Parés au pire

Alors que l’armée se dit prête à toute éventualité, une unité spéciale ne ménage pas ses efforts pour venir en aide à la population, en cas d’attaques chimiques ou de tremblement de terre

Parés au pire  (photo credit: Marc Israel Sellem)
Parés au pire
(photo credit: Marc Israel Sellem)

L’unité de recherche et desauvetage de défense passive s’entraîne nuits et jours à des scénarioscatastrophe. En espérant toutefois qu’ils ne se réalisent pas. Attaques demissiles en centre-ville, attaques à l’arme chimique, tremblements de terredévastateurs, tout est possible dans cette région du monde. Même si la plupart de la population, effrayée par ces éventuelles menaces,préfère ne pas y penser. Le bataillon de recherche et de sauvetage de la défense passive de Tsahal - unedivision en pleine croissance au sein de l’armée - est composé de quatre(bientôt cinq) groupes. Son objectif : s’assurer que l’armée soit capable dedéployer ses forces dans de potentielles zones sinistrées, et sauver autant devies que possible. C’est le lieutenant-colonel Golan Vach, 38 ans, père de six enfants, qui est lechef de la section de recherche et de sauvetage, dont la majorité de laformation s’effectue dans la base de Zikim, proche d’Ashkelon. Vach a une bonneexpérience du combat au sein de l’infanterie, pour avoir servi au sein desbrigades Guivati et de parachutistes pendant 15 ans.

Selon lui, a-t-il confié au Jerusalem Post, les unités de recherches et desauvetage sont aussi essentielles que celles de combats pour la sécuriténationale. “Nous sauvons des vies dans les immeubles endommagés. Nous opéronsdans des situations qui sont classiques, ou parfois le sont moins”, note-t-il,faisant référence aux scènes où lui et ses hommes peuvent être contaminés parla radioactivité, des substances chimiques ou biologiques. “Avec toutes les menaces qui font les gros titres”, ajoute-t-il en pensant auxdiscussions sur les stocks d’armes chimiques de la Syrie, “l’intérêt de ce typede forces est important”. Les informations quant à une éventuelle guerre avecla Syrie ou une attaque sur l’Iran n’ont pas vraiment d’impact sur ses hommes.“Cela n’a pas d’importance. Nous travaillons sur ces scénarios tout le temps(sans prendre en compte l’actualité)”, rapporte-t-il.
Ouvrir ses yeux et ses oreilles 

Tsahal travaille tout au long de l’année pourentraîner ses unités afin d’agir dans des circonstances exceptionnelles. Et lesforces de secours sont équipées, à ce que l’on dit, par le meilleur matériel deprotection du monde. “Nous pouvons être amenés à nous rendre dans une zonecontaminée par un conteneur d’eau de javel qui s’est déversé... ou un bâtimentfrappé par une attaque chimique. Il faut identifier et cerner la substance,décontaminer les gens, et traiter le produit toxique”, explique Vach. Cependant, ajoute le militaire, il faut que les citoyens eux-mêmes soientactifs dans les phases de secours. “Le commandement de défense passive a investi beaucoup pour aider la populationà agir par elle-même”.
Lors du tremblement de terre à Haïti en 2012, 150 000 personnes prises au piègedans des décombres avaient été sauvées par les civils, contre 142 seulement,tirées d’affaire par des unités professionnelles venues du monde entier, ycompris d’Israël. Mais pour Vach, cependant, le pourcentage de personnessauvées par des spécialistes sera bien plus grand en Israël dans le cas d’uneattaque de missiles ou d’un séisme. Au cours de l’un des exercices, les membres de la brigade ont fait appel à desingénieurs, des électriciens, et des docteurs. Ils ont débranché le gaz, l’eauet l’électricité, “qui ne sont pas compatibles”, précise-t-il. Les secouristessont entraînés à “utiliser l’équipement le plus avancé du monde - leurs yeux etleurs oreilles”, pour localiser les personnes prises au piège avant de seservir du radar et des systèmes d’images thermiques.
“Un être humain donne une meilleure image qu’aucun chien, équipement acoustiqueou radar”, explique le responsable des brigades. “Nous voulons que les civils nous donnent le plus d’informations possibles. Parexemple, une femme qui reçoit un message de sa mère lui disant qu’elle estprise au piège. Si nous savons qu’elle était dans le salon, notre ingénieurpeut simuler la maison avant qu’elle ne s’effondre, et localiser la victime”,explique Vach.
Des entraînements de 17 heures Ce genre d’opérations précises sont appelées“opérations chirurgicales”, dans le jargon de l’unité. Elles ne peuvent seréaliser que dans les 24 heures suivant la catastrophe. Le deuxième jour, letemps devient extrêmement important pour ceux qui sont ensevelis. Lessauveteurs utilisent alors les bulldozers pour chercher dans les débris, “de lamanière la plus douce possible”. “Nous formons des soldats afin qu’ils puissent travailler dans des endroitstrès étroits et gérer les situations difficiles. Avec leur simple force, ilsdoivent être capables de briser des pierres, dans un espace exigu et àplusieurs reprises. Ils sont mis sous pression. A la fin des six moisd’entraînement ils sont opérationnels”, affirme Vach.
Malgré le large éventail de menaces qui peuvent affecter Israël, la possibilitéd’un tremblement de terre reste le risque numéro 1, en termes de dommages,estime le commandement de défense passive. Même en cas d’un séisme de faiblepuissance, 10 % de la population pourrait être touchée. “Nous savons qu’il y a un risque. Il y en a un tous les 150 ans. En 1837, 2 000à 3 000 personnes ont été tuées dans la seule ville de Naplouse”, rapporte lechef de l’unité . “Les risques sont faibles, mais si un important tremblementde terre frappe le pays, les conséquences seront désastreuses.” La section de recherches et de secours s’entraîne toute l’année pour un telscénario et a un grand nombre de renforts à mobiliser en cas de besoin. En casde séisme, les bataillons peuvent être divisés en petits groupes pour faireface à la demande. Les groupes peuvent être composés de seulement quatresoldats, un au commandement et trois autres.
Quand on lui demande s’il pense à tous ces scénarios catastrophe quand ilrentre chez lui retrouver ses six enfants, Vach répond : “Même si je voulaispenser au Hezbollah et à Nasrallah, quand je suis rentré, je ne pense qu’aurepas et à la douche des enfants”. Yarden Greenhoyz, 19 ans, a servi dans l’unité pendant un an. Elle a acceptéd’être joignable en cas de problème pour venir à la rescousse. Après des moisd’entraînement dans des sites détruits, à la recherche de débris desmannequins, et embarquant pour des exercices en pleine nuit pendant 17 heures,elle se dit prête comme elle ne l’a jamais été. “L’entraînement, c’est commeune guerre. Personne ne sait comment il va réagir si on lui tire dessus, s’ildécouvre un corps mutilé ou entend des cris. La réaction est individuelle”,explique la jeune femme. “Je sais que je serais stressée. Mais j’ai choisi cette voie et je m’efforceraide gérer. C’est cela le sauvetage» avoue Greenhoyz. “Nous espérons que cesscénarios en resteront au stade de l’entraînement”.