la ville, depuis le Théâtre de Jérusalem, jusqu’au Club Zappa, en passant par la Cinémathèque (et ses archives du cinéma), le Théâtre Khan, la Piscine du Sultan et bientôt le Centre Sherover de Talpiot. Un emplacement idéal pour les touristes puisque situé à une distance de marche des hôtels à proximité - comme le Inbal, le Dan Boutique, le King David ou le King Salomon. Le lieu mettra en particulier l’accent sur deux aspects de l’univers du loisir : le sport et la gastronomie.
Tout d’abord, le bâtiment restauré accueillera en son sein plusieurs restaurants, bars et cafés, établissements haut de gamme, dirigés pour la plupart par des chefs de grande renommée. Sur le côté, là où les herbes avaient eu le loisir de pousser sur ce qui n’a pendant longtemps consisté qu’en un terrain vague et déserté, se dresseront de petites auberges ou autres enseignes de restauration rapide. Entre les deux, sur les rails reconstruits, on pourra trouver des échoppes d’artisanat et de souvenirs à des prix raisonnables, installées dans de vieux wagons.
“Le concept de base consistera à offrir une variété de produits à des prix divers”, explique Murdoch. “Nous voulons pouvoir satisfaire les plus aisés, mais aussi les budgets serrés. Chaque visiteur aura le choix. Qu’il recherche un restaurant gourmet réputé ou soit en quête d’un en-cas bon marché comme une part de pizza. Et tout cela sera situé en un seul et même endroit.”
C’est donc là l’objectif principal de la station ? “D’abord et avant tout, le lieu servira de pont entre la Jérusalem d’hier et la cité de demain”, avance Murdoch. “Situé en plein coeur de la ville, il permettra de rendre l’art et les loisirs accessibles à tous, et, je n’ai pas peur de le dire, va modifier les habitudes de nombre de résidents parce qu’il sera si ouvert et si facile à atteindre. C’est un concept totalement nouveau.”
Tout pour tous 
Parmi la liste des activités et des événements programmés, l’accent sera mis sur les installations pour les sports non professionnels - comme la randonnée à vélo - et les magasins d’équipements sportifs.
On pourra trouver des points de départ pour des promenades en Segway, assister à du théâtre de rue, prendre part à des foires et autres festivités. Et toujours dans un souci de miser sur la diversité, l’un des aspects les plus intéressants du projet tient dans l’attention particulière qu’il va porter à l’art, pour le rendre, là encore, accessible à tous. Ofer Berkovitch, ancien membre du conseil municipal pour le parti Hitorerout B’yerushalayim (Le Réveil de Jérusalem), est en charge des aspects artistiques et culturels du projet. Outre les restaurants et les cafés, il veut faire du lieu une scène culturelle centrale.
Avec, au programme : magasins d’art, manifestations artistiques en plein air. Mais surtout une galerie publique sur l’un des plus grands espaces rénovés de l’ancien édifice, le vieux hall de gare, qui présentera des nouvelles expositions quatre à cinq fois par an. Chacune, réalisée en collaboration avec l’un des établissements des beaux-arts de la ville (Jérusalem compte le plus grand nombre d’écoles d’art du pays) pour amener les résidents à se familiariser avec le travail des élèves.
“Tous les Hiérosolomytains ne sont pas prêts à se donner la peine de se rendre jusqu’au mont Scopus pour voir l’exposition de fin d’année des étudiants de Bezalel”, explique-t-il, “donc nous allons faire venir les expositions ici, afin que les travaux des étudiants soient accessibles à tous.”
La galerie permettra également aux jeunes artistes locaux de présenter leurs oeuvres, l’opportunité pour eux de se faire connaître auprès des amateurs d’art éventuels.
L’ensemble du projet a été initié par l’Autorité de développement de Jérusalem. C’est Murdoch qui a remporté l’appel d’offres lancé aux entrepreneurs, l’an dernier. Il bénéficie d’une franchise d’exploitation du terrain qui appartient aux chemins de fer israéliens. Lui et ses deux associés, Assaf Hamo et Erez Navon, ont investi 15 millions de shekels dans le projet. Mais le trio se dit confiant et se prépare à un beau retour sur investissement. Et tout porte à croire qu’ils ont raison, car la Première Station semble bien être sur les rails pour devenir une réussite locale.