L’échiquier suédois

2012 marque l’Année Wallenberg dans une Suède de plus en plus antisémite et dépassée par son immigration musulmane

Suedeantisem (photo credit: Reuters)
Suedeantisem
(photo credit: Reuters)

C’est indéniable, l’extrême droite gagne en popularité danstoute l’Europe. Et même en Suède.

Pourtant, cette année, le gouvernement suédois a décidé de commémorer lecentenaire du diplomate Raoul Wallenberg, celui qui a sauvé des dizaines demilliers de Juifs de la Shoah. Aucun autre Suédois n’a bénéficié d’autant debâtiments, rues et sites à son nom, et pour cause. Le “Juste parmi les nations”est aussi le seul non-Juif de son pays qui s’est vu attribuer une citoyennetéisraélienne honorifique, décernée à titre posthume en 1986.
2012 sera donc l’année où ses actions seront commémorées et les valeursréfléchies par son courage encensées. Comme la secrétaire d’Etat américaineHillary Clinton et ministre des Affaires étrangères suédois, Carl Bildt, l’ontécrit dans un éditorial commun du New York Times, “se souvenir de la vie et del’oeuvre de Raoul Wallenberg, c’est réaffirmer notre aspiration commune àl’entente morale et à la justice.”
La Suède n’a pas été épargnée par les vents d’extrême-droite qui ont souffléd’une force intimidante à travers le continent ces dernières années.
Avec l’entrée d’un parti d’extrême- droite - les Démocrates de Suède - auparlement et le nombre croissant de crimes haineux contre les Juifs, les Romset d’autres groupes vulnérables, la Suède n’a désormais plus l’image d’unrefuge pour les populations en quête d’ouverture et de tolérance.

Les crimes motivés par une haine antisémite sont à la hausse, et comme en Franceet en Grande-Bretagne, la violence et le harcèlement résultent sans conteste del’immigration en provenance du monde musulman. Et tout comme dans d’autresrégions d’Europe occidentale, il y a un déséquilibre entre les deux groupes :la guerre à Gazaa engendré une forte hausse des crimes de haine antisémite, alors que zéroattaque juive a été recensée à l’encontre des Musulmans.

Dans la capitale, Stockholm,cet antisémitisme importé n’a pas encore opéré de changements dramatiques dansla vie juive, pour des raisons essentiellement géographiques. Les immigrantsoccupent majoritairement la banlieue, tandis que l’activité juive estconcentrée dans le centre-ville. Le seul grand magasin casher de Stockholm, sonunique synagogue et son centre culturel juif sont situés dans le quartier desaffaires de la capitale.
Malmö, berceau de l’islamisme

A Malmö, la situation est tout autre. En 2004, lenom le plus fréquemment donné aux nouveaux-nés mâles était Mohammed, et parmiles adolescents de 15 ans, les Suédois d’origine sont aujourd’hui en minorité.

Contrairement à Stockholm,ces changements démographiques ont des répercussions sur la vie urbaine, etsurtout sur le quotidien des 1 500 Juifs de Malmö.
Pour exemple, les Juifs ne scandent plus de slogans ni ne brandissent despanneaux dans leurs fréquentes manifestations contre l’antisémitisme. Ilsportent simplement kippot et Maguen David. Marcher en ville en tant que Juifest ainsi devenu un acte de résistance en soi.
Le niveau accru de menaces contre les Juifs de Malmö coïncide avec une périodeoù la ville est dévastée par une violence féroce et des coups de feu mortelsdans ses zones suburbaines. Une situation symptomatique de la détérioration desconditions de vie et des espoirs déçus des jeunes vivant dans des zoneslargement peuplées d’immigrants et de réfugiés en provenance des pays arabes etmusulmans.
Un nombre effrayant d’élèves peinent à obtenir la moyenne dans les matières debase que sont le suédois, l’anglais et les mathématiques à leur sortie del’école élémentaire.
L’aliénation est indéniable, et son rapport avec le fanatisme indiscutable.
Devant le nombre étonnamment élevé de Musulmans en Suède, l’incapacité dugouvernement à relever les défis de l’immigration doit être examinée.
Mais le sujet de la recrudescence de l’antisémitisme et son imbrication avec lapolitique radicale islamiste et l’extrême droite est étonnamment tu. La sociétése cache-t-elle les yeux, ou est-ce ce satané politiquement correct quiinterdit toute critique des Musulmans et autres groupes d’immigrants ? Ouencore, la question même dissimule-t-elle la peur lancinante d’être scruté à laloupe de la rectitude politique ? On reconnaît là la position passive et lâchequi est cellede l’establishment de gauche de Suède, une faction qui clame haut et fort soninquiétude devant les tendances antidémocratiques de l’Etat, sans pour autantoser les affronter.
Au lieu d’admettre le fait qu’un pays ouvert à l’immigration doit être capablede surmonter les problèmes qu’elle suscite, les politiciens semblent frileuxdevant toute tentative de dialogue sur la question.
Les politiciens démocratiquement élus deviennent-ils des proies faciles pourleurs chers collègues non démocratiques, et pas moins démocratiquement élus ?Le refus des parlementaires suédois des deux bords d’avoir quelque rapport quece soit avec leurs homologues Démocrates de Suède ne semble pas une tactiqueintelligente.
L’extrême droite n’existe tout simplement pas à leurs yeux, et pire encore, lescauses de cet extrémisme non plus. Au lieu d’être la société accueillante quifait la réputation de la Suède, l’exclusion est devenue le maître mot, dans laconjoncture sociale ainsi qu’au sein des partis politiques.
Les perspectives de persécution, la xénophobie et l’antisémitisme semblent seconfirmer.
Faire front devant le visage de la folie

Commémorer les Justes parmi lesnations qui ont sauvé des dizaines de milliers de Juifs est certainement noble,et l’Année Raoul Wallenberg mérite louanges. Si ses actes héroïques servent ànous rappeler que la moindre manifestation de courage civil peut faire ladifférence dans notre combat contre ce qui menace nos libertés et droitsfondamentaux, enseigner ce sombre chapitre et renforcer la consciencehistorique peuvent simplement ne pas suffire.

Lorsque Raoul Wallenberg, debout sur le toit d’un compartiment de train sousune grêle de balles allemandes, remettait les laissez-passer suédois aux Juifsde Budapest, sa conviction en la justesse de son action découlait du diabolismequi l’entourait.
Raoul Wallenberg a su faire front devant le visage de la folie. Sisoixante-cinq ans après sa mort, l’effusion de sang résultant del’antisémitisme a cessé, la folie qu’elle renferme a pris la forme d’uneintolérance et une hostilité sans cesse grandissantes.
Tandis que le gouvernement suédois a endossé le noble projet de promotion et dediffusion de l’oeuvre de Wallenberg, l’extrême droite grimpe en Suède etpartout en Europe. L’aliénation dans des zonesdéjà en difficulté, porteuse de désespoir et de bigoterie, devient troublante,et rend de plus en plus envisageable l’éventualité d’une union entre le réseauislamiste fanatique et l’extrême-droite.
Espérons que 2012 démentira mes propos, sinon l’investissement dans l’AnnéeRaoul Wallenberg sera de l’argent jeté par les fenêtres.

Avec Paulina Neuding

Emelie Laurin est uneétudiante diplômée en relationsinternationales basée à Vienne.

Paulina Neuding est avocateet rédactrice en chef dujournal de centre-droite suédoisNeo.