Vrai ou faux ?

Le Likoud à droite toute, le centre-gauche plus morcelé que jamais… Après la folle semaine de la politique israélienne, retour sur quelques idées reçues.

P6 0512 521 (photo credit: Reuters)
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(photo credit: Reuters)
Aucun risque des’ennuyer pour les Israéliens face à une classe politique toujours enébullition. Mais ces derniers jours, certains pourraient bien crier grâce. Caren une seule semaine, le Likoud a élu ses candidats à la Knesset, idem pourAvoda, le ministre de la Défense Ehoud Barak a annoncé son départ, tandis quel’ancienne dirigeante de Kadima Tzipi Livni faisait son retour.
Résultat, dans un sondage effectué par le Jerusalem Post mardi 27 et mercredi28 novembre, de plus en plus d’électeurs s’avèrent indécis : sur un échantillonde 500 personnes, 20 % ne savent pas encore pour qui voter le 22 janvier.
Et pour cause : de nombreuses questions demeurent encore ouvertes. Combien departis centristes se présenteront ? L’ancien Premier ministre Ehoud Olmertva-t-il finalement faire son « come-back » ? Tzipi Livni, Yaïr Lapid ou encoreAvigdor Liberman sortiront-ils de leur chapeau un candidatsurprise de dernièreminute pour, à nouveau, tout chambouler? Autant de questions qui trouverontleur réponse jeudi 6 décembre, lorsque tous les partis devront soumettre laliste de leurs candidats à la Commission électorale centrale. Mais certainesidées reçues peuvent être d’ores et déjà éclaircies.
En voici un aperçu.
Le Likoud s’est radicalisé.
Faux. Bien entendu, un Likoud avec Danny Danon en 6e position et Moshé Feiglinà la 14e place est clairement à droite. Et Tzipi Hotovely, devenant le visageféminin du parti, va dans le même sens. Mais le Likoud était tout autant dedroite la veille des primaires.
Tous ceux qui ont été élus lundi 26 novembre aux 20 premières places l’étaientdéjà, à l’exception de Feiglin et de Tzahi Hanegbi.
Benny Begin, lui, en est sorti. Ce farouche opposant à la création d’un Etatpalestinien est incontestablement à droite lorsqu’il s’agit de la Terred’Israël, en dépit de sa réputation gagnée en respectant les décisions de laCour suprême sur les avant-postes illégaux.
Le conciliant Meridor n’est plus sur les listes, mais il est remplacé par TzahiHanegbi, tout droit venu de Kadima, un homme qui sait faire preuve depragmatisme.
Eitan, qui paraissait souvent peu à sa place au Likoud, n’a pas été réélu. EtKahlon ne fera pas partie non plus de la 19e Knesset (ayant annoncé son retraitde la vie politique début novembre), il était connu pour être le collaborateurd’Ouzi Landau, un des « rebelles du Likoud » qui avaient rejeté ledésengagement de la bande de Gaza sous le gouvernement d’Ariel Sharon. Autantdire que les courants s’équilibrent.
En vérité, depuis que Sharon a emmené les colombes du Likoud à Kadima, le partiest clairement de droite. Et, à moins de modifier le mode d’élection desdéputés, il y a peu de chances que cela change dans un avenir proche.
Une ligne dure n’est pas bonne politiquement pour le Premier ministreNetanyahou.
Faux. En temps normal, pour gagner des élections en Israël, il faut se resituerau centre, là où se trouvent les électeurs indécis. Pas cette fois. Il y ad’ores et déjà trop de compétition au centre pour les catégories sansparti-pris idéologique, Netanyahou n’a pas besoin de cet électorat.
Le Premier ministre s’est allié à Israël Beiteinou, justement pour pouvoirétablir la plus vaste formation possible. Pour de nombreuses raisons, cecireste son objectif premier. A l’heure actuelle, son principal réservoird’électeurs se situe à droite du Likoud, parmi ceux qui auraient voté pour leparti russophone si celui-ci s’était présenté séparément.
Ce même électorat envisage à présent d’élire Habayit Hayehoudi, ou l’anciendéputé d’Union nationale Arieh Eldad, désormais à la tête du parti IsraëlHazaka (Israël fort).
C’est pourquoi Feiglin constitue un immense atout pour le Likoud. Il seraitsage pour Netanyahou d’en tirer parti.
Netanyahou a perdu les primaires du Likoud.
Vrai. Si le Premier ministre avait pu choisir sa liste par lui-même, Begin etMeridor y figureraient. Ils n’y sont pas. Youval Steinitz et Limor Livnatseraient dans les 10 premiers candidats du parti. Ils n’y sont pas. Etl’économiste Shlomo Maoz, plutôt que le militant de Petah Tikva Ouri Farej,serait à la place réservée au candidat de la région Dan.
Netanyahou peut se considérer heureux que son ancien adjoint, Ophir Akunis, aitété choisi par les militants au détriment de candidats qui auraient biendavantage à offrir.
Quant aux questions diplomatiques, Bibi aurait certainement préféré une listeplus conciliante qui lui aurait permis de faire des concessions au cas où lesPalestiniens changeraient de ton. Mais, désormais, évacuer n’importe quelavant-poste, peu importe son degré d’illégalité, sera un épuisant bras de fer.
Ajouter une journée aux primaires du Likoud s’est retourné contre le parti.
Ni vrai ni faux. Le parti a perdu d’énormes sommes d’argent en ajoutant un jourde vote supplémentaire suite aux défaillances électroniques. Mais il aégalement économisé le coût des plaintes en justice, qui auraient étéinévitablement déposées par les candidats éconduits. Seuls 7 % des militantsont voté lors de la seconde journée, mais au soir du premier jour, le taux departicipation était plus élevé que le total des votants lors des dernièresprimaires Likoud, donc rien d’étonnant à cela.
Mercredi, le journaliste Amit Segal révélait sur Aroutz 2 les résultats du 1erjour, sauvegardés en cas de nouveaux problèmes techniques : Begin ne serait pasentré à la Knesset dans tous les cas.
Les partis de centre-gauche devraient s’allier.
Vrai. Certains commentateurs de premier plan en Israël ont écrit dans lesmédias ces derniers jours qu’Avoda, Yesh Atid et Tzipi Livni devraient seprésenter séparément, afin d’optimiser leurs voix. Les sondages, montrant quele Likoud et Israël Beiteinou obtiendraient quelques sièges parlementaires demoins s’ils concouraient ensemble, tendent à appuyer cette hypothèse.
Mais, si le bloc de centre-gauche fait liste à part, aucun parti nes’approchera du nombre de mandats que le Likoud-Beiteinou s’apprête àdécrocher. Le seul espoir pour l’opposition serait de former un « mégaparti »réunissant Ehoud Olmert, Shelly Yacimovich, Tzipi Livni et Yaïr Lapid, avec lesoutien extérieur de l’ancien chef d’Etatmajor Gaby Ashkénazi.
De cette façon, les électeurs auront le sentiment de choisir une alternative àla candidature de Bibi au poste de Premier ministre. Le résultat final seraitplus grand que la somme des votes recueillis par chacune des formations et ce «méga-parti » pourrait demander au président Shimon Peres d’autoriser son leaderà négocier avec les ultra-orthodoxes et former un nouveau gouvernement.
Mais au lieu de s’unir contre Netanyahou, Livni, Yacimovich et Lapid devraients’attaquer les uns les autres. Dans l’entourage du Premier ministre, on avoueque Bibi adore observer le centre-gauche s’entre-dévorer.
Le retour de Livni fera avancer la paix.
Faux. Puisque le centre-gauche ne s’unira pas, Netanyahou gagneraindubitablement. C’est pourquoi faire progresser la paix nécessite avant toutde rendre le futur gouvernement de Bibi le plus modéré possible. Le seul partid’opposition qui pourrait très certainement rejoindre la coalition du Likoudaprès les élections est Yesh Atid, qui a subi de plein fouet le retour deLivni.
Avoda, dont l’avenir coalitionnaire est moins certain, a également été durementtouché.
Tout parti mené par l’ancienne dirigeante de Kadima n’a aucune chance de siégerdans un gouvernement mené par Netanyahou, donc toute voix pour Livni est unevoix qui rend le futur gouvernement plus à droite.
Selon cette même logique, la pire chose qui soit arrivée la semaine dernière auprocessus de paix est le départ d’Ehoud Barak, dont les sièges iront à Avoda etau parti de Livni.
Barak modère le gouvernement actuel de Binyamin Netanyahou et en aurait sansaucun doute fait de même lors de la 19e Knesset.