A but lucratif

Le Hamas est une gigantesque entreprise commerciale, en faillite et corrompue, avec un chiffre d’affaires d’un milliard de dollars, versés en pots-de-vin

A but lucratif (photo credit: REUTERS)
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Le Hamas est une organisation terroriste. Dans sa charte datant de 1988, à l’article 7, on parle d’un « Jour du Jugement », où « les pierres et les arbres diront : ô Musulmans il y a un Juif derrière moi, venez le tuer ». L’article 22 attribue quant à lui aux sionistes la révolution française et la révolution russe, le colonialisme et les deux guerres mondiales. Et il y a fort à parier que le réchauffement planétaire viendra bientôt s’ajouter à cette liste. Enfin, l’article 32 cite le Protocole des Sages de Sion, dont on sait depuis longtemps qu’il a été fabriqué de toutes pièces.
Ce que l’on sait moins, c’est que le Hamas est aussi une gigantesque entreprise commerciale, en faillite et corrompue, avec un chiffre d’affaires d’un milliard de dollars versés en pots-de-vin, des patrons de la pègre et des opérations massives de blanchiment d’argent.
L’une des causes directes des attaques de roquettes lancées contre Israël par le Hamas est la faillite de l’entreprise Hamas Inc. Les Etats et organismes qui ont financé le Mouvement lui ont permis de réaliser l’incroyable réseau de tunnels creusés à Gaza, de mettre sur pied les fabriques de roquettes et de réunir l’arsenal dont il dispose. Ils ont donc au moins une certaine responsabilité dans le tragique nombre de morts et de blessés causés de part et d’autre de la frontière de Gaza.
Le 15 septembre 2008, quand la société Lehman Brothers dépose le bilan, son directeur général Richard Fuld a des mots très durs à l’égard du Trésor américain, qui refusait son aide financière pour sauver la compagnie du naufrage. Le Hamas, lui, s’est mis à lancer des roquettes. Et ses bailleurs de fonds au Qatar, en Turquie et en Iran ont aussitôt mis la main à la poche. Cela fonctionne à tous les coups ou presque.
Les services de renseignements de l’armée israélienne affirment avoir intercepté des communications du Hamas parlant de la « guerre de juillet » plusieurs mois avant le début du conflit. C’était la guerre ou la faillite. Le Hamas a choisi la guerre.
Le Hamas s’est retrouvé dans le rouge
« Les histoires d’argent sont à l’origine de tout », dit-on. Je ne suis pas toujours d’accord avec cet aphorisme, mais dans le cas présent, je l’approuve, et voici pourquoi.
Qu’est-ce qui a provoqué la grave crise financière du Hamas ? C’est ce que les économistes appellent un « choc externe » : un changement aussi radical qu’inattendu dans le climat économique général.
Pour commencer, le Hamas a perdu le fervent soutien politique et l’aide concrète de l’ex-président égyptien Mohamed Morsi, un islamiste déposé il y a un an par son ministre de la Défense, aujourd’hui président, Abdel Fattah al-Sissi. Depuis, l’Egypte s’est attachée à détruire de façon systématique tous les tunnels de contrebande existant entre le Sinaï et Gaza, source majeure de revenus du Hamas.
Ensuite, le soutien apporté par le Hamas aux rebelles islamistes en Syrie lui a coûté un allègement des financements venus de l’Iran, lui-même allié du président Bashar el-Assad. Avant 2011, 80 % de l’aide financière iranienne allait directement à l’aile militaire du Hamas, puis, du jour au lendemain, l’Iran a cessé de signer les chèques. Dès lors, le Qatar et la Turquie ont pris le relais dans une certaine mesure.
Ainsi le Hamas s’est-il retrouvé dans le rouge. Ses 40 000 fonctionnaires, dont 60 % sont des policiers et des militaires, ont continué à travailler, mais l’argent nécessaire au paiement de leurs salaires s’est évaporé. Après la formation du gouvernement d’unité palestinien entre le Fatah et le Hamas, le 2 juin dernier, le président de l’Autorité palestinienne (AP) Mahmoud Abbas a réglé les salaires des 70 000 employés de l’AP à Gaza, mais s’est abstenu de payer ceux des 40 000 du Hamas. Une décision prise sous la pression américaine…
Résultat : une grande agitation à Gaza, dont un violent épisode devant un distributeur automatique de billets : des employés du Hamas privés de salaires en sont venus aux mains face à des gardes armés, qui ont riposté en faisant feu, tuant plusieurs personnes.
Quoi de mieux qu’une petite guerre ?
Le Hamas en faillite avait donc désespérément besoin que l’on vienne renflouer ses coffres. Durant ses belles années, affirment certaines sources, l’entreprise Hamas Inc. dépensait jusqu’à un milliard de dollars par an, et voilà qu’elle se retrouve à présent avec un déficit de 700 millions de dollars. Dans ces conditions, quoi de mieux qu’une petite guerre ? Il y aura des victimes ? Et alors ? De toute façon, les chefs militaires seront à l’abri dans les sous-sols et la direction politique, elle, vit dans l’opulence entre Doha, le Qatar et Le Caire.
Avant sa crise financière, comment Hamas Inc. s’y prenait-il pour payer ses soldats et sa police et financer usines de roquettes et construction des tunnels ?
Avant ses déboires économiques, le Hamas dirigeait à Gaza une gigantesque entreprise extrêmement rentable. « Au cours de ses 27 ans d’existence », écrit Shouki Sadeh, journaliste au quotidien économique The Marker, « le Hamas a manifesté autant de compétences dans le domaine financier qu’en matière militaire ». Pour ma part, je dirais qu’il était beaucoup plus doué dans ce premier domaine.
Quand, en 2007, le Mouvement a confisqué par la force le pouvoir à l’OLP dans la bande de Gaza, son budget annuel s’élevait à 150 millions de dollars. Cinq ans plus tard, il se montait à 1 milliard. Cela représente une augmentation moyenne de 46 % par an. Même Lehman Brothers n’a jamais fait aussi bien ! Une croissance digne d’un cas d’étude dans la revue économique de Harvard…
Le Hamas prélève des taxes « sur tout ce qui bouge », depuis les taxes d’importation sur les voitures passées en contrebande (25 %) jusqu’aux stands de falafels : taxes sur l’eau, sur les enseignes des commerces et sur les bus des transports en commun. Avant l’initiative de destruction lancée par le président Sissi, le Hamas gérait quelque 1 200 tunnels de contrebande qui passaient sous la frontière égyptienne et encaissait grâce à eux 600 millions de shekels (environ 175 millions de dollars) de profits annuels.
L’organisation a ainsi amassé des fortunes en faisant passer du carburant venu d’Egypte. Dans ce pays, l’essence, largement subventionnée, ne coûte que 1,6 shekel le litre. Le combustible, acheté en Egypte et acheminé à Gaza, était taxé non moins de 3 shekels le litre. Or, la seule alternative pour les habitants de la bande de Gaza était le carburant importé d’Israël, vendu au prix inabordable de 7,6 shekels le litre. Une poignée de gros bonnets de Gaza ont bâti leur fortune sur ce seul trafic.
Les barons du Hamas
Les tunnels de contrebande étaient de pures entreprises privées et leurs propriétaires veillaient à entretenir de bonnes relations avec le Hamas moyennant force pots-de-vin. Ils sont une poignée à avoir amassé ainsi des sommes considérables. A l’origine, le Hamas a réussi à prendre le pouvoir à Gaza en basant sa campagne sur la promesse de mettre fin à la corruption et d’apporter une alternative « propre » à la gestion du Fatah. Or, depuis leur arrivée, les barons du Hamas sont devenus bien plus riches que ne l’ont jamais été leurs prédécesseurs du Fatah.
Parmi eux, figure le grand patron du Hamas à Gaza, Ismaïl Haniyeh, ex-bras droit de Ahmed Yassin, fondateur du Hamas. Fils de réfugiés vivant misérablement dans le camp de Shati, Haniyeh aurait, à en croire le magazine égyptien Ruz al-Youssouf, acquis pour 4 millions de dollars un terrain de 2 500 m2 dans une banlieue chic de Gaza. Mais le lot a été inscrit sous le nom de son gendre. D’où Haniyeh tenait-il une telle somme ? Durant l’âge d’or où Morsi régnait en Egypte, les villas à Gaza se vendaient au prix moyen d’1 million de dollars, et la plupart des acheteurs appartenaient au Hamas.
Autre baron du Hamas fabuleusement riche, Khaled Meshaal, chef de la branche politique, actuellement installé dans un hôtel cinq étoiles de Doha, au Qatar. Au fil des ans, les bailleurs de fonds de Meshaal se sont succédé à un rythme soutenu. Il en changeait toutes les quelques années : ainsi s’est-il retrouvé successivement basé au Koweit, en Jordanie, puis en Syrie, avant d’être expulsé de chacun de ces pays, et il s’est finalement installé au Qatar.
Meshaal apparaît comme un magicien de la levée de fonds, sachant qu’à chaque fois, ses doigts collants retiennent une certaine part des sommes encaissées. Il se murmure en Jordanie que sa fortune s’élève à 2,5 milliards de dollars. Un chiffre sans doute exagéré, mais ses élégants costumes sur mesure prouvent tout de même que cet homme n’est pas dans le besoin. Meshaal, sa femme et son fils posséderaient à Doha un immense complexe de quatre tours abritant un grand centre commercial. Et depuis le début du conflit à Gaza, les communiqués enflammés qu’adresse Meshaal à la presse sont tous délivrés dans des décors luxueux ou autour de repas gastronomiques raffinés.
80 000 dollars le tunnel
D’où viennent les quantités considérables de béton qu’a utilisé le Hamas pour construire son gigantesque réseau de tunnels ? Ceux destinés aux attentats, ceux qui abritent le commandement militaire et ceux qui servent à la contrebande, bref, sa quasi-ville souterraine ?
Je vis à Haïfa et passe chaque jour dans les tunnels du Carmel : deux boyaux parallèles de 8,6 km creusés sous le mont Carmel par 600 ouvriers chinois et reliant l’entrée Sud de Haïfa à sa sortie Nord en quelques minutes. Treize ans se sont écoulés entre la délivrance du permis de construire, en 1997, et leur ouverture officielle, le 1er décembre 2010. Un coût de construction estimé à 1,25 milliard de shekels (environ 365 millions de dollars), une merveille d’ingénierie…
Hier, en traversant ainsi Haïfa, j’ai pensé aux tunnels du Hamas à Gaza : des kilomètres et des kilomètres de tunnels ont coûté des sommes considérables et ont été creusés en bien moins de temps que ceux de Haïfa, avec un ciment de haute qualité détourné de sa destination initiale – la construction de logements – au nez et à la barbe d’Israël et du monde entier. Toute cette énergie, toutes ces compétences techniques et tout cet argent (des quantités astronomiques d’argent) pour arriver où ?
Doron Paskin explique en détail sur Ynet, le site Internet de Yediot Aharonot, l’aspect économique de la construction des tunnels du Hamas. Il prend l’exemple d’un tunnel de 2,5 km découvert en 2013 par les ingénieurs d’une unité de combat de Tsahal à Khan Younès, au sud de la bande de Gaza. Ce tunnel était constitué de 25 000 blocs de ciment, équivalent à un poids de 800 tonnes. Sur le marché mondial, une tonne de ciment coûte 100 dollars ; à lui seul, ce tunnel a donc coûté au moins 80 000 dollars. Or il existerait plus d’un millier de tunnels de ce genre, et beaucoup d’entre eux ont déjà été détruits.
Le précédent conflit entre Israël et le Hamas ayant engendré des destructions considérables, une forte demande de béton s’est ensuivie à Gaza. Des blocs de ciment de grande qualité ont alors été livrés par la Turquie au port égyptien d’el-Arish, puis transportés par camions jusqu’aux tunnels de contrebande. A une certaine époque, 4 000 tonnes de ciment étaient acheminées chaque jour de cette façon, sous l’œil complaisant de l’Egypte de Morsi, soit une valeur de 400 000 dollars.
Le Hamas, qui contrôlait le marché du ciment, détournait ces camions à l’arrivée pour construire ses tunnels : un ciment jaune de qualité médiocre était acheminé vers les sites de construction de logements, après emballage préalable dans des sacs turcs. Toutefois, personne n’était dupe. Selon Paskin, les constructeurs de Gaza se seraient même arrêtés de travailler au bout d’un moment, en raison de la médiocrité des matériaux dont ils disposaient. On peut même se demander si les énormes destructions causées par les bombardements actuels à Gaza ne sont pas dues en partie aussi à la mauvaise qualité de ce ciment.
Et le Qatar, dans tout ça ? Il y a deux ans, Israël a laissé le Qatar financer un projet de reconstruction de 400 millions de dollars à Gaza. Le contrat prévoyait d’autoriser l’Egypte à envoyer à Gaza du ciment venu de l’un de ses plus gros entrepreneurs en bâtiment. A peine ce dernier a-t-il pénétré à Gaza que le Hamas s’en est emparé et le projet immobilier du Qatar a traîné en longueur par manque de ciment, alors même que les données officielles montraient que l’Egypte en avait envoyé plus qu’il n’en fallait, et spécifiquement pour ce projet. Où les matériaux avaient-ils disparu ? Il ne faut pas être grand clerc pour le deviner.
Cette anecdote illustre bien le dilemme d’Israël : comment permettre à Gaza de se reconstruire sans que le Hamas ne détourne à des fins terroristes les ressources envoyées ?
Les bailleurs de fonds du Mouvement
Comment l’Amérique aide-t-elle, à son insu, à financer le Hamas et d’autres groupes terroristes ?
Selon le ministère de la Justice américain, le plus grand groupe de soutien d’Amérique au Hamas et aux Frères musulmans est le CAIR (Council on American-Islamic Relations), basé à Washington. Le CAIR a obtenu le statut officiel d’organisation caritative décerné par le gouvernement américain, qui le lui a cependant retiré depuis. Il gérait manifestement un réseau criminel de blanchiment d’argent à l’échelle internationale et versait au Hamas et à d’autres groupes terroristes des dons déductibles d’impôts.
L’an dernier, un réseau de trafic lié au terroriste Omar Abdel-Rahman a été découvert à New York. Selon des sources gouvernementales citées par le Huffington Post, plus d’un million de cartouches de cigarettes non taxées avaient été introduites dans la ville et les bénéfices des ventes versés à des groupes terroristes. Abdel-Rahman purge actuellement une peine de prison à vie pour conspiration en vue de perpétrer des attentats terroristes contre les grands symboles de New York.
La Chine, apparemment, n’est pas en reste. L’Agence de sécurité israélienne (le Shin Bet) a révélé en mars 2012 que des sommes déposées en liquide sur des comptes de la Banque de Chine se sont retrouvées entre les mains d’activistes du Hamas en Judée-Samarie, en guise de dédommagement pour le temps qu’ils avaient passé en prison. Un procès intenté contre la même Banque de Chine par une famille juive de New York dont le fils était mort dans un attentat du Hamas à Tel-Aviv, en 2006, a été maintes fois reporté, dit-on, pour ne pas embarrasser les autorités chinoises.
La divine providence a joué un sacré tour à notre planète : elle a donné les plus importantes réserves de gaz naturel de la planète aux trois plus grands fauteurs de troubles du monde : la Russie, l’Iran et le Qatar (seule la Corée du Nord n’a pas eu cette chance). Avec à sa tête un individu obsédé par le pouvoir, la Russie déstabilise l’Ukraine et ruine son économie (et la sienne) par la même occasion. L’Iran, conduit par son « chef suprême », caresse des ambitions nucléaires qui ont là encore décimé toute son économie en suscitant des sanctions internationales à son encontre et en stimulant et finançant le terrorisme international. Mais qu’en est-il du Qatar ?
Le Qatar, petit pays dans la cour des grands
Avec Doha, le Hamas Inc. possède un puissant allié stratégique. Ce pays minuscule, dont la superficie équivaut à la moitié de l’Israël d’avant 1967, compte à peine 278 000 habitants qui jouissent d’un PIB par habitant de 100 000 dollars (le plus élevé du monde). Auprès de ces privilégiés, 1,5 million d’étrangers travaillent dans des conditions proches de l’esclavage, certains ne gagnant que 85 cents par jour. Malgré sa petite taille, le Qatar joue dans la cour des grands et tire les ficelles avec une diabolique habileté.
Pour preuve, le 26 juillet dernier, le secrétaire d’Etat américain John Kerry a rencontré à Paris les ministres des Affaires étrangères de France, d’Allemagne, de Grande-Bretagne, de Turquie et du Qatar. Il espérait que la Turquie et le Qatar, principaux soutiens du Hamas, accepteraient d’user de leur influence sur la branche armée de celui-ci et aideraient à mettre ainsi un terme à l’effusion de sang. Cela ne s’est pas fait. En revanche, Kerry est arrivé à rapprocher Israël, l’Egypte et l’AP : aucun des trois n’avait été invité à Paris et ils se sont agacés de cet affront inepte.
« Le Qatar est le premier pourvoyeur de fonds du terrorisme », disait récemment l’ex-président israélien Shimon Peres. 12 000 hommes à peine composent son armée, mais il détient un septième des réserves de gaz mondiales connues, soit 25 000 milliards de mètres cubes totalisant une valeur de 2 400 milliards de dollars au cours actuel, et trois fois plus quand les cours étaient au plus haut, en 2008. Avec les révoltes du printemps arabe qui éclatent tout autour, le souvenir de la violente agression de Saddam Hussein contre le Koweït voisin et son pétrole, les travailleurs immigrés qui commencent à s’agiter et sont 5 fois plus nombreux que les Qataris, et un despote moyenâgeux qui défie l’évolution des peuples vers la démocratie, il faudrait être bien intrépide pour vendre une assurance-vie au Qatar.
Ainsi, pour survivre, pour rester du bon côté des dangereux groupes terroristes qui pourraient sans peine le déstabiliser, le Qatar a élaboré la très habile stratégie des 3-M : Media, Money, Mediation (médias, argent, médiation).
Habile et opportuniste
Médias : la chaîne de télévision Al-Jazeera, financée par le Qatar, diffuse des informations pro-islamistes dans le monde entier en arabe et en anglais. Un porte-parole du gouvernement israélien y a récemment été interviewé en arabe ; face au comportement agressif de la journaliste, qui s’était mise à crier, il a demandé si c’était bien à une journaliste qu’il était en train de parler, et non pas à un membre du Hamas.
En mars dernier, les trois Etats voisins, Arabie Saoudite, Emirats Arabes Unis et Bahreïn, ont rappelé leur ambassadeur, reprochant au Qatar de soutenir les Frères musulmans dans leurs pays, notamment à travers Al-Jazeera, qui encense les mouvements pro-démocratiques dans les autres nations arabes, mais s’abstient de faire de même pour ce qui est du Qatar. Celui-ci est dirigé par la famille Al Thani depuis 150 ans. En 2013, l’émir cheikh despote Hamad ben Khalifa al-Thani a abdiqué au profit de son fils, Tamin, un peu comme un père de famille tendrait à son fils les clés de la voiture familiale.
Argent : le Qatar possède des réserves financières infinies. L’Autorité des investissements du Qatar gère quelque 200 milliards de dollars. Ses tentacules se sont étendus partout : elle a investi par exemple dans Sainsbury’s (deuxième chaîne de supermarchés de Grande-Bretagne), Harrods (Londres), Total, Porsche, Volkswagen, le club de football Paris Saint-Germain et le FC Barcelone.
Bien avant que les soldats israéliens ne pénètrent dans Gaza pour détruire les tunnels, le Qatar a acheté quelque 11 milliards de dollars d’armement aux Etats-Unis (hélicoptères de combats Apache et missiles Patriot). Il accueille par ailleurs sur son sol la plus grande base militaire américaine du Moyen-Orient, située à quelques kilomètres de l’hôtel où loge le chef du Hamas Meshaal. On comprend pourquoi Kerry aime tant le Qatar…
Médiation : la politique étrangère du Qatar est habile et opportuniste. Le Qatar est l’un des principaux acteurs à l’origine de la chute de Mouammar Kadhafi en Lybie. Les négociations de l’Organisation mondiale du commerce se déroulent actuellement à Doha. Et le Qatar a même réussi à obtenir l’organisation de la Coupe du monde de football 2022, malgré la chaleur de 40 °C qui règne en juillet, manifestement (à en croire la presse britannique) moyennant d’impressionnants pots-de-vin.
A ces particuliers au cœur tendre…
Si l’argent apparaît comme un problème dans le dernier round du conflit à Gaza, ne pourrait-il pas faire aussi partie de sa résolution ?
Oui, sans doute, mais hélas, il est peut-être trop tard. Car beaucoup d’erreurs ont été commises.
En 2006, le Premier ministre israélien Ariel Sharon décidait qu’Israël achèterait son gaz naturel à l’Egypte, et non à Gaza. Si Israël avait plutôt aidé British Gas à développer les vastes gisements situés au large de Gaza en signant des contrats d’achat, cet argent-là aurait certes pu financer les tunnels et les roquettes du Hamas, mais qui sait, il aurait également pu contribuer à relever le niveau de vie des habitants, ce qui les aurait alors dissuadés de prendre le risque de faire la guerre. Nous ne le saurons jamais. Toujours est-il que les djihadistes basés dans le Sinaï ont fait sauter plusieurs fois les gazoducs reliant l’Egypte à Israël, au point que l’Egypte a fini par se lasser de les réparer. Ironiquement, il se pourrait bien que, dans un avenir proche, Israël exporte vers l’Egypte le gaz de ses gisements méditerranéens.
Gaza est une boule de nerfs qui vit des subsides de l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient). L’UNRWA reconnaît volontiers que beaucoup de ses employés font partie du Hamas. Avec un taux de chômage supérieur à 40 % chez les jeunes de Gaza, le Hamas n’a guère de mal à trouver de la main-d’œuvre pour creuser ses tunnels et à recruter des combattants. Si Israël avait trouvé un moyen d’employer des milliers de jeunes de Gaza dans la construction et l’agriculture, comme c’était le cas autrefois, tout serait peut-être différent à l’heure qu’il est.
Israël peut reconnaître ses torts dans l’extrémisme meurtrier devenu endémique à Gaza. Mais la même chose est vraie pour les Etats-Unis, l’Europe, le Qatar, la Turquie, l’Iran, ainsi que les milliers de particuliers au cœur tendre persuadés d’envoyer de l’argent aux malheureux Palestiniens de Gaza sans imaginer une seconde remplir en réalité les coffres de Hamas Inc.
L’auteur de cet article est chercheur à l’Institut S. Neaman du Technion de Haïfa.
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