Israël, Iran, la guerre à tout prix ?

Un conflit avec la République des Mollahs entraînerait pour Israël des conséquences sécuritaires non négligeables. Mais aussi, des remous économiques

Israël, Iran (photo credit: Reuters)
Israël, Iran
(photo credit: Reuters)
L’intensification des déclarations d’officiels israéliens et américains, quant à l’opportunité de frappes préventives sur le programme militaire nucléaire iranien dans les semaines à venir, ont contraint le gouverneur de la Banque d’Israël à sortir de sa réserve. Stanley Fischer s’emploie désormais à convaincre les investisseurs internationaux de la solidité de l’économie israélienne, même en cas d’embrasement militaire de la région. En janvier 2011, Newsweek publiait une interview de Stanley Fischer, qui révélait alors la constitution d’un fonds spécial de devises étrangères de plus de 70 milliards de dollars (75,3 à ce jour) qu’Israël aurait approvisionnés en perspective d’une guerre avec l’Iran. Une information qu’il avait à l’époque relativisée.
Un fonds qui devrait permettre de financer sans à-coup les importations en cas de guerre et de défendre éventuellement le shekel qui pourrait, selon les commentateurs, être la “première victime” d’une guerre qui n’a pas encore commencé et qui montre, depuis plusieurs mois, des signes de faiblesse face au dollar et à l’euro. La Banque d’Israël estime aussi que le poids de la dette publique à l’étranger, relativement faible, est un atout convaincant. Avec moins de 26,5 milliards de dollars de créances (dont près de la moitié couverte par des garanties du Trésor américain, et 4 milliards placés sous forme d’obligations auprès de divers soutiens de l’Etat hébreu), Israël offre des garanties certaines de maîtrise budgétaire.
Certes, la perspective d’une guerre sur plusieurs fronts (Iran, Hezbollah au Liban, Hamas à Gaza et Al-Qaida dans le Sinaï) se profile dangereusement. Mais les industriels israéliens se veulent rassurants et se disent plus inquiets par les incertitudes sur l’euro et les risques de récession que par la guerre. Israël serait, selon eux, “organisé pour affronter le pire”. A ce jour, l’ensemble des banques israéliennes ont dû réduire à hauteur de 420 millions de dollars leur exposition aux pays endettés. Toutefois les entreprises sont obligées de procéder régulièrement à des tests de leur système de sécurité et de leurs procédures d’urgence. Les banques et les compagnies d’assurance se sont dotées de systèmes informatiques alternatifs pour parer à une attaque iranienne. Une procédure d’urgence est également prévue pour la Bourse de Tel-Aviv afin de limiter une chute trop brutale des cours.
Israël ne pourra compter que sur lui-même 
Face à un conflit que l’état-major israélien estime d’une durée moyenne d’un mois, le coût de chaque jour de guerre est évalué à 1,5 milliard de shekels (370 millions de dollars) sous condition que seule la moitié de l’économie israélienne soit paralysée par des attaques qui pourraient suivre les raids israéliens contre les installations nucléaires iraniennes. Ces dépenses, et le manque à gagner en cas d’une chute brutale du tourisme, contraindraient le Trésor à procéder à de nouvelles coupes claires dans les budgets civils pour augmenter les crédits militaires, alors que le budget de la Défense, qui devait initialement s’élever à 52 milliards de shekels (13 milliards de dollars) devrait en fin de compte atteindre 60 milliards de shekels (15 milliards de dollars) cette année et ce, même si aucun conflit n’éclate.
Le fonds spécial de la Banque d’Israël présente, certes, une sérieuse garantie à court terme, mais si les diverses opérations militaires s’enlisent, le gouvernement, qui a d’ores et déjà imposé le mois dernier un plan d’austérité affectant surtout les classes les plus défavorisées, n’aura guère de marge de manoeuvre d’autant plus qu’Israël table sur une perte de moitié de la croissance en 2012 (2,3 % contre 4,7 % en 2011) et que le taux de chômage s’est accentué (de 6,8 % à 7,3 %). En 2006, malgré la seconde guerre du Liban, Israël avait pu impacter le coût des 34 jours de conflit estimé à 4,4 milliards de dollars, grâce notamment à une croissance de 5,2 %. Sur le front libanais, outre les cibles militaires et civiles que le Hezbollah serait susceptible d’attaquer, Tsahal a investi 3 milliards de shekels pour protéger les platesformes gazières qui devraient rentrer en service courant 2013, contre les menaces terroristes en mer.
Autant de zones de turbulences sur l’économie israélienne que les agences de notation surveillent de très près. Fin juillet, l’agence américaine Standard & Poor’s avait menacé Israël de dégrader sa note. Le ministre des Finances, Youval Steinitz, a prévenu que “si, à Dieu ne plaise, les spirales de l’économie israélienne devaient se retrouver dans une situation similaire à celle de l’Espagne, aucune organisation ou aucun pays n’amassera 100 milliards d’euros pour nous venir en aide”.