Soldats-robots main dans la main !

Un centre de maintenance unique dans le pays répare les robots militaires à moindres coûts.

Soldat et robot 521 (photo credit: Yaakov Lappin)
Soldat et robot 521
(photo credit: Yaakov Lappin)
A mi-chemin entre Ashdod et Ashkelon, siège un grand laboratoire rempli d’écrans d’ordinateurs, d’équipements ultrasensibles et de robots inattendus.
S’agit-il du repère de James Bond ou de celui de l’inspecteur Gadget ? Que nenni.
Il s’agit du Département d’électronique de l’armée israélienne. Le centre joue en particulier d’hôpital aux robots utilisés, et cassés, par les unités d’élite de Tsahal, dans leur lutte contre le terrorisme. Les appareils reviennent parfois en piteux état de mission. Ils sont donc réparés au plus vite, pour être renvoyés au front. Et à une fraction du prix que la manoeuvre représente normalement.
Les sergents Royi Aberlani et Sergey Zaft auraient probablement pu être de grands ingénieurs et travailler dans des entreprises privées de haute-technologie. Ils ont pourtant tous deux choisi de mettre leurs compétences au service de l’armée israélienne et de son service de maintenance robotique. “Nous nous sommes engagés à l’armée, par patriotisme et bénéficions de l’atmosphère positive qui règne ici”, explique Aberlani.
Zaft hoche la tête en signe d’assentiment.
“C’est amusant de travailler ici.” Et de remercier sa supérieure Ilanit Finkelshtain, à la tête du département d’Electronique. Celle-ci, un sourire gêné aux lèvres, prie ses soldats de cesser leurs louanges.
Les forces spéciales de l’armée utilisent deux types de robots de construction américaine : le iRobot et Foster. Ils effectuent une série de tâches qui permettent aux soldats de réduire leur exposition lors de situations potentiellement mortelles. “Le but est de sauver des vies”, résume Aberlani.
Le iRobot, par exemple, peut être jeté dans un immeuble piégé et rempli de terroristes par une fenêtre. Il est capable de se déplacer dans une pièce et d’envoyer des données visuelles aux soldats. Il fonctionne grâce à une télécommande qui utilise une fréquence radio secrète. Il sait monter un escalier, se déplacer dans l’eau et est équipé de caméras infrarouges. “Ce robot peut filmer les tunnels utilisés par les terroristes. Et transmet des images à un centre de contrôle mobile”, commente Zaft, debout à côté de l’appareil ultraperfectionné.
“Le bras de la caméra pivote à 360 degrés et permet une vue panoramique.”
Le robot Foster, quant à lui, s’occupe des engins explosifs. Il a été utilisé par les forces américaines en Irak pour sécuriser une vaste gamme de matériaux. Très souvent, les robots subissent des dommages et nécessitent des réparations.
“Nous sommes le seul centre de maintenance pour les robots militaires du pays”, souligne Aberlani. “Nous avons mis en place nos propres cours de formation et rédigé des guides d’entretien sans aucune connaissance préalable.”
En 2006, lorsque le robot Foster est introduit dans l’armée, il n’est accompagné que de quelques directives opérationnelles.
Aujourd’hui, le laboratoire peut assurer pleinement le service du robot et remplacer les pièces défectueuses sans même faire appel au fabricant américain.
Comment les ingénieurs ont-ils intégré tout cela ? Par rétro-ingénierie des machines, bien sûr.
“Nous avions des lacunes en arrivant ici.
Nous avons donc pris un robot, l’avons démonté et remonté”, explique Aberlani.
Une méthode qui leur permet de créer leurs propres pièces de rechange, et de faire économiser des dizaines de milliers de shekels à Tsahal, sur chaque réparation.
En 2007, lorsque le iRobot est mis en service, l’équipe se rend à Boston, sur le site de fabrication, et observe les techniciens pour apprendre à réparer les machines par elle-même.
Et ensuite ? Les techniciens de Tsahal ont fait appel à un talent typiquement israélien : l’improvisation. Une large gamme de matériel électronique de pointe a ainsi été remise à neuf. Des cartes mères ont été réparées au lieu d’être commandées à l’étranger pour 5 000 à 6 000 shekels à chaque fois.
Des ordinateurs de tank ont également été reconfigurés plutôt que d’être remplacés.
D’anciens panneaux de commande ont été retirés, modernisés et replacés dans le système central, qui agit comme “cerveau”, contrôle les tirs, le ciblage et les mouvements. Les caméras de vision nocturne, qui coûtent 300 shekels lors des commandes ont été remplacées par des produits locaux. Coût de l’opération : 10 centimes.
Cet ensemble d’innovations a permis à l’armée d’économiser déjà 50 000 shekels.
Proches du terrain
Le laboratoire de robotique n’est pas très loin de la bande de Gaza. Ce qui permet aux techniciens de vivre les situations de danger en première ligne.
Le centre est à portée des tirs de roquettes du Hamas. Il a donc développé un système d’évacuation rapide du personnel et de protection des équipements sensibles, quand la sirène d’urgence retentit. “Nous avons 90 secondes pour quitter les lieux”, explique David Abargil, chef de surveillance des systèmes. Un ingénieur peut tranquillement travailler sur un robot, et, la minute suivante, se dépêcher de placer sa machine dans la valise “antiroquette” spécialement conçue pour la protéger ; avant de courir vers un autre laboratoire souterrain, où le travail se poursuit. Le personnel du laboratoire exhibe fièrement une récompense présidentielle, qui fait honneur à la créativité développée dans les rangs de l’armée. Le prix a été remporté après l’ouverture d’un atelier visant à enseigner à des soldats d’autres unités comment faire preuve d’imagination pour résoudre des problèmes, hors des sentiers battus.
Le laboratoire de maintenance robotique n’est qu’une partie du centre de l’Electronique, qui maintient également des capteurs visuels sur la clôture, le long de la frontière avec Gaza, ainsi que des radars chargés de repérer d’éventuels missiles.
Au-dessus du laboratoire de robotique, les soldats sont à leur poste, jumelles à haute résolution sur le nez et viseurs à portée de main.
Le savoir-faire de ces hommes, et leur dévouement, permet à Tsahal de conserver son avance technologique sur les ennemis d’Israël. A un prix abordable.