Lumière sur un Homme de l’ombre

Raymond Aubrac, figure de la Résistance française, s’est éteint mardi 10 avril au soir

Raymond Aubrac (photo credit: Reuters)
Raymond Aubrac
(photo credit: Reuters)

Leshommages ont afflué mercredi 11 avril pour saluer la mémoire de Raymond Aubrac,mort la veille au soir, à l’âge de 97 ans à l’hôpital du Valde- Grâce à .

Dans un communiqué, l’Elysée a rendu hommage à “cette figure héroïque de laRésistance” et à son épouse Lucie Aubrac, décédée en 2007. “Ces héros del’ombre qui ont sauvé l’honneur de la , à un moment où ellesemblait perdue, disparaissent les uns après les autres”, pouvaiton lire. “Nousavons le devoir d’en maintenir le souvenir vivant au coeur de notre mémoirecollective.”

Né en juillet 1914 à Vesoul, de commerçants juifs aisés, peu pratiquants,Raymond Samuel - de son vrai nom - rejoint avec Lucie les rangs de laRésistance dès 1940. Le couple, qui deviendra mythique, participe à la créationdu mouvement Libération-Sud.
Sous divers pseudonymes dont celui d’Aubrac, Lucie et Raymond contribuent àfaire de Libération le mouvement de résistance le plus important en zone Sud,après le groupe Combat, fondé par Henri Frenay.
Les époux Aubrac, puisqu’il convient désormais de les appeler ainsi,appartiennent au noyau central du mouvement “non en vertu de nos mérites”,écrira plus tard Raymond, “mais comme souvent dans les organisationsclandestines, du fait du hasard, des contacts et de l’amitié.”
C’est ainsi qu’Aubrac a eu l’occasion de rencontrer tous les dirigeants deLibération-Sud, mais aussi Yves Farge de Franc-Tireur, Henri Frenay, de Combatou des envoyés de Londres, comme Yvon Morandat. Emmanuel d’Astier apprécie lestalents d’organisateur de Raymond Aubrac et durant l’été 1942, lui confie ladirection de la branche paramilitaire du mouvement qui vient d’être créée. 
 
Du hasard et quelques choix 
À partir de janvier 1942 et de l’arrivée en Francede Jean Moulin, Libération-Sud se trouve impliqué dans la démarched’unification des mouvements de résistance de la zone sud, aux côtés de Combatet de Franc- Tireur. L’Armée secrète est le nom donné au regroupement desbranches militaires des différents mouvements. Le commandement en est confié augénéral Charles Delestraint ; autour de lui, une sorte d’étatmajor quicomprend, entre autres, Aubrac.
En novembre 1942, la zone Sud est envahie par les Allemands, et les résistantssont pourchassés directement par la Gestapo, dirigée à par Klaus Barbie.
Mais c’est par la police lyonnaise qu’Aubrac est arrêté le 15 mars 1943. Puisrelâché. Le 24 mai, Lucie organise, avec la participation de son mari,l’évasion de l’hôpital de l’Antiquaille, de leurs compagnons Serge Ravanel,Maurice Kriegel- Valrimont et François Morin-Forestier.
Mais le 21 juin, Raymond est de nouveau arrêté. Cette fois-ci, par la Gestapo,à Caluire, avec Jean Moulin et d’autres participants d’une réunion destinée àrégler des conflits internes. Parmi les malheureux incarcérés : le Dr FrédéricDugoujon, leur hôte de la villa Castellane, Henri Aubry, du mouvement Combat,Bruno Larat, Lassagne, de Libération-Sud, le colonel Lacaze, du 4e bureau del’Armée secrète et le colonel Schwartzfeld, responsable du mouvement lyonnaisFrance d’abord.
Raymond Aubrac est emprisonné au fort Montluc de Lyon. Il s’évadera le 21octobre 1943, pendant son transfert de l’Ecole de santé militaire à la prison.A l’origine de cette périlleuse opération : Lucie, enceinte de leur deuxièmeenfant. Après cette évasion, le couple et leur fils Jean-Pierre entrent dans laclandestinité, de refuge en refuge. Ils parviendront à rejoindre Londres enfévrier 1944.
L’avocat et président de l’association des Fils et Filles de déportés juifs deFrance, Serge Klarsfeld, a salué le “dernier grand acteur et dernier grandtémoin” de la Résistance française pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans uncommuniqué, le PCF a de son côté rendu hommage à un couple qui restera “unesource inépuisable d’inspiration dans les combats pour l’émancipation, lajustice, la liberté, l’égalité et la fraternité.” Europe Ecologie-Les Vertsassure pour sa part vouloir “rendre vivant l’héritage qu’il nous a légué”.
 “C’était à la fois un grand-père très attentif, d’une insatiable curiosité, etqui avait les valeurs républicaines chevillées au corps”, a indiqué mercredison petit-fils Renaud Helfer-Aubrac, sur 1. “Pour lui, la liberté, l’égalité et la fraternité n’étaient pas de vainsmots. Bien au contraire”.
A la fin de sa vie, Aubrac militait au sein de l’Union juive française,organisation juive laïque, très à gauche, en faveur de la paix, de lareconnaissance, notamment, du droit au retour des réfugiés palestiniens et pourle retrait des colons israéliens de tous les territoires occupés.