Galatz à la croisée des ondes

Les services de radiodiffusion militaires existent dans bon nombre de pays. Et tous partagent le même dilemme : comment servir les intérêts de l’armée sans perdre leur crédibilité devant un public coutumier de la radiodiffusion civile.

Galatz croisee des ondes (photo credit: Reuters)
Galatz croisee des ondes
(photo credit: Reuters)
Au Royaume-Uni, les British Forces News comprennentà l’heure actuelle trois stations de radio, diffusées dans 23 pays, ainsi quedeux chaînes de télévision par satellite captées dans 17 pays. Les AmericanForces Network totalisent 10 stations, dont sept de musique, deux de sport etune d’informations générales / débats / sport, qui émettent dans le mondeentier : 800 stations en fonction des fuseaux horaires. Le a luiaussi ses Forces canadiennes de radio et de télévision.
Et, en Israël, nous avons Galei Tsahal (radio de l’armée), ou communémentappelée , et sa dose de problèmes.
, digne héritière des transmissionspré-étatiques clandestines de la Hagana, est née en septembre 1950. Mais cen’est que lors de la guerre de Kippour en 1973, qu’elle commence à émettre24h/24.
En 1993, Galei Tsahal s’étoffe d’une station “light”, Galgalatz, qui diffuse dela musique non stop, entrecoupée de bulletins de circulation. n’est pas indépendante, mais régulée par la loi, depuis 1956 et placée sousl’autorité de concurrent, l’Autorité civile de radiodiffusion israélienne,Reshout Hashidour (ou sous son patronyme anglais IBA).
Le Paragraphe 48 de la loi de l’IBA stipule que l’Autorité doit superviser “laprogrammation non militaire” de Galatz. À l’époque, nos législateurs n’avaientpas imaginé que la station de l’armée allait devenir la concurrente directe dela station Reshet Bet de l’IBA.
Et n’avaient pas prévu que près de 50 ans plus tard, la loi ne serait pasencore vraiment appliquée pour la bonne raison que l’IBA n’a jamais rempli sonobligation de rédiger les grandes lignes de la législation. Conséquence :aucune supervision publique réelle ou effective sur la station de radio del’armée, pourtant très présente dans la vie civile.
Contrairement à ses homologues étrangers, monopolise quasiment l’industrie de l’“infodivertissement” d’Israël.
Elle recrute chaque année près de 40 soldats pour une mission de trois ans quieffectuent diverses tâches journalistiques.
Après quoi, nombre d’entre eux investissent le marché de l’infodivertissement,et en deviennent souvent ses pontes. est l’école la plus prestigieuse et influente de journalisme en Israël.
Mais ne nous y trompons pas : la station n’est pas dirigée par des soldats. Sesprincipaux programmes sont présentés par des professionnels civils, des “stars”qui recevraient supposément des salaires élevés (refuse de révéler leur montant exact). Ce sont eux qui donnent le ton etdécident de tout ce qui est diffusé sur .Les soldats recrutés, constituent, eux, une main-d’oeuvre bon marché, auxpetits soins des stars de la station, qui elles dirigent les principauxtalk-shows et les journaux d’informations.
Ashkénaze, de centre-gauche et laïque
Au fil des ans, le contenu militaire dela station s’est réduit. Aujourd’hui, elle est pratiquement la jumelle deReshet Bet.
D’autre part, aucune difficulté à définir sa véritable tendance : ashkénaze, decentregauche et laïque.
Les émissions du matin débutent avec Micha Friedman, qui, bien que présentateurde nouvelles, a du mal à dissimuler à son auditoire ses penchants politiques.Puis c’est au tour de Razi Barkai. L’an dernier, dans un vote ouvert initié par’sMedia Watch, il avait été élu par le public “personnalité de radio la plusirritante”. Ensuite, vient la seule émission de radio équilibrée, “HamilaHaaharona” (le dernier mot), qui oppose la gauche à la droite. Puis à midi, lesauditeurs ont droit à deux heures de Yaël Dan, qui n’essaie même pas de simulerun semblant de neutralité.
Vous l’aurez compris, aucun pluralisme dans une structure qui devrait pourtantreprésenter l’armée du peuple.
Est-ce dans le meilleur intérêt de l’armée ? Neni, à en croire les adeptes dugroupe Facebook MyIsrael (Yisrael Sheli). Dans un récent débat animé de lacommission économique de la Knesset, Yisrael Sheli a fait venir des officiersde réserve qui ont déploré avoir entendu sur Galatz, durant une brève permissionlors de la seconde guerre du Liban, que leur combat n’était pas forcémentjustifié. La station avait même jugé bon d’interviewer des ennemis palestinienset arabes d’Israël, au lieu de remonter le moral des troupes parties se battre.
Selon les termes de Razi Barkai, “la station n’est pas le déodorant del’armée”. Mais au fil des ans, c’est bien la justification d’une radiomilitaire que les gens, de droite comme de gauche, remettent en question.
Comment ne pas voir la contradiction inhérente entre le journalisme, qui exigeune pleine liberté d’opinion et l’accès libre à l’information, et l’armée, qui,presque par définition, doit garder certaines informations confidentielles etne peut se plier aux normes journalistiques.
Il existe un autre grave problème dans le processus de recrutement de soldats.Seuls les non-combattants sont autorisés à faire leur service dans la station.Cette discrimination porte atteinte au journaliste en herbe qui pourrait aussiêtre idéaliste, en bonne santé et suffisamment solide pour servir dans uneunité combattante. Un tel soldat se verra refuser son entrée à l’école dejournalisme la plus prestigieuse de son pays.
En fait, les recrues sont en grande partie des Ashkénazes, de la région ducentre d’Israël (“rue Shenkin, Tel-Aviv”) et laïques.
La périphérie, les orthodoxes et les minorités sont assurémentsous-représentés.
La station appartient à l’armée et aux soldats
Voilà un tableau bien sombrepour le nouveau directeur, Yaron Dekel, dont la nomination a été annoncée le 12février.
Dekel est un journaliste professionnel. Il a commencé sa carrière à Galatz, esttitulaire d’une maîtrise en communications et sciences politiques (summa cumlaude) de l’université Bar-Ilan et a suivi des cours de perfectionnement dansles universités du et d’Oxford. Ces 20 dernières années, il occupait divers postes de direction àl’IBA.
L’opportunité lui est offerte de créer un changement réel à la station del’armée, qui doit se doter d’une supervision publique et d’un commissaire d’éthiqueindépendant.
Dekel aura-t-il la clairvoyance et le leadership pour l’accepter ? Les “stars”doivent partir ; la station appartient à l’armée et aux soldats, et non auxprofessionnels qui l’utilisent pour se remplir les poches et faire avancer leurspropres objectifs.
Le processus de sélection doit subir une vraie révolution. Au lieu de se voirfermer ,les combattants doivent au contraire être accueillis à bras ouverts - aprèstout, ils comprennent mieux l’armée que les non-combattants.
Tout comme dans d’autres unités de l’armée professionnelle, devrait exiger une à deux années de classes, avant les trois ans dans lastation, où ils recevront en partie un salaire.
devrait éviter au possible d’avoirrecours à la publicité pour couvrir son budget. Une station de radio publiquene doit pas fournir de concurrence déloyale au secteur privé, sans parler dufait que le service obligatoire pour les soldats ne doit pas inclure d’activitééconomique de quelque nature que ce soit.
La vérité c’est qu’aujourd’hui, est unluxe qu’Israël ne peut s’offrir. Rien de ce qu’elle fournit ne peut êtrecouvert par le secteur privé. L’Etat juif n’a pas besoin de deux stations deradio publiques nationales.
Mais l’influence des anciens de est siforte que même ministre de la Défense, Ehoud Barak, ne peut l’abolir.
Alors si station militaire oblige, qu’elle soit à tout le moins sioniste,pro-militaire, pluraliste, éthique et sous une supervision publique.