L’homme des Trois mondes

A l’occasion de Festival du Film Juif de Jérusalem, Emmanuel Chouraqui a diffusé un documentaire sur son père, André, l’”Homme des trois livres”. Portrait de cet écrivain, avocat, penseur et homme politique franco-israélien, le premier à avoir traduit les livres sacrés des trois grandes religions monothéistes

Chouraqui (photo credit: Claude Truong-Ngoc)
Chouraqui
(photo credit: Claude Truong-Ngoc)

"AndréChouraqui est un grand homme de nos deux pays. Il s’efforça d’oeuvrer toute savie pour l’alliance entre les peuples et pour l’alliance entre les religions,musulmane, juive et chrétienne.” C’est par ces mots que le Consul de France àJérusalem, Cyril Desagneaux, rendait hommage à celui que l’on surnomme le“Prophète d’amour et d’espérance”. Un discours prononcé à l’occasion ducolloque intitulé “Jérusalem mosaïque humaine : sur les pas d’André Chouraqui”,organisé par le Centre Romain Gary et qui s’est déroulé le 16 novembre dernierdans les locaux de la municipalité de Jérusalem.

André Chouraqui n’a cessé d’oeuvrer en faveur de l’unité universelle. Tour àtour homme de science, juriste, poète, traducteur, historien, essayiste, il n’ajamais renoncé à son oeuvre : unir les trois grandes religions monothéistes.
Né en 1917 à passe son enfance en Algérieoù il étudie la Torah. Puis s’installe en où il rejoint la Résistancedurant la Seconde Guerre mondiale. C’est en 1958 qu’il part s’installer enIsraël. Sept ans plus tard il est élu vicemaire de Jérusalem, ville quipassionne Chouraqui et inspire nombre de ses écrits.

Le “prophète de l’Alliance des Alliances”

Le dialogue inter-religieux est l’unedes priorités de l’écrivain, dont beaucoup soulignent le côté visionnaire.“D’une certaine façon, il incarnait le message du prophète”, souligne ainsiFrancine Kaufmann, traductrice et spécialiste de l’oeuvre d’André Chouraqui.“Il est le premier à avoir réuni toutes les confessions au sein de lamunicipalité de Jérusalem. Il a réussi l’exploit de faire s’asseoir à la tableronde de la municipalité des représentants des trois grandes religions :musulmane, juive et chrétienne ainsi que les minorités arméniennes ouafricaines”, poursuit-elle. “Il est l’incarnation du message des prophètes :bientôt, tous en semble à Jérusalem”.

Car Chouraqui avait fait de l’union et du dialogue entre les religions sonprincipal combat.
Le “Prophète de l’alliance des alliances” a ainsi créé la Fraternité d’Abraham,le 7 juin 1967 à la Grande Mosquée de Paris. Une structure qui a pour seulobjectif d’inciter au dialogue entre les trois religions abrahamiques.
Chouraqui voyage dans le monde entier pour donner des conférences dans plus de80 pays. Mais sa plus grande oeuvre reste la traduction de la Bible et du Coranen français. Le premier volume biblique paraît en 1987, en 26 volumes. Il esttiré du texte hébraïque dit massotérique, dont des parties avaient été publiéesà partir des années 1970. Un parti “parti pris révolutionnaire”, selon lesspécialistes de l’époque. “Il a mis en lumières l’importance des juives du christianisme et rappelé que Jésusappartenait au peuple juif”, explique ainsi Marc Leboucher, le premier à éditerle texte en .Puis l’auteur publie une traduction du Coran en 1990.

L’amant de Jérusalem

L’image d’André Chouraqui restera également liée àJérusalem. Celui qui officie comme adjoint au maire de la ville sous le mandatde Teddy Kollek, “était un homme immense qui a réussi à comprendre et às’imprégner de la tolérance, de l’esprit et qui était capable de comprendreJérusalem”, a ainsi estimé David Hadari, adjoint de l’édile actuel. “Beaucoupde ses idées sont à la base de l’harmonie qui existe aujourd’hui à Jérusalem.Ses visions et ses réflexions ont grandement aidé à faire en sorte que lestrois religions puissent vivre côte à côte aujourd’hui en Terre sainte.”.

“Il était l’amant de Jérusalem”, estime quant à lui Yehouda Lancry, ancienambassadeur d’Israël en .“Les Juifs, les Chrétiens, les Musulmans ont une chance de comprendre à traverslui, à travers son oeuvre, que le lieu du retour porte le nom de Jérusalem.Tous ses écrits tendent vers la réalisation de l’Alliance des alliances àJérusalem”.
L’oeuvre de Chouraqui est à l’image de sa vie : un message d’espérance. Il a suvaincre la maladie, faire du mélange des cultures une richesse, transformer ledéracinement en pèlerinage. Son histoire est l’histoire de la quête d’un hommequi s’est toujours interrogé sur le sens de la vie et n’a eu de cesse qued’oeuvrer pour que la foi rapproche les hommes au lieu de les diviser.
Chouraqui restera celui qui a pu et su rencontrer les représentants desreligions juive, musulmane et chrétienne. Celui qui aura oeuvré jusqu’à sa mortà l’âge de 90 ans, à la compréhension entre les peuples et les religions.
Un legs mis en lumière lors du documentaire de son fils, Emmanuel ChouraquiL’écriture des écritures.
A partir d’archives familiales, le fils fait revivre l’itinéraire du père,amoureux des langues et à la recherche d’une parole qu’il retrouve à Jérusalem.Un documentaire à l’image de l’homme : simple et oeuvrant pour la paixuniverselle entre les hommes et les religions.